Sommaire : cours complet de Grands problèmes politiques du monde contemporain

Ce cours était auparavant appelé « Histoire de la vie politique ».


Première partie : La vie politique française animée par les débats constitutionnels (19ème siècle à 1958)

Seconde partie : Les politiques publiques, entre ordre public et libertés surveillées

Chapitre 2 : État, économie, société

Le droit du travail est une branche qui apparaît ; elle est issue de la naissance de la classe ouvrière.

Contexte : révolution ouvrière (terme utilisé par Engels en 1845, repris par Marx en 1865).
Les énergies traditionnelles (homme, animaux, eau, vent) sont progressivement remplacées par la vapeur (combustion du charbon).

On assiste à un remplacement progressif du travail à la main par la machine → machinisme.
+ division / spécialisation du travail

On parle de “révolution” parce que la production va complètement changer de visage.
→ impact considérable sur l’économie

L’Angleterre est en avance.
On y découvre le processus de condensation en 1760.
Watt dépose vers 1780 le brevet de la locomotive à vapeur.

Section 1 : Le contrôle de l’économie

§ 1. Le contrôle direct : la nationalisation

Certains régimes sont plus favorables à la nationalisation que d’autres.
Exemple : le Front populaire y est favorable.

A – L’industrie et les transports : l’exemple du chemin de fer

La France est à l’origine en retard sur l’Angleterre sur le plan des transports.
Lors de la révolution industrielle en France, on cherche à rendre les moyens de transports + rapides.

La 1ère ligne française est réalisée sur concession octroyées par ordonnance du roi Louis 18 en 1823.
Elle est inaugurée en 1827 vers St Étienne.
C’est une ligne expérimentale, courte, pas équipée de locomotives : les wagons sont tirés par des chevaux et transportent des matières premières.

1837 : 1ère ligne équipée de machines à vapeur.
1839 : ligne Paris – Versailles.

Sous le régime libéral de la monarchie de Juillet, l’exploitation des chemins de fer est confiée à des sociétés privées par une loi de 1842.
Certaines voix s’élèvent déjà pour que les chemins de fer soient exploités par un monopole d’État.

Un système de concessions d’État est mis en place : pour exploiter une ligne, il faut obtenir l’autorisation de l’État.
Conditions :
1- la société doit posséder un capital important (obj : éviter les faillites)
2- l’État fixe le trajet de la ligne
3- l’État contrôle le prix du transport
4- l’expropriation relève de l’État

Les compagnies financent la construction des gares et l’acquisition du matériel roulant.

Ce système permet le développement de nombreuses lignes partout en France.
En 1848, il y a 2 000 km de lignes en France.
En 1870, il y a 17 000 km de voies.

Conséquence : développement de certaines villes.
Exemple : la ville de Dijon, reliée à Paris, voit sa population multipliée par 3 très rapidement dans la 2e moitié du 19e siècle.

Les lignes principales partent de Paris pour aller vers les côtes et les pays étrangers.
Très peu de lignes transversales sont construites.

Grande mobilisation des capitaux : le chemin de fer devient le placement classique pour les riches comme pour les pauvres (secteur extrêmement rentable).
Mais la rentabilité va diminuer parce que sous le 2nd Empire réapparaît le suffrage universel.
→ multiplication des élections
→ les candidats promettent aux électeurs l’arrivée du chemin de fer (essentiel pour éviter la mort économique du territoire)
→ ces axes nouveaux sont peu empruntés
→ chute des bénéfices
→ peu de dividendes sont distribués aux actionnaires

Napoléon 3 demande aux grandes compagnies ferroviaires de développer de nouvelles lignes vers les régions les moins bien desservies en promettant de participer aux dividendes.

Les sociétés se regroupent.
En 1852, il ne reste plus que 6 grandes sociétés ferroviaires.

Pendant la Première Guerre mondiale, l’État prend sous son autorité toutes les compagnies ferroviaires sous un régime de régie (= exploitation directe d’une activité par l’État).
Mais il ne nationalise pas les compagnies.

Après la guerre, les chemins de fer sont rendus aux compagnies privées, mais l’État conserve un contrôle.
À chaque fois qu’une compagnie fait faillite, l’État en reprend la gestion → elle devient publique.
→ étatisation progressive

1938 : nationalisation ; les anciennes compagnies fusionnent pour former la SNCF.

B – Les finances : la Banque de France

À sa création, la Banque de France est une banque privée.
Elle n’est nationalisée qu’en 1936.

Elle apparaît avec le consulat.
Objectif de Bonaparte : récompenser les banquiers qui ont financé son coup d’État.

La BDF est totalement livre jusqu’en 1805, où elle frise la faillite.
À partir de 1806, l’État est + regardant.
Napoléon comprend que la BDF sert la politique de ses actionnaires et non l’intérêt de la nation, alors qu’il comptait sur la BDF pour soutenir l’économie française par l’émission de billets de banque et par l’acompte (= aider l’économie française en rachetant certaines créances de commerçants).

1806 : Napoléon impose un gouverneur à la tête de la banque.
Les choses vont peut changer ; l’objectif de la banque reste avant tout de réaliser des bénéfices.

1840 : la Banque de France utilise son influence pour obtenir le monopole de l’émission des billets dans toutes les villes où elle a des succursales implantées.
1848 : la République a besoin d’argent pour financer les ateliers nationaux. La BDF exige de pouvoir absorber toutes les banques départementales.
→ acquiert un monopole de fait sur l’émission du papier monnaie

1860 : annexion par la France de la Savoie.
La France accorde certains privilèges à cette région, notamment de conserver la Banque de Savoie (indépendante ; peut émettre des billets).
Les frères Pereire rachètent la Banque de Savoie et inondent la France de billets savoyards.
La BDF fait pression sur le gouvernement pour absorber la BDS ; Napoléon 3 accepte.

Sous la 3e République, la loi accroît le pouvoir du gouverneur de la BDF.
En 1897, l’État oblige la BDF à lui verser une redevance.
→ moyens assez peu efficaces ; la BDF décide ou non d’aider le gouvernement suivant ses préférences politiques

Une bulle financière éclate en 1929 et touche la France en 1931.
À partir de 1932, l’État se lance dans une politique de dépense publique importante.
Le déficit de la France augmente et la question de la nationalisation de la BDF se pose (pour que celle-ci serve à soutenir l’économie).

1936 : le Front populaire arrive au pouvoir et propose la nationalisation de la BDF.
Léon Blum (président du Conseil) se contente de dissoudre le conseil de régence de la BDF et le remplace par un CA composé autrement.

1945 : la BDF est nationalisée ; devient la banque de l’État français (loi du 2 décembre 1945).
Elle est placée sous la tutelle du gouvernement (PM).
Objectif : soutien de l’économie française et gestion de la dette de l’État.

Aujourd’hui, la BDF est placée sous le contrôle de la BCE, qui coordonne l’action des banques nationales de l’Union Européenne.
Rôles de la BCE :
> émettre l’euro
> garantir la stabilité du pouvoir d’achat
> fixer les orientations de la politique monétaire en Europe

§ 2. Le contrôle indirect : la régulation

A – La libéralisation du régime des sociétés anonymes

On distingue plusieurs formes de sociétés de commerce :

  • Les sociétés de personnes : se constituent intuitu personae, entre personnes qui se connaissent et se font confiance ; ces personnes contrôlent la société.
  • Les sociétés de capitaux : ne s’intéressent pas aux personnes ; ce qui compte, c’est l’apport de capitaux.
    > sociétés anonymes
    > commandite par actions

Les sociétés anonymes (SA) suscitent la méfiance des pouvoirs publics.
Leur objectif est de dégager des bénéfices par la spéculation ; elles sont donc vues comme des dangers potentiels pour la stabilité politique et financière.
Les associés ne supportent les dettes qu’à hauteur de leur participation.

Le Code de commerce de 1807 dispose que les SA sont soumises à une autorisation du gouvernement.
Elles soumettent une autorisation au préfet, qui mène une enquête soumise au bureau du commerce puis au Conseil d’État, qui se prononce.
Si le Conseil d’État dit oui, une ordonnance est rédigée et signée par le ministre du commerce.

Le Conseil d’État va rejeter les demandes lorsqu’une autre forme de société est possible.
S’il a le moindre soupçon de monopole, il rejette également.
Ce système est incompatible avec le développement économique que connaît la France au 19e siècle.

Napoléon 3 veut supprimer l’autorisation préalable.
Il dispense les sociétés les moins importantes (capital < 20 millions de francs) d’autorisation préalable.

Une loi de 1867 supprime l’autorisation préalable pour toutes les SA.
→ augmentation exponentielle du nombre de SA
À la fin de la Première Guerre mondiale, 37% des sociétés sont des sociétés de commerce.

Les SA possèdent un capital divisé en actions.
Le capital peut être augmenté grâce à un système d’emprunts.

B – Le développement des banques d’affaires

Cette partie du cours n’est pas traitée en 2021-2022.

Section 2 : La naissance d’un droit du travail

§ 1. La loi du 22 mars 1841 sur la condition ouvrière

A – Les conditions de vie et de travail des ouvriers

La classe ouvrière est très hétérogène. On distingue différents types d’ouvriers :
> agricoles
> ceux qui travaillent dans les usines (statut variable)
> les ouvriers qualifiés (ex : charpentiers)

Les ouvriers qui travaillent dans les usines se concentrent dans certaines régions industrialisées.
Ils représentent 5 à 6 millions de français en 1848.

Leurs conditions de vie sont misérables.
Leurs salaires sont indexés et ne suivent pas l’augmentation du coût de la vie.
Salaires moyens :
> 2 francs/jour pour un homme
> 1 franc/jour pour une femme
> 0,5 franc/jour pour un enfant
Le loyer représente 10% du salaire.
Les patrons peuvent opérer des retenues sur salaire ou infliger des amendes.

Les journées de travail durent de 14 à 16h, facilitées par l’apparition de l’éclairage au gaz.
Il n’y a pas de congés. Les ouvriers travaillent 6j/semaine.

Les usines emploient des enfants pour surveiller les machines.

Insécurité permanente.
Tomber malade est une catastrophe (il n’y a pas d’arrêt de travail).
Les conditions d’hygiène et de santé sont effroyables.
Entre 1800 et 1840, l’espérance de vie d’un ouvrier passe de 28 à 20 ans.
→ développement de l’alcoolisme, de la petite délinquance, de la prostitution, des infanticides, des suicides

Les patrons disposent de tout pouvoir pour aménager les conditions de travail.
L’ouvrier n’a aucun pouvoir de négociation.

De 1804 à 1890, le contrat conclu entre un ouvrier et son patron est un contrat de louage d’ouvrage et d’industrie.

De 1781 à 1791, puis à partir de 1803, l’ouvrier est soumis au livret ouvrier.
Sans ce livret, l’ouvrier ne peut pas être embauché, et il peut être poursuivi pour délit de vagabondage.
Si l’ouvrier veut changer de domicile, il a besoin du visa du maire.
En 1854, le livret est étendu à l’ensemble des secteurs de l’industrie.

Certains patrons fournissent l’éducation des enfants et financent la construction de logements, hôpitaux et bibliothèques → paternalisme.

B – L’adoption de la loi du 22 mars 1841

La loi du 22 mars 1841 constitue la 1ère intervention du législateur dans le domaine du travail.
Cette loi est adoptée suite à l’enquête du docteur Villermé.

Pour lui, l’hygiène est un problème d’ordre social.
En 1832, il mène une étude sur le monde ouvrier ; il examine les effets de l’industrie sur ceux qui y sont employés.
En 1839, il publie ses résultats : Tableau de l’état physique et moral des ouvriers.

Ces résultats sont saisissants, notamment en ce qui concerne le travail des enfants ouvriers.
Le travail qui leur est demandé est dangereux (accidents qui peuvent conduire à l’amputation + infections pulmonaires dues à la poussière + déformation des membres / rachitisme).
Il insiste sur la nécessité économie du travail des enfants mais aussi de leur éducation, et considère l’ouvrier comme responsable d’un grand nombre de ses malheurs.


La loi du 22 mars 1841 interdit le travail des enfants de moins de 8 ans.
Le travail des enfants de 8 à 12 ans est limité à 8h/jour.
Le travail des enfants de 12 à 16 ans est limité à 12h/jour.
+ les enfants de moins de 13 ans ne peuvent pas travailler de nuit
+ obligation de scolarité des enfants de 8 à 12 ans

Un corps d’inspecteurs est mis en place pour appliquer cette loi.
Limites :
> la loi ne concerne pas les ateliers de moins de 20 ouvriers
> les inspecteurs sont des anciens patrons d’usines → peu efficaces
> la loi n’envisage pas tous les cas de figure (ex : enfant qui travaille dans plusieurs ateliers)
> l’État ne se donne pas les moyens de l’appliquer

§ 2. Le développement d’une législation ouvrière

1848 : décret : les prud’hommes doivent être paritaires.
1851 : réduction de la durée des journées de travail des apprentis.

Il faut attendre le 2nd Empire pour voir des mesures législatives effectives appliquées.

A – L’encadrement du temps de travail

Loi du 19 mai 1874 :
> interdiction du travail des enfants de moins de 12 ans
> le travail des enfants de moins de 16 ans est limité à 12h/jour
> création d’un corps d’État chargé d’inspecter usines et ateliers
→ vrais débuts de l’inspection du travail

1890 : l’âge minimum passe de 12 à 13 ans.
+ le temps de travail des adultes est limité à 12h pour les hommes et 11h pour les femmes

1906 : la loi réintroduit le repos dominical (supprimé pour des raisons de laïcité).
1919 : limitation de la journée de travail à 8h/jour pour tout le monde.
1936 : création des congés payés ; le temps de travail hebdomadaire est limité à 40h.

B – La naissance du contrat de travail

Le contrat de louage d’ouvrage et d’industrie subsiste jusqu’à la fin du 19e siècle.
1890 : développement du contrat de travail.
→ les ouvriers sont employés pour une tâche précise ou un laps de temps déterminé

La naissance des grandes industries favorise la multiplication des tâches particulières (division et spécialisation du travail théorisé par Taylor).

La loi de juillet 1890 remplace le livret ouvrier par un certificat de travail.
Les relations entre employeurs et employés entrent dans le droit commun des obligations.
→ relation unilatérale devient bilatérale

La loi de décembre 1890 dispose que les contrats de louage de service à durée indéterminée (deviennent “contrat de travail”) sont des contrats particuliers, qui peuvent être rompus de manière unilatérale, ce qui peut donner lieu au versement de dommages et intérêts à l’autre partie.
Le juriste Pagnol en déduit que tout licenciement constitue une faute de la part de l’employeur qui doit conduire à une indemnisation.

La loi de 1910 portant codification des lois ouvrières :
> refond complètement l’ensemble des dispositions
> promulgue le Code du travail → titre 2 “Le contrat de travail” → consacre juridiquement l’expression

§ 3. La reconnaissance de l’action collective

Les révolutionnaires de 1789, inspirés par les idées libérales, rendent le corporatisme et l’action illégales et poursuivies sur le plan pénal.
→ la grève et le syndicalisme sont interdites depuis 1789

A – La grève : de la répression à la consécration d’un droit

Les 1ères grèves importantes ont lieu dans les années 1830.
Elles deviennent générales à partir des années 1840 (grave crise économique).

Tous les bords politiques sont opposés à la grève et partisans d’un maintien brutal de l’ordre public.

Luddisme : les ouvriers cassent les machines de l’usine.

Insurrection des Canuts à Lyon en 1831 :
Des ouvriers de la soie se révoltent afin de réclamer un tarif fixe des salaires.
Ils prennent Lyon d’assaut.
La révolte est sévèrement réprimée par l’armée : 200 morts et 500 blessés.

Casimir Perier, président du Conseil des ministres : “il faut que les ouvriers sachent bien qu’il n’y a de remède pour eux que la patience et la résignation”.

Juin 1848 : la suppression des ateliers nationaux entraîne un soulèvement des ouvriers et chômeurs, en particulier à Paris.
La répression par le général Cavaignac fait des milliers de morts.

La loi du 25 mai 1864 supprime le délit de coalition.
→ la grève cesse d’être poursuivie devant les tribunaux
⚠️ Ne crée pas de droit de grève : la grève reste une faute civile, qui justifie la rupture du contrat de travail

Fin 1920 : grève générale ; paralysie du réseau ferroviaire ; pour obtenir une augmentation des salaires et la nationalisation des chemins de fer.
→ la grève devient un moyen de pression contre le gouvernement

Les grèves de 1936 s’accompagnent de l’occupation des usines.
Elles frappent des secteurs jusque-là protégés : grands magasins, banques…
Les propriétaires d’usine font pression sur le gouvernement pour stopper les grèves.

Accords de Matignon, 7 juin 1936 : congés payés + limitation du temps de travail à 40h/semaine.

La grève entre dans le droit au début de la 4e République, quand les élus communistes réussissent à faire de la grève un droit (préambule de la Constitution de 1946).

B – Les syndicats

Le syndicalisme est consacré par une loi de mars 1884, qui met fin à l’interdiction des associations professionnelles.
Les syndicats professionnels peuvent désormais se former sans autorisation préalable.
Ils possèdent une personnalité juridique.

Cette loi est mal vue par les ouvriers car elle possède des restrictions qui limitent la liberté syndicale :
> les statuts et la liste des dirigeants doit être déposée auprès de la mairie ou de la préfecture
> ne prévoit aucune sanction vis-à-vis des employeurs qui prendraient des sanctions contre les employés syndiqués

Les syndicats ne peuvent agir en justice que pour la préservation de leur patrimoine ou la protection de l’intérêt collectif.
→ ils ne peuvent pas défendre les intérêts d’un membre
+ toute action politique est exclue

Développement du contrat collectif de travail (on parle aussi de “convention collective”) = convention signée entre les syndicats ouvriers et les employeurs, qui permet de remédier à l’inégalité des parties dans le contrat de travail.

Au début, les juges considèrent que les conventions collectives n’ont pas de caractère obligatoire. La capacité des syndicats à les faire respecter est donc limitée.
Mais une loi de 1919 reconnaît la primauté de la convention collective sur le contrat individuel.

L’action collective va donc être reconnue à travers le syndicalisme et les conventions collectives.

Chapitre 1 : Ordre public et police administrative

Ordre public : défense de la sécurité, de la salubrité, de la dignité humaine et de la tranquillité publique.

La notion d’ordre public est floue :
> qui est habilité à le définir ?
> quelle interprétation lui donner ?
Souvent, c’est le pouvoir qui le définit.

Section 1 : De la police des cultes à la séparation de l’Église et de l’État

§ 1. De la nationalisation de 1789 au Concordat de 1801

Le Concordat est le traité qui a régi les relations entre l’Église et l’État pendant 2 siècles.

À la fin de l’Ancien Régime, le catholicisme est la religion majoritairement pratiquée en France.
On considère alors que l’Église et l’État sont indissolublement liés.

Les révolutionnaires tentent de remplacer la religion catholique par une religion civile (culte des symboles de la Révolution), mais c’est un échec.

Nationalisation des biens de l’Église : novembre 1789.
L’Église était le plus grand propriétaire du royaume, et touchait la dîme (1/10e des récoltes).
+ la dette de l’État atteint des sommets (→ 51% des revenus annuels vont à son paiement)
→ l’État absorbe les biens de l’Église pour rembourser la dette

Les révolutionnaires affirment que l’Église n’est pas propriétaire, mais simplement dépositaire.
→ idée : la nationalisation est un retour à leur propriétaire légitime.
L’État vend les biens de l’Église aux enchères.
→ crée de fortes tensions entre la France et le Saint-Siège
→ crée une fracture sociale entre les français

En 1799, Bonaparte veut rétablir la paix. Il voit dans la religion un instrument de pouvoir.
Il signe une sorte de traité de paix avec le pape Pie 7 :
> ratifié le 10 septembre 1801
> en vigueur jusqu’en 1905

Des concessions y sont faites de part et d’autre :

  • le pape reconnaît la légitimité de la République française
    + le caractère irrévocable de la vente des biens nationaux
    + admet que la religion catholique ne redeviendra pas religion d’État ; juste “religion de la majorité des français”
    + le chef de l’État nomme les évêques
  • l’État met à disposition de l’Église les églises qu’il n’a pas vendues
    + verse un traitement aux membres du clergé

Le Concordat est ratifié en 1801 mais promulgué loi de la République que le 7 avril 1802, en même temps qu’un règlement de police administrative de 77 articles (”Articles organiques”), qui restreint les pouvoirs prévus du pape.
> les actes du Saint-Siège ne peuvent pas entrer en vigueur sans l’accord du gouvernement
> les évêques doivent obtenir une autorisation pour se rendre à un concile à l’étranger
> règlemente les habits ecclésiastiques, le sonnage des cloches, les jours des processions…
> tous les membres du clergé (→ fonctionnaires) doivent prêter serment de fidélité au régime
→ le culte est domestiqué par les autorités civiles et intégré dans l’ordre public

§ 2. La République contre l’Église de France

En 1875, la République s’installe.
Les républicains considèrent que la religion constitue une menace, parce qu’elle est un soutien de la monarchie.

Ils commencent par s’attaquer aux congrégations religieuses (= sociétés religieuses composées d’individus d’un même sexe qui vivent ensemble pour accomplir une ou plusieurs missions spirituelles ; ex : bénédictins, jésuites, etc.).
Théoriquement, elles ont besoin de l’accord du gouvernement, mais en pratique plus besoin.

Les républicains s’y attaquent car ce sont elles qui sont exclusivement en charge de l’enseignement.
+ les seules à offrir assistance aux pauvres et aux malades
+ elles sont composées de beaucoup d’étrangers, soupçonnés de distiller des idées anti-républicaines

En 1879, Jules Ferry engage la lutte contre les congrégations.
Il rédige un projet de loi qui interdit l’enseignement aux congrégations non autorisées, mais le Sénat refuse.

En mars 1880, le gouvernement adopte 2 décrets :
1- ordonne aux congrégations jésuites de se dissoudre et de quitter le sol français
2- donne 3 mois aux congrégations pour s’enregistrer

Les congrégations laissent passer les 3 mois sans s’enregistrer.
Des scènes de violence et d’expulsions prennent ensuite place.
Le gouvernement envoie l’armée.
Souvent, les civils défendent les congrégations.

Certains magistrats refusent d’appliquer les décrets.
Le gouvernement viole le principe d’inamovibilité des magistrats du siège.
Beaucoup de magistrats démissionnent.

En 1901, la 2ème phase commence.
La loi du 1er juillet 1901 sur les associations vise les congrégations.
Projet présenté par Waldeck-Rousseau, qui considère les congrégations religieuses comme contraires à l’ordre public car fondées sur le refus par leurs membres de leurs droits fondamentaux.
Idée : seules les associations civiles sont licites.

Cette loi édicte un régime spécial pour les congrégations : elles ne peuvent pas se former sans l’autorisation d’une loi.
+ l’enseignement et la direction d’un établissement d’enseignement leur sont définitivement interdits

Une congrégation autorisée peut ouvrir un établissement avec décret du Conseil d’État.

Cette loi est mise en œuvre par un gouvernement dirigé par Émile Combes (anticlérical).
Il fait fermer près de 10 000 enseignements d’établissement.
Plus de la moitié de ces écoles vont rouvrir avec des enseignants laïcs ou régularisés.

Une loi de 1904 interdit définitivement l’enseignement aux congrégations.

La séparation des Églises et de l’État est préparée par le législateur, le gouvernement et la jurisprudence du Conseil d’État.
En effet, sous le régime du Concordat, le Conseil d’État est habilité à se prononcer contre les membres du clergé : “appel comme d’abus”.
Exemple : en 1904, 4 archevêques sont condamnés par le Conseil d’État pour avoir consigné une lettre ouverte au PR pour protester contre une loi → ils perdent leur traitement.

§ 3. La rupture avec Rome et la loi de 1905

En 1904, 2 évènements précipitent la rupture avec Rome :

  1. Une visite officielle du PR Émile Loubet au roi d’Italie est considérée par le pape comme une insulte (puisque l’État italien a annexé la ville de Rome).
    Le président du Conseil Émile Combes rappelle l’ambassadeur français au Vatican.
  1. Le pape convoque 2 évêques pour qu’ils soient jugés.
    Pour le gouvernement, le pape aurait dû recourir au gouvernement.

→ rupture entre la France et le Saint-Siège.

Émile Combes dépose le projet en novembre 1904.
Mais le scandale de l’affaire des fiches le force à démissionner.
Affaire des fiches : dans le gouvernement d’Émile Combes, le général André (ministre de la guerre) veut favoriser la carrière des officiers républicains.
Il se renseigne sur leurs opinions et met en place un système de fiches fondé sur la délation, pour favoriser les républicains au détriment des catholiques.

Le projet de loi est donc défendu par Aristide Briand.
La loi est votée le 9 décembre 1905.
Elle consacre une rupture unilatérale avec le Concordat de 1901.
Ce qui change par rapport au Concordat :

  • La loi reconnaît la liberté de culte et de conscience.
    → interrompre ou empêcher un culte est un délit
  • Les membres du clergé ne sont plus salariés de l’État.
    L’administration du culte est confiée aux associations cultuelles (= associations qui regroupent les fidèles et qui doivent être constituées dans un délai d’1 an).
  • Les bâtiments du culte qui appartiennent à l’État sont laissés à la disposition de ces associations.
  • Chaque paroisse a l’obligation de faire un inventaire des biens contenus dans chaque église.
    Les biens appartenant à l’État lui sont rendus.
  • Il est désormais interdit d’apposer des symboles religieux sur des bâtiments publics.

Cette loi est condamnée par le pape, qui craint une contagion de l’exemple français.
Il appelle les fidèles à résister.

Les inventaires donnent lieu à des affrontements.
Le gouvernement fait intervenir l’armée.

Des mesures sont prises pour calmer les esprits : l’État reconnaît aux prêtres résistants le droit d’occuper les églises pour y célébrer le culte.
La loi de 1905 n’est donc pas appliquée immédiatement partout en France.
Il faudra attendre la Première Guerre mondiale, qui réconcilie les républicains et les catholiques.

Section 2 : Le contrôle de l’opposition et la surveillance des mœurs

Pendant longtemps, les gouvernements se sont emparés de techniques pour contrôler l’opposition en place.

§ 1. Le contrôle de l’opposition : la police politique

La police politique consiste en un contrôle par l’administration des ennemis du régime, réels ou supposés.
C’est généralement un attribut des régimes totalitaires.

On voit un régime autoritaire pendant la Révolution, en 1793 et 1794 (Terreur).
Les comités avaient créé une catégorie politique pour poursuivre leurs ennemis politiques : les ennemis de la patrie / de la Révolution.
Ceux-ci étaient jugés sommairement par un tribunal extraordinaire pour mis à mort.

Sous Napoléon, une autre forme de police existe : le préfet, qui représente l’État au niveau du département.
Conçu comme un instrument de contrôle sur le plan politique.
Son rôle est de surveiller les monarchistes et autres mouvements politiques pour repérer les personnes potentiellement hostiles.

A – Sous le 2nd Empire

Comme sous le 1er Empire, le préfet est le rouage essentiel du contrôle de l’opposition politique.
> intervient pendant les campagnes électorales
> coordonne la propagande bonapartiste
> fait souvent fermer des lieux où l’opposition se réunit
> donne des consignes précises aux fonctionnaires locaux (ex : maires, qui ne sont pas élus mais nommés par le gouvernement)

Le préfet se sert aussi de ses pouvoirs pour apporter des dons à certaines communes.
Les maires surveillent les électeurs.
Le candidat officiel dispose de privilèges (obj : indiquer aux électeurs quel est le candidat officiel et créer une confusion entre leur programme et les actions du gouvernement).

En février 1852, une circulaire crée les commissions mixtes, juridiction d’exception (= étrangère à l’ordre judiciaire).
1 par département.
Composée du préfet (qui représente l’empereur), du procureur général et de l’officier supérieur qui commande les troupes dans le département (force armée).
→ aucun magistrat du siège
→ pas de garantie du respect des libertés fondamentales

La procédure devant les commissions est expéditive et secrète.
La garantie des droits de la défense n’est pas assurée.
La motivation des arrêts est confuse.
Il y a violation de la non-rétroactivité de la loi pénale.

Ces commissions créent de toutes pièces des infractions.
Objectif : se débarrasser des ennemis politiques de Napoléon 3.
En quelques semaines, elles prononcent 25 000 condamnations (très efficaces).

Il n’y a pas d’épuration de la magistrature : seulement une dizaine de magistrats sont révoqués.
2 000 avocats sont rayés de l’ordre du barreau pour leurs opinions politiques.
Les magistrats soutiennent le régime.
L’administration est un instrument de contrôle du régime sur le pays.
Les fonctionnaires qui assurent ce contrôle ont des avantages.

Les établissements d’enseignement (surtout des écoles dirigées par des congrégations religieuses, mais aussi des universités publiques) vont être placés sous la surveillance du ministre de l’instruction publique.
Dans les universités, plusieurs enseignants sont révoqués.
Le gouvernement interdit certains cours (ex : droit constitutionnel).
L’agrégation d’histoire et de philosophie sont supprimées.

Les opposants sont décimés par les arrestations.

En janvier 1858, Napoléon 3 est victime d’une tentative d’assassinat par le révolutionnaire italien Orsini, critique à la politique italienne menée par l’empereur.
Il fait adopter la loi de sûreté générale, qui vise à maintenir l’ordre public en France d’une manière sévère et autoritaire.
Le ministre de l’Intérieur a le droit de faire déporter ou interner toute personne ayant subi une condamnation politique depuis 1848.
→ de nombreux opposants politiques vont s’exiler en Belgique ou en Angleterre

B – Sous la 3e République

La 3e République s’attaque rapidement à la question de l’enseignement.
Les républicains craignent que des idées contraires à la nouvelle république se diffusent dans les écoles catholiques → décrets mars 1880 : expulsion des congrégations.

En août 1883, le gouvernement opère une épuration de la magistrature.
→ inamovibilité des magistrats annulée
Technique utilisée : suppression de postes (600 postes supprimés).
Le gouvernement en profite pour se débarrasser des anciens membres des commissions mixtes de 1852.

Sous le Front populaire, des mesures sont prises contre les ligues (antiparlementaires et nationalistes).
18 juin 1936 : décret pris par le gouvernement pour dissoudre ces mouvements :
> Croix-de-Feu (favorable à un gouvernement fort ; partisans du corporatisme)
> Jeunesses patriotes (organisation paramilitaire républicaine)
> Parti franciste
> Solidarité française (aussi fasciste)
> L’Action française

§ 2. La police des mœurs

A – L’alcoolisme

Au début du 20ème siècle, on considère qu’il est normal d’entrer dans la vie privée des français.
Les gouvernements considèrent que l’ordre public passe par le contrôle des mœurs et la répression de la débauche.

1851 : décret pris pour soumettre l’ouverture des cabarets, cafés et débits de boisson à l’autorisation de l’administration.
> le préfet est autorisé à fermer les établissements déjà ouverts s’il considère qu’ils sont un danger pour la sûreté publique
> les maires peuvent fixer leurs horaires d’ouverture et de fermeture

Parce que l’alcoolisme devenait alors un danger récurrent pour la société française.
Augmentation alarmante de la consommation : entre 1830 et 1900, la consommation moyenne par adulte passe de 15 à 35L/an.
Répercussions pathologiques : les diagnostics d’aliénation mentale causés par l’alcool sont multipliés par 3.

La consommation d’alcool est concomitante au développement de l’industrie et l’apparition de la classe ouvrière, très touchée par l’alcoolisme.

Les alcools particulièrement dangereux et responsables de maladies tels que l’absinthe sont interdits en 1915.

B – La prostitution

Sous l’Ancien Régime, la prostitution est en principe interdite, mais est tolérée en pratique.

À partir de la Révolution française, la prostitution relève de la liberté individuelle et n’est pas interdite.
Mais on considère que cette pratique doit être surveillée.
Question sanitaire : transmission de maladies telles que la syphilis (maladie grave qui se traduit par l’apparition de lésions internes ou externes ; guérison uniquement par médicaments extrêmement dangereux).

Les prostituées sont surveillées et fichées par la préfecture.
Elles ne peuvent être radiées du fichier que si elles apportent la preuve qu’elles ont cessé leur activité (par exemple en montrant qu’elles ont obtenu un emploi).

Les prostituées qui exercent leur activité dans des maisons closes ont l’obligation de se faire visiter par un médecin au moins 1 fois tous les 15 jours.
→ contrôle a priori : fichier
→ contrôle a posteriori : visite médicale tous les 15 jours

C – Les malades mentaux

Les aliénés sont contrôlés par l’administration, qui dispose d’un pouvoir discrétionnaire sur la liberté des aliénés (elle peut décider à tout moment de les enfermer).

La loi de 1838 impose à chaque département de disposer d’un établissement public destiné à recevoir et soigner les aliénés.
On distingue 2 catégories :

  1. Le placement volontaire : demande d’au moins 1 membre de la famille ; passage devant un tribunal ; le juge décide → prend une procédure d’interdiction.
  1. Le placement d’office : le préfet peut ordonner le placement de toute personne (ayant fait l’objet d’une procédure d’interdiction ou non) lorsque son état compromet l’ordre public.
    Un certificat médical est nécessaire, mais il peut être fourni après l’internement.
    C’est le préfet qui se prononce sur la sortie de la personne concernée.
    Il se fonde sur un rapport médical, rendu 1 fois par semestre.
    Aucun contrôle du juge judiciaire.

Les préfets utilisent l’internement d’office pour faire enfermer des opposants politiques.

Chapitre 2 : La vie politique encadrée par les partis

La vie politique française repose sur un clivage droite/gauche qui existe depuis la Révolution française. Les partis se déplacent régulièrement sur l’échiquier politique.

Section 1 : Les grands courants politiques du 19e siècle

§ 1. Le monarchisme et le bonapartisme

A – Le monarchisme traditionnel

Le monarchisme traditionnel fait l’éloge de la tradition, qu’il considère comme le fondement de la légitimité politique.
Idée : le régime fonctionne parce qu’il est fondé sur une base qui a été affinée avec le temps.

Après la Révolution française, les monarchistes traditionnels demandent le rétablissement de la situation antérieure.
Idée : les révolutionnaires ont brisé la chaîne de la tradition.
Ils sont appelés « contre-révolutionnaires ».

Ils se rallient progressivement au régime napoléonien.
Sous la Restauration, ils considèrent que le régime est trop conciliant avec les révolutionnaires. Ils sont appelés les « ultra » et sont critiques de la politique de Louis 18.
Sous la monarchie de Juillet, on ne parle plus d' »ultra » mais de « légitimistes », puisque pour eux seule la branche de Charles 10 est légitime pour occuper le trône.
Ils partagent la majorité au sein de l’Assemblée.

B – Le monarchisme constitutionnel

La Constitution du 3 septembre 1791 institue une monarchie constitutionnelle.
Pour la 1ère fois : séparation des pouvoirs. On sépare l’exécutif et le législatif.
L’exécutif est confié au chef de l’État Louis 16.

De 1814 à 1848 (1ère et 2nde Restauration), la France connaît une 2ème expérience de monarchie constitutionnelle.
Louis 16 est hésitant.
Louis 18, plus habile que Louis 16, réussit à maintenir un équilibre entre l’expression de son autorité et le fonctionnement des institutions.
Louis-Phillipe est habile également mais s’est parfois montré autoritaire.

Le libéralisme politique suppose l’existence de pouvoirs constitutionnels qui sont distincts du roi.
Louis 18 a dû intégrer dans son mode de gouvernement les principes libéraux (c’est donc une restauration incomplète).
Le roi continue à nommer les ministres (Charte de 1814). Il suit le courant dominant du moment mais se réserve la possibilité de favoriser telle ou telle personne en fonction de ses goûts personnels.
Le roi sert aussi d’arbitre entre les différents mouvements politiques.
Il fait pression sur le pouvoir législatif en s’appuyant sur l’opinion publique et en exerçant son droit de veto.
Il peut dissoudre la Chambre des députés.

Le roi doit se manifester suffisamment pour que ses pouvoirs ne disparaissent pas, mais il ne faut pas qu’il s’engage trop dans des causes risquées.
→ le roi doit trouver cet équilibre
→ Louis 18 a réussi, mais pas Charles 10 ni Louis-Phillipe

Le monarchisme constitutionnel n’est pas très populaire.
Seul 1 seul roi a réussi, et le suffrage est très restreint (100 000 à 200 000 personnes).
Les parlementaires sont choisis dans un groupe social très fermé.
La politique étrangère française est terne car très (trop ?) prudente.
Exemple : en 1791, on reproche à Louis 16 de s’être trop rapproché des puissances étrangères hostiles à la Révolution. Louis 18 est mis au pouvoir par des puissances étrangères.

C – Le bonapartisme

De 1799 à 1814, puis au milieu du 19ème siècle.
Compromis entre la monarchie et les principes démocratiques.

Bonaparte prend le titre d’empereur (→ conçu sur un mode héréditaire).
Il est sacré le 2 décembre 1804 (→ entoure le titre d’empereur d’une dimension religieuse).

Dès son arrivée au pouvoir, Napoléon se réclame de la souveraineté nationale / de la volonté du peuple, car il va souvent consulter le peuple par plébiscite.
→ une légitimité tirée de l’Ancien Régime
→ une légitimité empruntée à la Révolution

Dans la réalité, le régime bonapartiste est dans un 1er temps militariste, avec comme volonté d’imposer une autorité commune à toute l’Europe en créant un empire européen.

À partir de 1812, les ambitions européennes de Napoléon sont revues à la baisse.
Il revient aux idées initiales : les idéaux de la Révolution, liberté définie par les révolutionnaires.
On s’éloigne alors du monarchisme pour se rapprocher encore plus du césarisme (régime dans lequel l’essentiel des pouvoirs est exercé par un personnage unique qui tire sa légitimité de l’appui du peuple lui-même).

Napoléon III prend le pouvoir par coup d’État le 2 décembre 1851.
Il ne suit pas le même bonapartisme.
Points communs :
> on maintient le schéma césarien
> on s’appuie sur l’organisation administrative (figure du préfet qui permet de contrôler l’opinion publique dans les départements)
> multiplication des assemblées et recours fréquent au plébiscite

Mais grande différence : Napoléon III promeut la paix.
Lors du Pacte de Bordeaux en 1852, il promet que l’Empire sera pacifique. « L’Empire, c’est la paix ! »
Mais il trahit cette promesse, en menant des expéditions militaires en Italie, au Mexique et contre la Prusse, perdant ainsi le soutien des catholiques.

La perte de ses soutiens force Napoléon III à faire des réformes en faveur du pouvoir législatif. Il est aidé par ses idées personnelles (sympathie aux idées socialistes).
Il prend des mesures en faveur des travailleurs, en autorisant notamment certains travailleurs à contacter les syndicalistes anglais.
En 1864, il dépénalise la grève.

Le bonapartisme s’est ensuite surtout manifesté dans la défense du suffrage universel.
Pendant la crise du boulangisme, les bonapartistes se rallient au général Boulanger.
Le courant disparaît ensuite progressivement.

Le régime impérial est plutôt considéré avec faveur par les élites politiques, mais le peuple n’a pas été impressionné (surtout par le Second Empire).
Victor Hugo critiquait Napoléon III : « Napoléon le petit ».

§ 2. Les libéralismes

Ce sont des mouvements multiformes. Le libéralisme politique ne doit pas être confondu avec le libéralisme économique.

Le libéralisme prend son essor à partir de la Révolution française.
Il passe d’abord par une phase idéologique : il se manifeste dans la DDHC.
Il est mis à mal par le bonapartisme, qui y sera sensible pendant les Cent-Jours.
Il s’exerce aussi pendant la Restauration, récupéré par l’orléanisme.
À la fin du 19ème siècle, il est récupéré par le radicalisme.

Le libéralisme s’exerce surtout sur l’économie.
Idée : ce qui fonde le pouvoir, c’est avant tout la propriété terrienne.
Individualisme + liberté du commerce.

Les libéraux interdisent le corporatisme (associations fondées sur le métier) et pénalisent la grève.

Pendant la 3ème République, les libéraux connaissent des difficultés parce qu’ils ont désormais acquis le pouvoir et que, si le libéralisme fonctionne bien comme moyen d’opposition, des contradictions apparaissent entre les principes affichés et les exigences du maintien de l’ordre public et du respect des lois de la République.
Ils sont obligés de se compromettre et d’entrer en contradiction avec leurs idéaux.
Ils mènent une politique défavorable aux libertés publiques, en décalage complet avec les problèmes sociaux posés à la fin du 19ème / début 20ème siècle.

Le libéralisme de gouvernement est donc fortement critiqué et s’adapte.
Le néolibéralisme essaie de tenir compte des critiques et réalités politiques. Il essaie de traiter :
> l’exercice effectif des droits par les catégories sociales défavorisées
> les inégalités sociales

§ 4. Le nationalisme jusqu’à la 3ème République

Le nationalisme est un mouvement qui, à l’origine, correspond aux doctrines de gauche.
Elle devient une idéologie de droite pendant la 3ème République.

Le nationalisme prend ses origines à la Révolution. On parle alors de « patriotisme ».
Les patriotes sont des révolutionnaires. Ils utilisent le thème de la patrie en danger pour mobiliser.

Ils ont une volonté d’unité nationale : « la République une et indivisible ».
Ils veulent également une unité administrative, avec les circonscriptions (communes et départements, créés pour rompre avec les provinces de l’Ancien Régime).

Ils promeuvent également une centralisation, dans la prolongation de la politique suivie par la monarchie de l’Ancien Régime.
À partir de 1792, le jacobinisme (un mouvement révolutionnaire) met en place une centralisation très forte.
Au début, on veut des élections à chaque niveau de l’administration, mais à partir de 1793 la centralisation est beaucoup plus autoritaire, avec des comités mis en place par la Convention.

Napoléon poursuit cette politique en créant les préfets, qui sont des relais locaux de l’autorité centrale.

Le nationalisme a une vocation universaliste. Ses valeurs doivent s’exporter dans les autres pays.
→ les révolutionnaires engagent des conflits contre des pays étrangers
République conquérante, initiée par les jacobins
⇒ fort sentiment anti-français à l’étranger, notamment en Allemagne, ce qui provoque par réaction l’apparition du nationalisme allemand, et inspire aussi des promoteurs de l’unité italienne.

Le nationalisme est opposé à la monarchie et à l’Ancien Régime, et à l’aristocratie cosmopolite.
→ phénomène de l’émigration

Le patriotisme reste un mouvement de gauche.
Sous le 2nd Empire, les républicains se montrent réservés face aux opérations militaires menées par Napoléon III.
Les nationalistes sont pour l’unité italienne mais contre l’expédition mexicaine.

1870-1871 : dernier moment où la gauche se montrera nettement nationaliste : Gambetta et les républicains font campagne pour reprendre la guerre contre la Prusse.
À l’inverse, la droite monarchiste est pacifiste et veut la signature d’un traité de paix.

Section 2 : La naissance et l’évolution des partis politiques à partir de la 3e République

Les partis sont conçus comme des instruments de conquête du pouvoir.
Ils naissent des années 1880 au début du 20ème siècle.

§ 1. La naissance des partis politiques

A – Les courants politiques à la fin du 19ème siècle : le poids du passé

Avant la naissance des partis : principe de la totale liberté des députés.
Mais les députés qui ont les mêmes idées vont se concerter et établir des conduites communes. Ils forment des groupes informels dans lesquels la participation est libre.
Ils se répartissent entre la droite et la gauche.

1) La droite

À la fin du 19ème siècle, la droite est composée de quelques bonapartistes, de monarchistes, + apparition des nationalistes (auparavant à gauche).

  1. Les bonapartistes disparaissent rapidement à la fin du 19ème siècle, mais participent à la crise boulangiste.
  1. Les monarchistes sont désormais républicains et se répartissent entre :
    1. les légitimistes, fervent catholiques qui veulent intervenir dans le domaine social ; promoteurs du « catholicisme social », mouvement ouvert aux ouvriers qui vise l’amélioration de leurs conditions de travail, ils fondent des cercles catholiques ouvriers.
    1. les orléanistes, qui condamnent toute intervention de l’Église dans la sphère publique ; tournés vers le monde des affaires, ils sont favorables au protectionnisme ; en matière sociale, ils sont indifférents.
  1. Les nationalistes : sous la 3ème République, beaucoup d’hommes de gauche restent très attachés à l’idée de « grandeur nationale » et de défense de la patrie.
    Dans les années 1880, le mouvement nationaliste devient essentiellement de droite. Beaucoup de français veulent prendre leur revanche (« revanchards ») et sont déçus par le nouveau régime, jugé faible et lâche.
    Cristallisation d’une idéologie nationaliste hétérogène, républicain et monarchiste :

     

    1. Militariste : pour eux, l’armée est le symbole de la grandeur de la France et de son unité, par opposition aux parlementaires ;
    1. Clérical : idée que les positions de l’Église doivent jouer un rôle dans la vie publique (→ crée des tensions avec les républicains) ;
    1. Antiparlementariste : pour eux, on se rapproche du régime d’assemblée, c’est-à-dire un régime dans lequel il y a une confusion des pouvoirs au profit d’une assemblée. Ils assimilent ce parlementarisme au régime de la Convention (1792-1795).
      Ils critiquent aussi l’absence de véritable chef.

2) La gauche

La gauche est partagée entre les mouvements qui arrivent au pouvoir et les mouvements plus marginaux.
Il y a 5 mouvements principaux, dont 3 arrivent au pouvoir.

  1. Les opportunistes, qui représentent la petite et moyenne bourgeoisie et une partie de la classe ouvrière. Ils rejettent la monarchie et le pouvoir personnel, et ils sont anticléricaux.
    Héritiers des révolutionnaires, favorables aux libertés publiques mais opposés au suffrage universel, par peur d’une régime de type napoléonien.
    Membres notables : Jules Ferry, Gambetta.
  1. Les radicaux apparaissent sous le Second Empire.
    Ce sont des républicains qui profitent des nouvelles libertés pour s’opposer frontalement à Napoléon III.
    En 1869, ils présentent le programme de Belleville.
    Ils proposent des réformes radicales :
    > séparation des Églises et de l’État
    > régime républicain d’assemblée unique
    > impôt sur le revenu
    Ils s’intitulent eux-mêmes radicaux. Ils sont attachés à la démocratie. Ils constituent des comités électoraux (se fédèrent au niveau départemental), avec une solidarité entre eux.
    Ils refusent le compromis avec les conservateurs et représentent l’extrême-gauche.
    Ils s’intéressent plus aux problèmes économiques et sociaux qu’aux problèmes politiques.
    Ils n’adhèrent pas à l’idée de lutte des classes ; ils sont partisans d’un État fort et dirigiste sur le plan économique.
    Contrairement aux opportunistes, les radicaux sont défavorables à la colonisation.
  1. Les socialistes s’expriment de manière forte pendant la Commune de Paris. Les élus socialistes seront ensuite condamnés. Il faudra ensuite attendre la fin du 19ème siècle pour voir des députés socialistes à la Chambre.
    Il y a plusieurs types de socialisme.
    Les socialistes sont révolutionnaires (contrairement aux radicaux). Les échéances électorales ont donc à leurs yeux moins d’importance : ils considèrent que la réforme de l’État doit passer par la Révolution.
  1. Les communistes ne veulent pas se plier aux règles de la démocratie représentative, qu’ils voient comme gangrenée par la domination bourgeoise.
    Ils considèrent que les partis de gauche sont plus dangereux que les partis de droite.
  1. Les anarchistes n’ont pas de doctrine construite. Ils sont réfractaires à tout type de contrainte (politique, morale, économique) et prônent la liberté absolue (→ « libertaires »).
    Ils sont partisans du terrorisme et assassinent plusieurs personnalités politiques françaises et étrangères.
    Ils se rapprochent ensuite des syndicats et prônent la grève générale comme moyen d’action.

3) Les alliances de circonstance

Ces différents mouvements vont parfois s’allier entre eux dans certaines circonstances, lorsqu’ils ont un objectif commun.

a) L’alliance comme moyen d’opposition politique : l’Union libérale

Les élections de 1863 marquent un tournant dans la vie politique : des mouvements qui n’ont rien à voir se retrouvent ensemble dans l’opposition face à Napoléon III.

Les démocrates libéraux et la droite monarchiste font une alliance : l’Union libérale.
Objectif : battre les candidats de la majorité.

L’Union n’obtient pas la majorité mais remporte une victoire, car les députés de l’opposition sont 3 fois plus nombreux qu’avant.
Les voix de l’opposition sont désormais entendues publiquement car les comptes-rendus sont publiés dans le Moniteur (équivalent du JO actuel).
Exemple : discours d’Adolphe Thiers sur les libertés nécessaires (1- de l’individu, 2- de la presse, 3- des élections, 4- du corps législatif).


b) L’alliance en vue de l’insurrection : la Commune

La Commune de Paris est une insurrection qui éclate le 18 mars 1871.

Au Moyen-Âge, « commune » désigne un mouvement insurrectionnel des villes contre le pouvoir seigneurial. Les communes obtiennent des droits et devoirs pouvant aller jusqu’à l’indépendance.

La Garde nationale de Paris est une institution révolutionnaire qui date de 1789.
Elle se veut être une manifestation de la souveraineté nationale : c’est une milice composée de citoyens.
Dans chaque département, une Garde nationale est constituée.
En 1870 (guerre contre la Prusse), elle est mobilisée pour défendre Paris.
Lorsque l’armistice est conclu, la Garde nationale, favorable à la République, refuse d’accepter la fin des combats.

Les gardes nationaux décident de se doter de leurs propres institutions pour poursuivre la défense de la capitale. Le 10 mars 1871, ils adoptent les statuts et forment un comité central.
Ce comité dirige la ville de Paris et représente l’opposition à l’autorité de l’Assemblée constituante.

L’armée tente de récupérer les canons de la garde nationale, sans succès.
Jules Ferry, maire de Paris, conseille la négociation. Adolphe Thiers refuse, évacue les troupes de Paris pour reconquérir la ville quartier par quartier.

Une coalition se met en place au cœur de la commune.
Le comité central organise des élections pour l’assemblée législative qui serait l’organe législatif de Paris.
Dans l’Assemblée communale (qui se considère comme le gouvernement légal de Paris mais aussi du pays entier), alliance des mouvements de gauche : jacobins + blanquistes + communistes + socialistes.

Dans un 1er temps, adoption de mesures économiques, politiques et sociales.
Mesures politiques symboliques : drapeau rouge, retour au calendrier révolutionnaire.
Sur le plan économique : tentative de remettre en marche les usines abandonnées de Paris.
Sur le plan social : suppression des retenues sur salaire, abolition du travail de nuit.

L’alliance s’affaiblit. Opposition entre la majorité blanquiste et la minorité socialiste.
Les commissions qui doivent mettre en place les décisions de l’Assemblée se révèlent inefficaces. Les blanquistes veulent donc mettre en place un Comité de salut public.
Les socialistes préfèrent une fédération de communes et accusent les blanquistes et les jacobins d’organiser une dictature. Ils quittent l’Assemblée.

La Commune est réprimée par l’armée en quelques mois.
Après la Commune, les républicains évoluent vers le conservatisme, ce qui permet le ralliement des conservateurs et des monarchistes.
En 1871, la République, ce n’est pas la Révolution, c’est l’ordre public.


c) L’alliance en vue du coup d’État : le boulangisme

Si Boulanger était en capacité de prendre le pouvoir, c’est parce qu’il y avait derrière lui un mouvement puissant, composé des revanchards + certains monarchistes + bonapartistes + radicaux (→ alliance extrême-gauche / extrême-droite).

B – La création et l’institutionnalisation des partis depuis 1901

La loi de 1901 sur les associations permet aux différents partis politiques de se constituer formellement.
Loi Waldeck-Rousseau (président du Conseil) : loi anticléricale.
Permet aux associations de se former sans autorisation du gouvernement, sauf congrégations religieuses.

L’Action libérale populaire est un parti de droite, composé d’anciens monarchistes ralliés à la République.
À son apogée, il compte plus de 70 députés de la Chambre, 250 000 adhérents et 2 500 comités en France → c’est le plus important parti politique de droite.

Il est mis en sommeil pendant la Première Guerre mondiale (députés de droite dans l’union sacrée).
Après la guerre, il ne reste plus que les cadres, mais ils ont toujours une influence.

Le parti intègre la coalition de droite Bloc national, avec :
> l’Alliance démocratique, principale formation de centre gauche qui deviendra progressivement de droite
> la Fédération républicaine, créé en novembre 1903 : aile droite des républicains modérés (opportunistes) ; subsiste jusqu’en 1948


Les radicaux s’organisent sous la forme de comités électoraux au niveau départemental en 1895.
En 1898, ils fondent le Comité d’action pour les réformes républicaines, qui réunit toutes les fédérations radicales au niveau national.
Il fonde son existence sur le système électoral (on ne parle pas encore de partis).

Devient un parti après la victoire des radicaux dans la chambre des députés.
En 1901, Parti républicain, radical et radical-socialiste.
C’est le parti politique le plus ancien en France.


Le parti socialiste s’appelle au départ le SFIO.
Il est constitué en 1905 de la fusion du Parti socialiste de France (mouvement marxiste hostile à toute participation – même à un mouvement de gauche – si le gouvernement est bourgeois) et du Parti socialiste français (parti mené par Jean Jaurès, plus modéré, qui prône la réforme).

En 1911, les socialistes les plus modérés fondent le Parti républicain socialiste.

Le programme du SFIO est marxiste, même si dans un 1er temps c’est Jean Jaurès (modéré, assassiné en juillet 1914) qui domine.


Le parti communiste est situé dans la dépendance du bolchévisme russe.
Le PCF apparaît en 1920.

Après la révolution d’octobre 1917 en Russie, Lénine crée une nouvelle internationale qui réunit les différents pays marxistes des pays européens.
En 1920, le SFIO se réunit à Tours et le congrès constitue le Parti communiste français.
La majorité de la SFIO y adhèrent ; ils conservent les locaux et le journal.

Le PCF est en totale soumission à Moscou.
Maurice Thorez, dans les années 1950, se vantait d’être “le premier des staliniens”.

Cela engendre une nouvelle division à gauche, entre le PCF et les socialistes, qui veulent restent indépendants de Moscou et qui entrent de manière massive dans la Chambre des députés (ex : Front populaire de 1936).

§ 2. L’évolution des partis

Juste après leur naissance, les partis sont incapables de former des majorités au sein de la Chambre des députés.
Ils constituent des alliances, notamment sous la 3ème République. Ces alliances ne permettent pas de gouverner le pays de manière homogène.

Seuls certains partis vont sortir du lot et seront suffisamment puissants pour remporter à eux seuls des élections législatives.

A – Les coalitions de partis, solutions politiques éphémères

1) La 1ère grande coalition : l’Union sacrée

L’Union sacrée naît au déclenchement de la 1ère Guerre mondiale.
C’est une expression employée par le PR Raymond Poincaré dans son message au Parlement : il appelle à “une union sacrée entre tous les fils de la France”.

Cette union se forme pour répondre à une crise.
En août 1914, Viviani (président du Conseil) fait entrer dans son cabinet des socialistes et des représentants de l’extrême droite.
→ toutes les tendances politiques sont représentées au gouvernement

L’Union sacrée tient jusqu’en avril 1916, quand elle est dénoncée par les socialistes et syndicalistes.
Aristide Briand procède un remaniement → départ des socialistes.

2) Le Bloc national

Le Bloc national est créé pour remporter les élections, dans le contexte difficile de la sortie de la guerre.
Au sein de la gauche, il y a des tensions entre socialistes et radicaux.
Les socialistes mènent une manifestation de 100 000 personnes à Paris.

Lois votées : durée de la journée de travail, conventions collectives.
Nombreuses grèves à Paris et en province en 1919.
→ peur de la montée des idées bolchéviques

Les partis de droite jouent sur cette peur et développement un mouvement mené par Alexandre Millerand : Bloc national, coalition fondée pour remporter les élections législatives de 1919.

Libéralisme économique.
Favorable à un aménagement de la laïcité.
Renoue des relations avec le pape (la guerre a fait disparaître les tensions entre républicains et catholiques) → détente des relations entre l’État français et le Saint-Siège.

En 1920, Alexandre Millerand devient PR.
Il remet en cause la Constitution Grévy : il veut + de pouvoir.
Il intervient activement dans la conduite des affaires étrangères.

3) Le cartel des gauches

Les radicaux et socialistes, inquiets par Millerand, forment le cartel des gauches.
Ils remportent les élections de 1924.

Édouard Herriot devient président du Conseil.
Il forme un ministère composé de radicaux et de socialistes (les communistes sont exclus).

Mais il n’y a pas de programme commun entre les 2 formations.
Des conflits émergent sur la politique coloniale et la politique financière.
Contexte : difficultés financières → l’occupation de la Ruhr coûtent cher ; les épargnants, par crainte, retirent leurs économies.
L’État émet des bons du Trésor (prêt qu’un particulier consent à l’État).
Herriot contraint la Banque de France à augmenter la circulation monétaire → forte inflation.

La majorité du cartel des gauches prend rapidement fin.

4) L’Union nationale

L’Union nationale se forme pour les élections de 1926.
Permet à la droite d’être au pouvoir de 1926 à 1932.

C’est la 1ère fois qu’une coalition politique réussit à se maintenir, mais l’instabilité ministérielle continue.

L’Union nationale met en œuvre la relance économique.
L’État crée une caisse d’amortissement pour résorber la dette publique.

5) Le Front populaire

Jusqu’en 1932, aucune coalition rassemblant toute la gauche n’était possible, en raison de l’exclusion des communistes.
En 1933, Hitler arrive au pouvoir en Allemagne et les communistes se rapprochent des socialistes et radicaux.

Le Rassemblement populaire est créé en 1933.
En janvier 1936, il publie son programme “Pain, paix, liberté”.

  • Pain : améliorer le pouvoir d’achat par la mise en place d’un fond national de chômage.
    + office national des céréales pour lutter contre la spéculation
    + augmentation des retraites
    + politique de travaux publics pour relancer l’économie
  • Paix : nationalisation des industries de guerre.
    + collaboration internationale pour éviter la guerre
  • Liberté : augmentation des droits des syndicats
    + dissolution des ligues (extrême droite)

Aux élections de mai 1936, le Rassemblement populaire remporte une majorité importante (SFIO 149 sièges, communistes 72) → devient le Front populaire.
Léon Blum est appelé à la présidence du Conseil.

Le Front populaire dirige le pays, mais en 1937 Blum annonce une pause dans le programme social (réforme des retraites) et perd ainsi le soutien de certains socialistes.
Les congés payés, la semaine de 40h, etc. sont des mesures lourdes à assumer.
Blum se retrouve pris entre le patronat mécontent et l’extrême gauche qui trouve qu’il ne va pas assez vite.

Cette double opposition fait que le gouvernement de Léon Blum ne va pas tenir.
En 1937, son ministre des finances demande les pleins pouvoirs financiers.
La Chambre des députés les lui accorde, mais le Sénat dominé par les radicaux refuse.
→ le gouvernement est paralysé
→ Léon Blum démissionne le 22 juin 1937

B – Le destin des partis jusqu’au milieu du 20e siècle

1) Le classement des partis : le caractère relatif de la distinction gauche-droite

La distinction entre gauche et droite correspond à l’endroit où on s’asseyait dans l’hémicycle au moment de la Révolution française.

La droite serait attachée à la défense d’intérêts particuliers, à la réaction et à la conservation.
La gauche serait attachée à une forme de progrès, une vision plus collective et généreuse.
Mais cette distinction repose sur des mythes ; ex : le nationalisme est un mouvement né à gauche, aujourd’hui de droite.

Lorsqu’un parti gouverne, il est progressivement poussé vers le centre.
En 1789, la droite correspond aux monarchistes. En 1792, ils ont disparu ; la droite correspond aux girondins.

Les partis de droite et d’extrême droite d’une époque donnée ont tendance à disparaître ; ils sont remplacés par des partis plus modérés.
→ les partis se déplacent sur l’échiquier politique

2) Aperçu de l’évolution des principaux partis politiques

L’Action française est une ligue constituée par Charles Maurras.
Elle est nationaliste et monarchiste.
Elle considère que la Révolution a favorisé l’anarchie et l’individualisme.
C’est une adversaire de la République.
Elle s’attaque à l’Allemagne.
Elle est hostile au capitalisme et partisan du corporatisme – se méfie de l’industrie.

En 1926, le pape condamne l’Action française et interdit aux catholiques de lire les publications de Charles Maurras sous peine d’excommunication (raison morale : utilisation de la violence + raison politique : le pape cherchait à réconcilier la France et l’Allemagne).

Les Croix-de-Feu est une ligue fondée en 1927.
Elle est plus modérée que l’AF.
Elle réunit des vétérans de la guerre.

1933 : création du Parti franciste, fondé par Michel Bucard.
Subventionné par Mussolini et calqué sur le modèle fasciste italien.

La Solidarité française est une ligue qui veut restaurer un pouvoir fort.
Elle met en avant la figure du chef qui doit diriger la France.

Le Parti populaire français est créé par Jacques Doriot (à l’origine communiste).
Il évolue vers le nationalisme et se ralliera au gouvernement de Pétain.

Ces partis d’extrême droite n’ont jamais vraiment réussi à intégrer le gouvernement, mais ne le veulent pas réellement → ils sont contre le parlementarisme.


Le général de Gaulle rassemble un mouvement après la Seconde Guerre mondiale.
Il organise le RPF (Rassemblement du peuple français) en 1947.
Objectif : s’entendre pour défendre la France et la République dans le contexte de la guerre froide.

Le RPF devient un parti comme les autres.
Il remporte un grand triomphe à partir de 1948, quand il rassemble 31% des voix (plus que le Parti communiste).

En 1958, De Gaulle revient (nouvelle Constitution) et forme un nouveau parti, l’Union pour la nouvelle République.
Au départ, favorable à l’Algérie française, puis en 1962 favorable à l’indépendance de l’Algérie.

En 1967, le mouvement change de nom pour l’Union des démocrates pour la 5e République, puis l’Union des démocrates républicains (UDR).
L’UDR est confrontée à mai 1968. Le général quitte le pouvoir en 1969 et le parti se fédère autour de Georges Pompidou.

On distingue ensuite :
> le RPR (suite de l’UDR), qui se réunit autour de Jacques Chirac ; et
> l’UDF, qui devient le Modem actuel (autour de Valéry Giscard d’Estaing).


Le Parti radical est le plus grand mouvement politique jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.
À partir des années 1940, son déclin commence.
La majorité des radicaux se rapprochent des socialistes et les radicaux du centre sont absorbés dans l’UDF.

Le SFIO obtient certaines mesures, comme la sécurité sociale ou des nationalisations.
Il est en perte de vitesse à partir des années 1940.
Il devient le Parti socialiste en 1969 et est restructuré en 1971 par François Mitterrand, qui signe un programme commun d’union de la gauche qui permet son élection en 1981.

Les communistes entrent au gouvernement grâce au Front populaire mais n’entrent sur le devant de la scène qu’après la Seconde Guerre mondiale grâce à leur participation dans la résistance.

Après la guerre, ils obtiennent de grands succès aux élections et sont le 1er parti de France en 1945.
Ils prônent la reconstruction industrielle de la France et une intervention accrue de l’État.
Ils se rapprochent ensuite des socialistes.

Chapitre 1 : Pouvoir personnel et parlementarisme (1799-1958)

1789 → 1799 : Révolution française
⇒ 10 années qui séparent l’Ancien Régime de la période napoléonienne
⇒ Bouleversements profonds dans la société française
⇒ Période d’intense réflexion sur le fonctionnement de l’État

9 novembre 1799 : coup d’état par Napoléon Bonaparte
⇒ Installe un nouveau régime, le Consulat, qui repose sur l’autorité de 3 personnes (triumvirat).
⇒ Le 1er consul, Napoléon Bonaparte, exerce la totalité du pouvoir. Le 2ème consul est Cambacérès et le 3ème consul est Lebrun.

C’est le début du césarisme (1799-1814), mode de gouvernement autocratique prétendant s’appuyer sur le peuple.

La Constitution donne au 1er consul un droit de regard sur le fonctionnement de toutes les institutions. Il y a donc une concentration du pouvoir dans les mains de Napoléon.

⚠️ Il ne faut pas confondre le césarisme, qui s’appuie sur le peuple pour garantir le maintien de son pouvoir (sorte de populisme) et le monarchisme.

Le coup d’état du 18 brumaire de l’an 8 (9 novembre 1799) amène un régime plus autoritaire que l’Ancien Régime. C’est le début d’une longue période de pouvoir personnel.
MAIS les idées de la Révolution française réémergent à travers le parlementarisme (→ prépondérance que l’on veut donner au pouvoir législatif représentatif)

Mai 1804 : proclamation de l’Empire.
2 décembre 1804 : Napoléon sacré empereur.
Jusqu’à 1812 : série de victoires militaires à travers l’Europe.

Section 1 : La monarchie constitutionnelle ; l’émergence de techniques parlementaires

2 Restaurations :
1814 : Empire renversé, Napoléon exilé ; il revient lors des « Cent-Jours »
1815 : Seconde Restauration

§ 1. 1ère Restauration

Dès 1812, l’Empire montre des signes d’affaiblissement.
Juin 1812 : lancement de la campagne de Russie
1813 : l’alliance Russie/Prusse/Autriche inflige rapidement des défaites à la Grande Armée

31 mars 1814 : les alliés pénètrent dans Paris

  • Le Sénat, gardien de la Constitution sous l’Empire, proclame la déchéance de Napoléon Bonaparte
  • Il abdique à Fontainebleau et part en exil sur l’île d’Elbe (possession française)

Le frère cadet de Louis 16 devient Louis 18
(obj : montrer la continuité entre l’Ancien Régime et la monarchie restaurée)
Ce sont les alliés qui prévoient cette Restauration.

  • Louis 18 octroie une charte aux français
    Charte : document accordé par un seigneur à une ville et qui assure à celle-ci un certain nombre de privilèges
    ≈ constitution, mais on ne parle pas de constitution parce que ça rappelle trop la Révolution
  • Rupture avec l’Empire (obj : renouer avec la monarchie)
    ⚠️ Pas de rétablissement de l’Ancien Régime : Louis 18 pense qu’on ne peut pas revenir à la société de privilèges (clergé, noblesse, tiers-état)
    ⇒ recueille une partie de l’héritage de la Révolution
    ⇒ ne revient pas sur le principe de l’égalité des citoyens
    ⇒ ne revient pas sur la séparation des pouvoirs
    —> Restauration incomplète

Dans le préambule de la Charte, Louis 18 affirme qu’il a été rappelé sur le trône par le peuple français ; qu’il veut « renouer la chaîne du temps » (= son régime se veut être dans le prolongement de celui de Louis 16) ; que la souveraineté appartient au Roi et non au peuple et à la nation.

Dans les faits, le pouvoir n’est pas monopolisé par le roi, il est partagé. Ce partage est organisé par la Charte elle-même.

Le roi détient le monopole de la fonction exécutive :
– il commande l’armée, il déclare la guerre, il conclut les traités (relations extérieures)
– il nomme tous les fonctionnaires
– il nomme et révoque librement les ministres
– il prend les règlements nécessaires à l’exécution des lois
– il est le seul à posséder l’initiative des lois
– il promulgue les lois qui sont votées (→ il a donc un droit de veto)
– il convoque et préside les 2 chambres
– il peut dissoudre la chambre des députés (chambre basse)

 

  • Chambre des Pairs (chambre haute), nommés par le roi en nombre illimité, à vie et/ou héréditaire
  • Chambre des députés (chambre basse), élus pour un mandat de 5 ans au suffrage censitaire (il faut payer un certain montant d’impôts pour pouvoir voter)

Ces 2 chambres votent les lois. On parle de bicamérisme ou bicaméralisme (par exemple, la 5e République est un régime bicaméral).

§ 2. Les Cent-Jours et la Seconde Restauration

Napoléon, exilé sur l’île d’Elbe, connaît des difficultés financières. Il s’embarque pour la France avec ses partisans et arrive le 1er mars 1815 vers Antibes avec plus de 1000 hommes.
Son armée grossit ; il remonte jusqu’à Grenoble, Lyon, puis Paris en 3 semaines.

20 mars 1815 : entrée triomphale de Napoléon aux Tuileries.

Napoléon a le soutient du peuple mais pas des notables.
Il confie à un auteur libéral (Benjamin Constant) la rédaction d’un acte constitutionnel (« Acte additionnel aux constitutions de l’Empire« ), proclamé le 1er juin 1815 et surnommé « la Benjamine ».

Différences avec l’Empire :
Napoléon ne peut plus se présenter comme le défenseur de la patrie ni comme l’héritier du jacobinisme révolutionnaire. Il est obligé de se montrer libéral.

Mais il y a une continuité avec l’Empire : césarisme + contrôle des institutions par un pouvoir personnel.

Napoléon essaie de négocier avec les puissances étrangères, mais sans succès. Une nouvelle guerre commence. Le 18 juin 1815, il est défait à Waterloo et est exilé à Ste Hélène. C’est la Seconde restauration.

En juillet 1815, Louis 18 rentre à Paris et la charte de juin 1814 est appliquée à nouveau. Le suffrage universel (Napoléon) redevient censitaire, et il y a à nouveau plusieurs degrés avant l’élection d’un député.
(le suffrage universel rappelle trop le régime bonapartiste, où il est utilisé pour légitimer le pouvoir)

1817 : réforme électorale qui supprime 1 des 2 collèges ; le suffrage reste censitaire.
→ Sens libéral ; plus de pouvoir aux électeurs.

1820 : loi du double vote ; il y a à nouveau 2 collèges électoraux.
Mise en place de 2 degrés de circonscriptions administratives :
– 1 dans le cadre de l’arrondissement
– 1 dans le cadre du département (élit la majorité des députés)
Dans ce système, les citoyens les plus imposés (= les plus riches) peuvent voter 2 fois (dans l’arrondissement et dans le département).
Objectif : davantage de députés conservateurs.
(→ pas un contexte parlementaire)

On assiste à un développement des 1ères techniques parlementaires :

  • Adresse : faculté donnée aux chambres de supplier le roi pour proposer une loi, et d’interpeller le gouvernement, notamment sur les questions de politique extérieure
  • Pétition : actes écrits qui permettent aux membres des 2 chambres d’exiger des explications / éclaircissements sur la politique des ministres
  • Discussion du budget : permet aux membres des chambres de critiquer les orientations budgétaires du gouvernement

    ⚠️ 1ers éléments d’un régime parlementaire, mais ça n’en est pas un

C’est un régime fragile qui dépend de la personnalité du roi.
ex : sous Louis 18, ça fonctionne bien, parce qu’il est un peu libéral

1824 : mort de Louis 18. Il est remplacé par Charles 10, qui est + conservateur et + attaché à la monarchie traditionnelle.
Le caractère parlementaire du régime recule.
Charles 10 nomme à la tête du ministère Polignac, un « ultra » (ultra royaliste).
→ confrontation entre le ministère et les députés libéraux de la chambre basse

Les députés libéraux utilisent le droit d’adresse pour critiquer le ministère (« Adresse des 221 »).
Charles 10 dissout en mai 1830 l’Assemblée.
Juillet 1830 : élections majoritairement hostiles au roi.
→ Les députés libéraux passent de 221 à 274 (contre 282 royalistes).

25 juillet 1830 : plusieurs ordonnances adoptées par Charles 10
→ suspension de la liberté de la presse
→ nouvelle dissolution de la chambre haute
→ nouvelle modification du système électoral
+ nouvelles élections mois de septembre

2 jours après : nouvelle révolution.
Les Trois Glorieuses (aussi appelée Révolution de juillet) : 27-28-29 juillet 1830
→ multiples insurrections suscitées par les libéraux qui continuent à publier leurs journaux
→ Charles 10 envoie l’armée
→ il finit par abdiquer (août 1830)

§ 3. La monarchie de juillet

Après la Révolution, une nouvelle monarchie est instaurée, qui repose sur des fondements différents. Louis-Phillipe 1er, qui appartient à la branche d’Orléans (libéraux), devient roi.

La Charte de juin 1814 est révisée.
Régime contractuel : accord entre la monarchie et les libéraux.

  • Le roi ne peut plus suspendre de lois par des ordonnances et perd son droit de veto.
  • Le roi perd le monopole de l’initiative législative.
  • Les chambres peuvent amender les projets de loi.
  • Le mandat des députés passe de 7 à 5 ans pour multiplier les élections.
  • Le suffrage reste censitaire mais l’âge requis pour voter passe à 25 ans.
  • Le système des collèges électoraux (double vote) reste maintenu mais le roi ne peut plus nommer les présidents des collèges.
    • En 1831 : suppression du double vote. Un seul collège subsiste : l’arrondissement.
  • Chambre des Pairs : l’hérédité de la prairie est supprimée.
    Mais elle reste viagère (à vie) et les pairs sont toujours choisis par le roi.

La presse devient de plus en plus offensive envers le régime.
Retour de l’idée du suffrage universel.
Le régime est touché par plusieurs scandales : certains ministres touchent des pots-de-vin.
Les émeutes et les grèves ouvrières se multiplient.

1848 : nouveau soulèvement à Paris.
Louis-Phillipe 1er ne veut pas tirer sur la foule et abdique le 24 février 1848.
→ met un terme à la monarchie en France

Proclamation de la Deuxième République
Dure 3 ans jusqu’au coup d’État de 1851.

Section 2 : Le retour et l’échec du bonapartisme

§ 1. L’échec de la 2ème République et le rétablissement de l’Empire

A – La 2ème République

⚠️ À l’époque, on parle de « Seconde République »

24 février 1848 : proclamation de la République
→ le suffrage universel est rétabli

Un gouvernement issu des barricades se constitue, composé de libéraux hostiles au suffrage universel et de démocrates.

Une Assemblée constituante est convoquée.
Mais la révolution n’est pas seulement politique, elle est aussi sociale (soulèvement d’ouvriers), et les émeutes continuent.
Mai 1848 : une manifestation organisée en faveur de la Pologne qui se soulève contre la Prusse dégénère et le peuple envahit l’Assemblée constituante.
→ l’armée intervient et l’extrême-gauche est décapitée
→ la République est récupérée par le Parti de l’ordre
→ argument contre le suffrage universel pour les libéraux
31 mai 1848 : une loi restreint le suffrage universel


Une nouvelle constitution est adoptée le 4 novembre 1848.
Le nouveau régime = prédominance du législatif sur l’exécutif.

  • Le pouvoir législatif est confié à une chambre unique (fin du bicaméralisme)
    « Assemblée nationale »
    Députés élus pour 3 ans
  • Le pouvoir exécutif est confié à un président de la République élu au suffrage universel direct pour une durée de 4 ans
    • Le président partage l’initiative législative avec l’Assemblée nationale
    • Il peut renvoyer un texte pour un second vote à l’Assemblée mais il n’a pas de droit de veto
    • Il ne peut pas dissoudre l’Assemblée
    • Il négocie les traités, mais ceux-ci doivent être ratifiés par l’Assemblée
    • Il révoque et nomme les ministres, mais l’Assemblée détermine le nombre de ministres et peut aussi les révoquer

    Il n’y a pas de mécanisme pour résoudre les conflits entre les 2 pouvoirs.


Candidats qui se présentent aux élections présidentielles : général Cabaignac, Lamartine, Louis-Napoléon Bonaparte.

Louis-Napoléon Bonaparte s’appuie sur les milieux populaires et profite de leur mécontentement lié à la réduction du suffrage universel.
Il est élu largement et devient le 1er président de l’histoire de France.
Une opposition s’installe entre L-N Bonaparte et le pouvoir législatif.
Il organise un coup d’État le 2 décembre 1851.

B – Le coup d’État du 2 décembre 1851

Points communs entre les coups d’État de 1799 et de 1851 :
– situation politique bloquée
– révision difficile de la Constitution (l’exécutif ne peut pas dissoudre l’Assemblée)
– séparation trop stricte des pouvoirs
– utilisation de l’image du sauveur, de l’homme providentiel
– l’oncle et le neveu se placent au-dessus des partis ; recherche du consensus

Dans la nuit du 1er au 2 septembre, les partisans de L-N Bonaparte affichent dans les rues de Paris une proclamation / un appel au peuple :

  1. L’Assemblée nationale et le Conseil d’État (dont les membres sont élus par l’AN) sont dissous
  1. Une commission consultative est mise en place en vue de présenter une nouvelle Constitution
  1. L-N Bonaparte se présente come le défenseur de la République et affirme que le coup d’État vise seulement à « rendre au peuple sa souveraineté »
  1. Le suffrage universel est rétabli
  1. Il demande au peuple de se prononcer par plébiscite en faveur d’une délégation à Bonaparte du pouvoir d’établir une Constitution

    plébiscite : consultation populaire qui vise à approuver ou désapprouver un comportement politique ou la personne du gouvernement (institution républicaine de la Rome antique).

    référendum : aussi une consultation populaire, mais l’approbation ou le rejet concerne un texte.


Louis-Napoléon Bonaparte veut une constitution reposant sur 5 principes :
1- Un chef d’état élu pour au moins 10 ans
2- Un Conseil d’État formé par des hommes choisis par le chef d’État
3- Des ministres qui ne dépendent que du chef d’État
4- Un corps législatif élu au suffrage universel

Il y a une Chambre unique, mais L-N Bonaparte prévoit un Sénat pour garder la Constitution (→ restaurer le bonapartisme).
C’est la restauration du césarisme (pouvoir d’un seul au nom du peuple).

La résistance au coup d’État : surtout en province.
Insurrections et différentes manifestations dans toute la France.
L-N Bonaparte utilise l’armée pour réprimer les insurrections (25 000 arrestations).
Il utilise aussi les insurrections pour discréditer ses adversaires.

La France répond favorablement à la consultation de L-N Bonaparte.
Plébiscite les 20 et 21 décembre 1951.
96% des voix pour le coup d’État.
« La France a compris que je n’étais sorti de la légalité que pour rentrer dans le droit »

Décalage entre les partisans de la République (républicains) et le suffrage universel.
Les républicains rejettent le suffrage universel parce qu’ils voient que ça peut mener à un pouvoir autoritaire.
Ils considèrent que le peuple peut facilement être manipulé.


C – Le rétablissement de l’Empire

1) La préparation du régime impérial : la constitution du 14 janvier 1852

14 janvier 1852 : achèvement de la Constitution qui met en place une République.
→ chef d’État élu pour 10 ans
→ n’est que la préparation du régime impérial

La Constitution du 14 janvier 1852 est précédée d’une proclamation qui justifie la restauration des institutions du Consulat et de l’Empire (au motif qu’elles sont plus stables).
Affirme la nécessité d’un chef responsable devant le peuple et qui puisse toujours faire appel au peuple.

Aucune condition de réélection du chef de l’État.
Il peut désigner un citoyen (acte secret) pour lui succéder.
→ réinstallation d’une dynastie

Le chef de l’État concentre toute la fonction exécutive
– adoption de la loi
– monopole de l’initiative
– droit de veto
+ contrôle toutes les institutions

Le corps législatif est concentré en une seule assemblée législative.
Les députés sont élus au suffrage universel direct pour un mandat de 6 ans.
Leur pouvoir de discussion est limité : les amendements ne peuvent être apportés qu’avec l’accord du chef de l’État.
+ le président peut dissoudre le corps législatif.

2) L’Empire autoritaire

En 1852, Louis-Napoléon Bonaparte effectue une série de déplacements et de discours dans des grandes villes françaises.
En octobre 1852 dans le discours de Bordeaux, il affirme que le vœu du peuple est le rétablissement de l’Empire, et qu’il ne souhaite que mettre le droit en conformité avec ce souhait. Il fait la promesse que l’Empire va apporter la paix, par opposition au 1er Empire.

Novembre 1852 : « sénatus-consulte » (décision du Sénat) rétablit la dignité impériale
→ Louis-Napoléon Bonaparte devient Napoléon III

Un nouveau plébiscite sur le rétablissement de l’Empire a lieu
→ 7 millions de oui vs 250 000 non
2 décembre 1852 : un décret rétablit officiellement l’Empire

Noël 1852 : un autre sénatus-consulte modifie la constitution dans un sens favorable à l’empereur. Désormais :

  • L’empereur préside le Sénat
  • L’empereur peut autoriser les travaux publics par décret (important car des sommes colossales sont en jeu)
    De grands travaux urbains prennent place pendant le 2nd Empire (ex : Baron Haussmann à Paris)
  • Le message annuel du chef de l’État devant le corps législatif est supprimé, pour éviter que les députés demandent des comptes à l’empereur

 

La vie législative est contrôlée par l’empereur, qui maîtrise les élections :
– au scrutin uninominal (on ne vote que pour 1 seule personne)
– dans le cadre de l’arrondissement
– système de candidats officiels qui ont des privilèges (ex : leurs affiches sont imprimées sur du papier blanc ; c’est un délit de les arracher ; des employés municipaux nommés par l’empereur tiennent les bureaux de vote ; les préfets organisent les campagnes des candidats officiels et ferment les lieux où se rassemble l’opposition ; etc.)
– si un candidat de l’opposition est élu, il doit prêter un serment de fidélité à l’empereur
– l’abstentionnisme est très important

§ 2. Les mutations du régime

Les 1ères années du 2nd Empire se caractérisent par l’autoritarisme du régime.
Mais à partir des années 1860, le contexte évolue dans un sens défavorable à l’empereur ; il devient moins populaire et doit faire des concessions.

A – L’Empire « libéral » à partir de 1860

La guerre en Italie à partir de 1859 permet d’annexer les comtés de Nice et de Savoie.
Les populations de Nice et de Savoie sont consultées sur leur intégration à l’État français et disent oui, espérant réaliser des profits économiques et étant hostiles au régime libéral italien.

Ces politiques de Napoléon III déplaisent aux catholiques car elles ont fragilisé le pape (qui est à la tête des états pontificaux, dont l’influence diminue fortement suite à cette guerre).

1863 : les membres du corps législatif adressent un blâme à Napoléon III, car il a rompu pacte de Bordeaux (promesse de paix).

Napoléon III conclut un traité de libre-échange avec la Grande-Bretagne
→ les tarifs douaniers, protecteurs pour les produits français, disparaissent
→ « coup d’État douanier »
→ mécontentement des grands commerçants

1860 : Napoléon III donne au corps législatif le droit d’adresse. Ils peuvent s’adresser à l’empereur 1 fois par an (ils peuvent le critiquer).
Mars 1861 : les députés utilisent le droit d’adresse pour critiquer les politiques de N3.

1861 : le sénatus-consulte augmente les pouvoirs du corps législatif en matière de discussion du budget.

1863 : une coalition électorale se forme aux élections.
Les démocrates font alliance avec la droite catholique et monarchiste pour former l' »Union libérale ».
Ils sont 3 fois plus nombreux qu’en 1857 (6 ans avant) mais les députés officiels sont toujours en majorité.

Le député Thiers prononce en 1864 un discours sur les libertés nécessaires :
1- Liberté de l’individu
2- Liberté de la presse
3- Liberté des élections
4- Liberté des députés (droit d’interpellation)
5- Liberté du corps législatif (participe à la direction des affaires publiques)
Il demande le rétablissement du régime parlementaire.

Napoléon III, sous pression, fait de multiples concessions sociales.
Sa stratégie est de s’appuyer sur le monde ouvrier.
1862 : permet à une délégation d’ouvriers d’aller à Londres pour nouer des contrats avec des syndicats britanniques (en France, les syndicats sont strictement interdits depuis 1791).
1864 : dépénalisation de la grève.

1866 : Napoléon III finance une expédition militaire au Mexique pour contrebalancer l’influence des États-Unis. Il veut y installer un empire colonial.
→ échec total sur les plans militaire, politique, financier
→ force N3 à faire de nouvelles concessions politiques

En 1867, N3 donne aux députés ce qu’ils réclament :
– droit d’interpellation rétabli
– libéralisation de la presse en 1868 ; plus besoin d’autorisation

Cercle vicieux pour N3 : l’opposition se fait plus forte, donc il fait des concessions, donc l’opposition se fait plus forte, etc.

Nouvel ennemi : l’extrême gauche, dirigée par Auguste Blanqui, socialiste dans l’opposition depuis 1830, qui dirige le Parti Communiste Révolutionnaire.

Aux élections législatives de 1869, les libéraux remportent la majorité des sièges. Formation du « Tiers Parti » (conservateurs libéraux).

B – L’Empire parlementaire à partir de 1869

Le Sénat, en septembre 1869, accorde au corps législatif :

  • le droit d’élire son bureau et son président
  • le droit de voter son règlement intérieur
  • le droit d’initiative législative

Le Sénat devient une 2ème chambre légale, qui peut s’opposer au vote d’une loi.

En 1870, le journaliste républicain Victor Noir est abattu par un cousin de l’Empereur.
→ forte indignation populaire
→ le journaliste Rochefort est arrêté pour insultes contre l’Empereur
→ le cousin de l’Empereur est finalement acquitté

Napoléon III se dirige définitivement vers un régime parlementaire.
En avril 1870 le Sénat se donne le droit de discussion, de vote et de veto.
→ achève de transformer le Second Empire en régime parlementaire

La France entre en guerre contre la Prusse.
Défaite de Sedan en septembre 1870.
Le Sénat proclame la déchéance de l’empereur.

Section 3 : L’essor et la chute du parlementarisme républicain (1870-1940)

§ 1. L’affirmation du parlementarisme républicain

Après la défaite de Sedan, la France perd l’Alsace et la Lorraine.
4 septembre 1870 : proclamation de la République (par défaut, en attendant que l’on installe un nouveau régime)

A – La naissance de la 3ème République

La République est proclamée par un groupe de députés républicains (Gambetta, Jules Ferry, Jules Favre, Jules Simon).
Ils constituent un gouvernement provisoire appelé gouvernement de défense nationale (la France est toujours occupée, dans un contexte de guerre).

L’urgence est de convoquer une Assemblée constituante, qui est élue en février 1871. Elle est majoritairement conservatrice : 400/675 monarchistes, 250 républicains, 25 bonapartistes.
Les monarchistes sont divisés entre les légitimistes (qui souhaitent le retour aux institutions de l’Ancien Régime et soutiennent le comte de Chambord) et les orléanistes (qui soutiennent le comte de Paris).

Thiers est nommé chef du pouvoir exécutif. C’est un homme expérimenté mais qui ne fait pas l’unanimité. Il n’est pas trop marqué politiquement.
⚠️ Il est simplement nommé par l’Assemblée constituante, il n’est pas élu.

Pacte de Bordeaux (1871, le 2ème) : s’engage à ne pas se prononcer sur la forme du futur régime.

Il réprime violemment la Commune de Paris lors de la Semaine sanglante du 21 au 28 mai 1871.
→ attire des soutiens à Thiers et à la République

Les républicains renient toute affiliation avec 1789.
→ message : cette république est très différente de celle de 1792

Le pouvoir exécutif est confié à Patrice de Mac Mahon qui devient président en 1873.
C’est un monarchiste légitimiste.
Il n’y a finalement pas de retour de la monarchie car le comte de Chambord ne veut pas du drapeau tricolore.
Les élections partielles sont favorables aux républicains.

Janvier 1875 : vote de l’amendement Wallon : « le Président de la République est élu à la majorité des suffrages par le Sénat et la Chambre des députés réunis en Assemblée nationale ».
⚠️ Ici, « Assemblée nationale » = Congrès actuel.
—> entérine le fait que le régime serait une République.
—> l’amendement Wallon « fonde la République ».

25 février 1875 : loi fondamentale qui organise le Sénat et l’organisation des pouvoirs.
Juillet 1875 : loi fondamentale sur les rapports entre pouvoirs publics.
→ fondent la 3ème République en l’organisant

B – La 3ème République : la lettre monarchiste et l’interprétation républicaine

La Constitution est fortement inspirée par les monarchistes. Sa lettre (= son contenu) est donc monarchique.

1) Le contenu de la loi constitutionnelle

2 institutions ayant un rôle majeur : le Président de la République et le Sénat.

Le Président de la République est élu par l’Assemblée nationale (= Congrès actuel) pour un mandat de 7 ans renouvelable.
Il est irresponsable (caractère monarchique). Ses actes sont signés par ses ministres qui endossent la responsabilité.
Il peut prendre des règlements sur tous les sujets, contrôle l’armée et peut dissoudre la Chambre des députés avec l’accord du Sénat.

Le Sénat est composé de 225 sénateurs élus au suffrage universel indirect.
75 sénateurs sont élus à vie (inamovibles).
C’est une institution conservatrice (≠ Chambre des députés).

Responsabilité solidaire des ministres devant les Chambres. Les ministres sont des élus.

2) La crise du 16 mai 1877

2 conceptions opposées du parlementarisme :

  1. Conception dualiste, défendue par Mac Mahon (président de la République) : la prérogative présidentielle doit équilibrer le pouvoir parlementaire.
    Le PR est politiquement irresponsable, mais responsable devant le pays (responsabilité d’ordre moral). Il n’a pas à rendre compte devant l’Assemblée nationale.
  1. Conception moniste, défendue par les républicains : il n’y a qu’un seul centre du pouvoir, la Chambre des députés (chambre basse), qui est la seule émanation directe de la volonté de la nation.
    L’orientation politique du cabinet dépend uniquement de celle de la chambre basse.

Sous la présidence de Mac Mahon, il y a un développement des congrégations religieuses, auquel il n’y est pas opposé. À ce moment, la France est toujours sous le Concordat de 1801.

Le gouvernement de Jules Simon (président du Conseil des ministres) interdit en avril 1877 une pétition demandant l’intervention de la France contre l’État italien (politique étrangère et religieuse).
Un violent débat prend place dans la Chambre des députés sur l’ordre de l’État et des religions, dans lequel Jules Simon ne défend pas Mac Mahon. Or Mac Mahon considère que le rôle de Jules Simon est de faire accepter les politiques de l’Élysée.

La Chambre des députés adopte à 2 reprises des lois jugées dangereuses pour les conservateurs : sur la publicité obligatoire et décriminalisation de certains délits de presse.

Le 16 mai 1877, le président de la République envoie une lettre très critique à Jules Simon, publiée au Journal Officiel. Ce dernier démissionne.

Le 18 mai 1877, un nouveau cabinet qui suit la ligne politique du PR est formé, avec le duc de Bloglie comme président du Conseil.

Le 18 juin 1877, 363 députés votent un ordre du jour de blâme (critique ou condamnation par les députés de la politique du gouvernement).
Mac Mahon demande au Sénat son accord pour dissoudre la chambre basse.
Le 22 juin 1877, la Chambre des députés est dissoute. De nouvelles élections législatives prennent place, opposant les soutiens de Mac Mahon aux républicains.

Le 14 octobre 1877, les élections sont favorables aux républicains.
Le duc de Broglie démissionne en faveur du républicain Dufaure, qui forme un gouvernement de centre gauche, avec des ministres issus des députés.

En janvier 1879, Mac Mahon démissionne. L’Assemblée nationale (Chambre des députés + Sénat) élit un nouveau PR : Jules Grévy.
Jules Grévy est à l’origine d’une nouvelle pratique constitutionnelle, la « Constitution Grévy« . Les pouvoirs du chef de l’État deviennent purement nominaux ; il n’utilise pas les pouvoirs qui lui sont donnés.
Grévy annonce qu’il n’entrera jamais en conflit avec l’expression de la volonté nationale. Il s’efface des débats politiques. Le seul rôle important du PR : les relations internationales.
→ la conception moniste triomphe

3) La réforme constitutionnelle de 1884

Les républicains parviennent au pouvoir.

Réforme constitutionnelle de 1884 :

  • Loi du 14 août 1884, article 2 : « La forme républicaine du gouvernement ne peut faire l’objet d’une proposition de révision. Les membres d’une famille ayant régné sur la France sont inéligibles à la présidence de la République ».
    → on ne peut pas rétablir la monarchie / l’empire
  • Loi du 9 décembre 1884 sur l’organisation du Sénat : supprime 75 membres inamovibles du Sénat (nommés à vie) pour l’avenir.
    + change le mode d’élection des sénateurs, désormais au suffrage universel indirect (collège électoral : on donne davantage de poids aux représentants des villes).

Ces 2 lois terminent l’organisation de la 3e République.
Objectif : promouvoir les idées républicaines.

C – La 3ème République, entre crises et consolidation du régime

Le parlementarisme républicain doit faire faire à de fortes oppositions : monarchistes, bonapartistes, nationalistes.

1) Crise du boulangisme

Le général Georges Boulanger est républicain (rare pour un général).
Il devient ministre de la guerre en 1886. Les républicains espèrent qu’il pourra rallier d’autres généraux.

Il diminue la durée du service militaire de 5 ans à 3 ans.
Service militaire : tous les français au tirage au sort. Très impopulaire + possible de payer pour y échapper.

Il modernise l’armement (souvenir de la défaite de 1870).

Il met en place un service d’espionnage en Alsace et Lorraine.
→ un agent français, arrêté, s’enfuit, les soldats allemands le suivent en France
→ Boulanger propose la mobilisation des troupes
L’incident diplomatique est réglé à l’amiable mais Boulanger obtient le soutien des nationalistes et des revanchards. Surnommé « Général Revanche ».

En mai 1887, les républicains écartent Boulanger du pouvoir et le mutent à Clermont-Ferrand.
Une manifestation vise à empêcher son départ, mais échoue.

En novembre 1887 éclate le scandale des décorations.
Le président de la République (Jules Grévy) est mis en cause.
Le gendre du PR s’est servi de son influence pour vendre des avantages et des décorations (Légion d’Honneur).
Grévy démissionne et tous les républicains sont touchés.
Boulanger, soutenu à droite et à gauche, discrédite le régime et les républicains et rallie tous ceux qui sont mécontents du régime. Il se lance dans une campagne pour la Chambre des députés. Un comité républicain de protestation nationale, composé d’anciens blanquistes, de radicaux, de bonapartistes, de royalistes et d’agitateurs (ex : Déroulède).

En janvier 1889, élections : Boulanger est élu, il se rend à Paris. Un coup d’État est imminent mais n’a pas lieu.
En février 1889, les républicains modifient le mode de scrutin pour que les partisans de Boulanger n’arrivent pas à la Chambre des députés (listes → uninominal).
+ dissolvent la Ligue des patriotes de Déroulède
+ entament des poursuites contre Boulanger

Le Sénat se réunit pour le juger. Il s’enfuit en Belgique. Il est jugé et condamné par coutume à la déportation pour complot et incitation à l’émeute.

2) La classe politique discréditée : le scandale de Panama

À la fin du 19ème siècle, le monde des affaires est en pleine effervescence.
1880 : fondation de la Compagnie du canal interocéanique pour relier les océans Atlantique et Pacifique, créée par Ferdinand de Lesseps, s’inspirant du canal de Suez.

Les particuliers investissent mais les travaux, très coûteux, n’avancent pas.
Lesseps a besoin d’une autorisation administrative pour lever de nouveaux fonds.
Il convainc Baïhaut, le ministre des travaux publics, de valider le projet en échange d’1 million de francs. Il verse également des pots-de-vin à certains députés et sénateurs.

En juin 1888, la compagnie fait faillite et dépose le bilan après avoir dépensé plus d’1 milliard de francs. De nombreux particuliers se retrouvent ruinés.

1892 : campagne de presse pour dénoncer le scandale.
Une liste de noms est diffusée.
Sur 1 milliard dépensé, 1/3 a servi à corrompre.
Toute la classe politique est discréditée. Clémenceau est éclaboussé.
Renforce les anti-parlementaires.

La sanction est avant tout politique. Il n’y aura que 3 condamnations judiciaires : le ministre Baïhaut, Ferdinand de Lesseps et Gustave Eiffel.

3) La crise anarchiste

À la fin du 19ème siècle, la France est touchée par une série d’attentats anarchistes (prônent la violence comme mode d’action).
Exemple : tuent l’impératrice d’Autriche + le président des États-Unis McKinley + le tsar de Russie Alexandre II + le président français Sadi Carnot.

Le leader anarchiste Ravachol, dans son journal La Dynamite, publie le 1er mai 1892 un programme officiel d’explosions à Paris.
> Loi de décembre 1893 : l’incitation au vol, au meurtre et à l’incendie est punie de 5 ans d’emprisonnement.
> Loi de juillet 1894 : les tribunaux correctionnels peuvent avoir connaissance de délites par voie de presse relatifs à l’apologie de la violence. Avant, uniquement les cours d’assises (jury citoyen).
→ « lois scélérates »
toutes les tendances politiques font cause commune contre les anarchistes (même les socialistes et l’extrême gauche leur sont hostiles)

4) L’affaire Dreyfus

Fracture sociale et politique majeure en France pendant ~10 ans.

En septembre 1894, les services de contre-espionnage obtiennent la preuve qu’une trahison a été commise. Une femme de ménage à l’ambassade allemande y trouve des documents de l’armée française.

Le capitaine Alfred Dreyfus est traduit devant le Conseil de guerre à Paris. Le 22 décembre 1894, il est reconnu coupable à l’unanimité et condamné à la dégradation et à la déportation perpétuelle sur l’île du Diable (La Réunion).

2 ans plus tard, le colonel Picquart compare les écritures et constate que le vrai traître est le commandant Ferdinand Walsin Esterhazy.
En 1897, Estherhazy est traduit devant le Conseil de guerre de Paris.
Il est acquitté en janvier 1898 → Émile Zola publie J’accuse, une lettre ouverte au PR, dans le journal L’Aurore. Traduit devant la Cour d’assises de Versailles et condamné, il s’exile en Angleterre.
La justice civile doit prendre l’affaire en main. L’affaire Dreyfus prend un tournant politique.

En juin 1899, la Cour de cassation casse le jugement du Conseil de guerre de 1894. Dreyfus est renvoyé devant un nouveau Conseil de guerre à Rennes, qui reconnaît à nouveau Dreyfus coupable.
Une campagne de presse réclame le boycottage de l’exposition universelle de Paris de 1900.

En septembre 1899, le président de la République Émile Loubet gracie Dreyfus.
Ses soutiens veulent que son innocence soit reconnue.

Jean-Jaurès est élu député en mai 1902. En 1903, il prend la parole devant la Chambre des députés pour défendre Dreyfus. Il soutient que l’arrêt du Conseil de guerre de Rennes n’est pas valable.
La Cour de cassation est saisie à nouveau. En 1906, elle rend un arrêt de réhabilitation.
Dreyfus est réintégré à l’armée.

§ 2. La crise du régime parlementaire

A – Les faiblesses du régime

1) L’instabilité ministérielle

Entre 1879 et 1914, 46 cabinets différents se succèdent.
Seulement 2 périodes de relative stabilité : de 1883 à 1885 et de 1899 à 1909.

La cause est politique : fragmentation des forces politiques.
À la fin du 19ème siècle, les partis politiques naissent. Ils sont nombreux, ils se déplacent sur l’échiquier politique et se fragmentent.
Il est donc très difficile de former une ligne cohérente et une majorité durable.

La cause est aussi juridique : le scrutin majoritaire à 2 tours offre des opportunités de compromis. Ce sont souvent des alliances qui remportent la majorité au sein de l’Assemblée.
En général, les alliances ne tiennent pas lorsque leur exercice commence.
⇒ majorités fragiles

De plus, le centre de gravité du pouvoir se déplace peu à peu vers la Chambre des députés :
> elle peut renverser le gouvernement
> le gouvernement ne peut pas demander au PR de dissoudre la Chambre depuis Grévy

Il n’y a pas de règle qui limite le pouvoir des ministres.

Les moyens parlementaires utilisés par la Chambre des députés sont la question de confiance et l’interpellation.
L’interpellation peut être déclenchée par les députés, conduit à un débat général et se conclut par un vote de l’ordre du jour (→ dans lequel les chambres donnent ou refusent leur confiance au PR ; le Sénat peut aussi l’utiliser).
La question de confiance est une initiative venant du gouvernement lorsqu’il veut entreprendre une réforme. Il peut demander par une question de confiance si les parlementaires lui font confiance. Si la réponse est oui, la réforme est votée ; si non, le gouvernement doit démissionner.

En moyenne, avant la Première Guerre mondiale, un gouvernement tenait 9 mois.

2) La faiblesse militaire : la Première Guerre mondiale

Depuis 1870, les français veulent prendre leur revanche sur l’Allemagne.

En juin 1914, l’archiduc d’Autrice François Ferdinand est assassiné par un nationaliste serbe. L’Autriche (alliée à l’Allemagne) pose un ultimatum à la Serbie (alliée à la France).

Les nationalistes sont très contents de cette situation. Tout le monde pense que la guerre sera courte et victorieuse.
1 seul personnage politique est opposé à la guerre : Jean-Jaurès, suivi par les socialistes.
Le 31 juillet 1914, Jean-Jaurès est assassiné par un nationaliste ; il n’y a donc plus d’opposition à la guerre.

L’Allemagne déclare la guerre (3 août) et la mobilisation est déclarée.
Au début du 20ème siècle, la France est le pays le moins peuplé d’Europe avec une population vieillissante (mortalité > natalité).
L’Allemagne a une armée plus puissante et son industrie est plus développée.

Le PR Raymond Poincaré adresse un message au Parlement. Il y appelle à une « union sacrée entre tous les fils de la France ».
Union sacrée → remaniement ministériel pour faire entrer dans le cabinet des représentants de toutes les tendances politiques.
Pour la 1ère fois en France, il y a une union de toutes les tendances politiques : les socialistes et l’extrême droite entrent au cabinet.

Il y a une union politique mais il y a une fracture entre le monde politique et le monde militaire.
Le monde militaire est représenté par le Maréchal Joffre, chef de l’état-major. Il veut mener librement les opérations militaires sans contrôle des parlementaires.

Les 1ères opérations militaires françaises, des attaques dans les Ardennes et en Lorraine, sont désastreuses.
Joffre reste à la tête de l’état-major jusqu’au désastre de la bataille de Verdun en 1916 (fait 300 000 morts français et allemands).
Dès 1915 le conflit s’était enlisé.

En 1916, l’union sacrée est dénoncée par les socialistes et les syndicalistes.
Aristide Briand mène un remaniement ministériel pour exclure les socialistes du gouvernement.
→ l’union politique est déjà un semi-échec en 1916

Joffre est remplacé par Nivelle, qui veut mener de nouvelles offensives entre Soissons et Reims.
Le 16 avril 1917, il lance l’offensive du Chemin des Dames.
→ déroute (conditions climatiques mauvaises + les allemands étaient prévenus)
Nivelle, soutenu par Aristide Briand, s’entête et plus de 200 000 hommes meurent.
Il est remplacé par Phillipe Pétain, qui rétablit le calme en améliorant les conditions de vie des soldats (plus de permissions, meilleure nourriture).

1917 : révolution bolchévique. L’URSS se retire de la guerre + nie ses dettes envers la France (→ de nombreux investisseurs sont ruinés).

Clémenceau est appelé à la présidence du Conseil en novembre 1917.
Il met en place une dictature : il exerce le pouvoir, impose son autorité aux parlementaires et aux militaires.
Il accélère la production de guerre en jouant sur les oppositions entre les syndicalistes pour limiter les grèves + en mettant en régie l’approvisionnement de guerre et les chemins de fer.
Il fait arrêter 2 ministres, Malvy et Caillaux, condamnés sans véritable preuve.

Les troupes françaises parviennent à arrêter les allemandes.
Un armistice est signé le 11 novembre 1918.
La France récupère l’Alsace et la Lorraine.
La guerre a fait, en France, 700 000 veuves et 800 000 orphelins.
L’industrie tourne au ralenti. Tandis que les soldats retournent à la vie civile, de nombreux ouvriers sont licenciés. Le chômage explose.

3) Le retour des scandales politiques

Affaire Marthe Hanau : fonde un hebdomadaire financier : la Gazette du Franc. C’est en réalité une vaste escroquerie pour détourner l’argent des investisseurs.
Le système s’écroule en 1928, après avoir détourné plus de 100 millions de francs.
Elle soudoie des hommes politiques pour ne pas être poursuivie.

Affaire Oustric (1929) : Albert Oustric, un banquier, spéciale en bourse. Il noue des liens douteux avec le monde politique. Sa banque fait faillite en 1930. Il entraîne dans sa chute le garde des Sceaux, Raoul Perret, qui a tenté de retarder les poursuites contre lui.

Affaire Stavisky : l’escroc Stavisky fait l’objet de plusieurs poursuites judiciaires, souvent étouffées grâce à l’intervention de certains parlementaires. Il fonde le Crédit Municipal de Bayonne, un montage qui repose sur des bijoux volés. L’affaire éclate en 1934 et Stavisky meurt dans des conditions étranges (officiellement, c’est un suicide, mais avec une balle tirée à 3 mètres de lui).
Ce scandale éclabousse des hommes politiques, des journalistes, des magistrats.
Exemple : le procureur général, beau-frère du président du Conseil Camille Chautemps (ensuite obligé de démissionner), repousse 19 fois le procès Stavisky.

B – La fin du régime

1) L’échec politique : la pratique des décrets-lois

La loi du 10 février 1918 donne au cabinet Clémenceau les pleins pouvoirs en matière de ravitaillement. Elle permet au cabinet de prendre des décisions sans demander le vote des assemblées.
Cette pratique cesse après la guerre.

Dans les années 1920, le gouvernement demande aux parlementaires l’autorisation de mener une politique économique plus libre.
Pour Boncour, l’idée est « contraire aux principes du droit public, contraire aux règles constitutionnelles et politiquement dangereuse ». Il supplie les républicains de ne pas signer ce « procès-verbal de carence du régime parlementaire ».
Mais le 22 mars 1924, le gouvernement obtient cette autorisation.

À partir de 1934, on peut à nouveau voter des lois d’habilitation (qui autorisent le gouvernement à prendre des décrets qui ont valeur de loi dès le moment où ils sont ratifiés), parce que le Parlement se révèle incapable de résoudre les problèmes économiques auxquels la France est confrontée.
(Le krach boursier de 1929 n’affecte la France qu’en 1931/1932.)

Les décrets-lois sont soumis à ratification législative.

À partir de 1934, il n’y a pas de définition très précise de la délégation. Le Parlement ne donne qu’un but général à atteindre : le gouvernement a une grande liberté dans les décisions qu’il peut prendre.

Le 8 décembre 1939, une loi d’habilitation accorde au gouvernement Daladier le pouvoir de prendre toutes les mesures nécessaires à la défense du pays.

2) L’impuissance militaire : la Seconde Guerre mondiale

En 1933, Hitler arrive au pouvoir (chancelier) en Allemagne. Il viole les clauses du traité de Versailles qui interdisaient à l’Allemagne de se réarmer.
Hitler (qui exerce une certaine fascination sur les hommes politiques et les intellectuels) commence le réarmement de l’Allemagne et rétablit le service militaire.
Les voisins de l’Allemagne ne veulent pas réagir.

En 1938, l’Allemagne annexe l’Autriche et regarde vers les Sudètes.
Daladier (président du Conseil) et Chamberlain (1er ministre anglais) vont en Allemagne pour négocier les Accords de Munich, qui autorisent Hitler à annexer les Sudètes en échange de la paix.

En 1939, l’Allemagne annexe la Tchécoslovaquie, qui a signé un traité d’assistance mutuelle avec la France. Mais la France ne réagit pas ; l’URSS considère donc que la France a trahi ses engagements et se rapproche de l’Allemagne pour signer le Pacte germano-soviétique (traité de non-agression).

En septembre 1939, l’Allemagne envahit la Pologne (allié de la France).
« drôle de guerre » → pas de conflit armé
Offensive allemande lancée en mai 1940 par la Belgique.
Le 10 juin 1940, Paris est menacé. L’armée et les civils français fuient vers l’ouest.
Paul Reynaud, président du Conseil, démissionne. Phillipe Pétain est élu pour le remplacer. Il arrive au gouvernement le 16 juin 1940, signe l’armistice le 22 juin et s’installe à Vichy le 29 juin.

10 juillet 1940 : vote d’une loi constitutionnelle
> fin de la 3ème République
> Pétain devient chef de l’État français
> Pétain reçoit le pouvoir constituant