La coutume internationale

Fiche rédigée par Zeleikha al Falamanki , étudiante de droit français à l’Institut de Droit des Affaires Internationales au Caire (Égypte), sous l’égide de l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne.

La coutume internationale est la deuxième source du droit international après les traités.

§1 : Définition

L’article 38 du Statut de la Cour Internationale de Justice (CIJ) stipule toutes les sources sur lesquelles il faut se baser en droit international. Cet article définit la coutume internationale comme étant une pratique juridique acceptée en tant que Droit et donne naissance, de ce fait, à une règle juridique obligatoire applicable en droit international.
Une coutume se définit au moment où des Etats suivent un certain comportement, alors même qu’il n’existe aucun traité les obligeant à adopter ce comportement. Pour qu’il y ait coutume obligatoire, deux éléments constitutifs s’imposent :
-d’ordre matériel : la pratique ;
-d’ordre psychologique : l’opinio juris sive necessitatis (= conviction de droit ou de nécessité)

A – Le critère matériel ou objectif

Afin d’avoir une véritable pratique, il faut
1 – être suivie par un certain nombre d’Etat
2 – Une continuité d’application dans le temps.

1º) « Quorum » international

Il faut qu’il y ait une participation très large et représentative de la communauté internationale (CIJ). Ce nombre assez large est impératif pour que la CIJ puisse prouver l’existence d’une coutume au cas où un Etat ne l’appliquerait pas. Les règles atmosphériques ont été pendant longtemps des coutumes internationales. Les premiers à avoir appliqué cette règle étaient les Etats-Unis et l’URSS car ils étaient les seuls possédant des engins capables d’aller dans l’espace : ils ont donc créé un précédent. Si des Etats tiers s’opposent à cette coutume, elle s’annule.
En ce qui concerne le comportement individuel des Etats, en matière de coutume internationale, les preuves seraient recherchées essentiellement dans les décisions du pouvoir exécutif (Premier Ministre, Président, Ministre des Affaires Etrangères).

2º) Continuité d’application dans le temps

En plus de la pratique d’un grand nombre d’Etats, une certaine longévité de pratique est nécessaire d’où l’adage : « Une fois n’est pas coutume. » Néanmoins, la durée n’est pas absolue en ce sens qu’une certaine pratique peut avoir existé pendant longtemps sans pour autant avoir été largement appliquée, et une autre avoir vécue moins longtemps avec une marge de recours beaucoup plus large et effective. On voit encore une fois l’aspect volontaire des Etats à appliquer telle ou telle pratique qui deviendra, un jour ou l’autre, coutume.
Les pratiques ont tendance à devenir de plus en plus rapidement coutume en raison de la multiplication des relations internationales.

a) Le passé caractérisé par la lenteur

Le caractère obligatoire et coutumier d’une pratique se formait d’une manière très lente. Cela est du au nombre très restreint d’Etats existant et, par conséquent, de leurs relations limitées. En effective, le domaine des relations, à l’époque, était exclusif aux matières diplomatiques et consulaires. De cette pratique, ont découlé les immunités accordées aux représentants ; le principe d’extraterritorialité des locaux diplomatiques lié au droit d’asile (car ces locaux sont considérés comme étant hors du pays : c’est une atténuation de la souveraineté de l’Etat dans la mesure où les forces d’exécution ne peuvent y pénétrer). Il existe de même des coutumes qui ne s’appliquent plus, comme la Trêve de Dieu (pas de guerre entre mercredi soir et lundi matin), le droit d’asile dans les églises.

b) Actuellement : la rapidité

Les avancements de la technologie dans les domaines de la communication ont permis une extension massive des domaines d’application du Droit international. Actuellement, pas beaucoup de nouvelles coutumes surgissent, mais lorsqu’il y en a, elles le deviennent beaucoup plus rapidement.
Exemple d’une coutume nouvelle : le plateau continental
En 1945, le Président américain H. Truman déclare de manière unilatérale que le plateau continental est un droit exclusif à l’Etat côtier et que ce droit s’exerce sur 200 miles marins. L’absence d’opposition à cette déclaration a donné un caractère coutumier à cette pratique. Dans la Convention de Genève sur le plateau continental en 1958, on prévoit l’éventualité où deux Etats limitrophes ayant 250 miles marins entre eux veulent déterminer leurs plateaux continentaux. Dans ce cas de figure, la Convention a élaboré la théorie de l’équidistance selon laquelle on accorderait 125 miles marins à chaque Etat. L’Allemagne s’oppose et refuse de ratifier la Convention. Le litige passe devant la CIJ, qui est appelée à répondre à la question suivante : doit-on appliquer la théorie de l’équidistance prévue par la Convention de Genève de 1958 en l’espèce, malgré le fait qu’elle n’a pas été ratifiée par l’Allemagne, en affirmant qu’elle a valeur coutumière ? La Cour affirme que vu que la Convention ne lie pas toutes les parties, l’article 6 de celle-là ne s’applique pas en matière de délimitations du plateau continental. D’autre part, la Cour affirme que le principe d’équidistance ne constitue pas une règle de droit international coutumier. Il s’ensuit ainsi que pour qu’une disposition de traité ait valeur d’une règle de droit international coutumier, celle-là doit avoir été une coutume codifiée par le traité en question.

B – Le critère subjectif

Cet aspect psychologique de la coutume est davantage plus difficile à discerner que l’aspect étudié précédemment. La simple répétition de pratique n’est qu’une condition nécessaire loin d’être suffisante pour constituer une coutume. On dit que la pratique en question doit avoir la conviction de droit ou de nécessité (opinio jure sive necessitatis.) Un sentiment d’obligation juridique accompagne intrinsèquement la répétition de cette pratique. La reconnaissance de cette pratique comme étant une coutume obligatoire est un critère inhérent à son existence. La Cour Internationale de Justice est souvent appelée à prouver la valeur juridique d’une coutume. Ce fut le cas en 1960 lorsqu’elle a rendu l’arrêt relatif à l’affaire du Droit de passage sur territoire indien (Portugal c/ Inde) La coutume dont l’affaire fait l’objet est une coutume locale, selon laquelle le Portugal passait par l’Inde afin d’avoir accès à la mer depuis les enclaves qu’il possédait au sein du territoire indien. En 1952, l’Inde empêche le Portugal le passage à la mer. L’affaire est soumise à la CIJ qui statue ainsi : l’Inde n’a pas violé le droit coutumier dans la mesure où le passage portugais à la mer suscitait un mécontentement populaire indien, étant donné le contexte de décolonisation propice aux révoltes et aux rébellions. Cependant, en reprenant des textes et traités conclus auparavant, la Cour affirme que le passage sur territoire indien sera interdit pour les forces armées, la police armée, les armes et munitions. Il n’en sera pas de même pour les personnes privées. De cette affaire, on admet l’existence de coutumes régionales ou locales qui lient un nombre limité d’Etat, aux cotés de la coutume générale commune.

§ 2 : Coutumes et traités

L’article 38 du Statut de la CIJ ne pose pas de hiérarchie entre la coutume et le traité. Il s’ensuit qu’ils ont la même valeur juridique en ce sens que les deux reposent sur le consentement des Etats vis-à-vis des autres. Ainsi, dans un conflit entre un traité et une coutume, le plus récent l’emporte.

A – Des sources complémentaires

Pendant longtemps, la coutume était la source principale du droit international. De nos jours, viennent s’ajouter à celle-là les traités. La coutume jouit d’un certain nombre d’avantages par rapport aux traités. Tout d’abord, la coutume est une source souple du droit : elle s’adapte plus ou moins automatiquement aux circonstances et présente un caractère beaucoup plus casuistique que le droit des traités. De plus, la coutume s’impose à tous les Etats dans la mesure où aucune signature ou ratification préalable assure le lien d’un Etat à une coutume : dès lors qu’une coutume est « élaborée », tous les Etats y sont liés même s’ils n’existaient pas lors de son émergence. Comme toute autre chose, la coutume s’approprie indubitablement des inconvénients.

B – Rédaction des coutumes

Le fait que la coutume soit orale, ou plutôt non-écrite, présente un inconvénient colossal : son instabilité très étroitement liée à sa souplesse citée ci-dessus. Ce caractère implique une potentielle ambiguïté de la coutume qui laisse les portes grandes ouvertes à de multiples interprétations. Pour remédier à ce vice, une tendance accrue de mettre à l’écrit les coutumes surgit. Ce phénomène est particulièrement bénéfique aux nouveaux Etats qui ne sont pas toujours pas au courant des coutumes en place et applicables au moment de leur création, d’où une contestation vive des coutumes dans les années 1960’s. Ces Etats contestataires demandent une codification des coutumes, ce qui sera entrepris par une commission des Nations Unies qui ont rédigé les textes suivants : la Convention de Vienne sur le Droit des traités de 1969 ; la Convention sur les immunités et privilèges diplomatiques de 1961 ; la Convention de Montego Bay sur le Droit de la mer ; … Quand une coutume est transformée en traité, elle ne cesse d’exister ce qui lient même les Etats n’ayant pas signé le traité. Un traité de codification ne porte pas atteinte au caractère obligatoire d’une coutume préexistante ( art. 43 de la Convention de Vienne sur le Droit des traités). Si on incorpore des principes dans des conventions multilatérales, cela ne voudrait pas dire qu’ils cesseraient d’exister et de s’appliquer en tant que principe de droit coutumier à l’extérieur du domaine prévu par la convention dont il est question. Enfin, un traité peut donner naissance à une coutume : en 1969, la CIJ donne valeur coutumière à la notion de plateau continental.

C – La coutume contraire au traité

Ce cas est très rare. On parle de coutume contra legem. Dans l’éventualité, on applique le plus récent des deux

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *