Cours 16 : L’aggravation de l’infraction

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La notion de circonstances aggravantes parait familière parce que elle fait partie de l’imagerie du droit pénal, mais il s’avère difficile d’en donner une définition précise.

La doctrine aborde les circonstances aggravantes à
travers leurs effets : constitue une circonstance aggravante ce qui est utile – mais pas nécessaire – à la constitution de l’infraction (par ailleurs constituée par tous ses éléments).
La cause de l’aggravation tient à la manière dont les faits ont été perpétrés.

Une aggravation de la répression évoque une aggravation des faits, mais il peut arriver que l’aggravation soit étrangère aux faits qui tiennent au passé de leur auteur.

§1. Les circonstances liées à l’infraction

Les circonstances liées à l’infraction sont les plus nombreuses, mais sont rarement définies par le législateur qui se contente de les nommer.
Cela est déplorable, parce que compte tenu de leur conséquences répressives, elles devraient être soumises au
principe de légalité.

La doctrine les envisage comme l’élément qui, venant préciser une incrimination initiale pour augmenter la peine, fait naître une infraction distincte.
En principe les circonstances aggravantes agissent sur l’infraction qu’ils transforment.
Idée : Leur effet sur la peine encourue par l’agent n’est qu’une conséquence de la perception différente qui s’impose.
Par exemple, une infraction apparait plus grave lorsqu’elle est commise en réunion que lorsqu’elle est commise par un individu isolé.

La réunion (= le fait d’agir à plusieurs personnes) est considérée comme une circonstance aggravante pour certaines infractions.
L’infraction apparait aussi plus grave lorsqu’elle est commise avec une arme, avec préméditation, à l’encontre d’une personne vulnérable, par personne ayant autorité sur la victime…

Ces circonstances aggravantes sont rarement définies et n’ont pas de régime juridique commun.
Lorsque l’on cherche à les étudier, il faut constater qu’elles obéissent à une exigence de spécialité, qui signifie que les circonstances aggravantes ne peuvent être relevées par un juge qu’à partir du moment où le texte incriminant l’infraction le prévoit.

Or, la loi n’agit pas toujours de manière cohérente.
Par exemple, la réunion ne constituera des circonstances aggravantes que dans l’hypothèse où le législateur l’aura prévue.

Toutes les circonstances aggravantes ont logiquement pour effet de relever le niveau des peines principales encourues.
Il faut constater l’incohérence du législateur qui ne fait pas produire à toutes ces circonstances le même effet.
Problème : il n’est pas possible de prévoir le coefficient d’aggravation.

§2. Les circonstances aggravantes personnelles

L’état de récidive est propre à l’auteur des faits ; il dépend des faits accomplis et qui restent à juger.
Cet état de récidive légale est relativement complexe à appréhender.

A – La notion de récidive légale

Étymologiquement, ce terme vient du latin recidere, qui évoque la rechute.
Toute personne est en état de récidive légale si deux infractions qui sont séparées par un jugement définitif de condamnation lui sont reprochées.

Idée : les peines encourues pour la seconde infraction peuvent être aggravées compte tenu du passé pénal.

1) Définition de la récidive légale

L’appréciation de la récidive légale s’opère de manière objective ; elle suppose la comparaison de deux termes :

  1. Le premier terme de la récidive est la condamnation pénale définitive prononcée par une juridiction répressive à raison d’une première infraction.
    L’existence de ce jugement définitif est nécessaire pour qu’il n’y ait aucun doute sur l’état d’esprit de l’agent au moment où il commet une nouvelle infraction.

    Peu importe le montant de la sanction prononcée à cette occasion : la gravité du premier terme de la récidive ne dépend pas de la peine prononcée, mais de la peine encourue.

  1. Le second terme de la récidive est l’infraction indépendante de celle qui a suscité la condamnation définitive de la 1ère infraction.
    La nouvelle infraction doit être parfaitement distincte et indépendante de la 1ère.

    Ce second terme s’apprécie au jour de la nouvelle infraction.
    C’est la loi en vigueur au jour où la seconde infraction est commise qui régit la question de la récidive légale (et non celle en vigueur au jour de la condamnation définitive de la première infraction).

    La récidive légale n’est caractérisée qu’au moment où le second terme est établi.

2) Originalité de la récidive

La récidive ne doit pas être confondue avec :

  1. Le concours réel d’infraction : lorsqu’une personne commet au moins 2 infractions qui ne sont pas séparées entre elles par un jugement de condamnation (définie à l’article 132-2 du Code pénal).

    Peu importe le temps écoulé entre les deux infractions, ce n’est pas une circonstance aggravante.
    Idée : cela témoigne de la dangerosité de l’auteur des faits (il a commis plusieurs infractions).

    En principe, lorsque plusieurs infractions sont commises sans être séparées par un jugement définitif de condamnation, le juge doit prononcer plusieurs déclarations de culpabilité et plafonner les peines encourues.
    → Le concours réel d’infraction conduit à une limitation de la répression.

    Idée : le délinquant n’a pas reçu de rappel à l’ordre, il semble donc moins dangereux qu’un récidiviste.

    En matière de contraventions, l’article 132-7 permet un cumul d’amendes sans limitation de montant, parce que les contraventions sont des infractions peu graves.
    En matière de délits, le juge statuant sur toutes le infractions peut prononcer toutes les peines potentiellement applicables, mais dans la limite du montant encouru le plus élevé pour l’infraction la plus grave.

  1. La réitération : situation intermédiaire entre le concours réel et la récidive, elle suppose aussi une pluralité d’infractions, mais aussi un jugement de condamnation.
    → Il s’agit de la récidive imparfaite.

    L’article 132-16-7 précise qu’il y a réitération d’infraction lorsqu’une personne a déjà été condamnée définitivement pour un crime ou un délit et commet une infraction qui ne répond pas aux conditions de récidive légale.

    Le cumul de sanction est autorisé, mais la seconde infraction n’est pas aggravée par l’état de réitération.

B – Les conséquences de la récidive légale

La récidive permet de sanctionner le mépris dans lequel est tenue l’autorité judiciaire par l’auteur de l’infraction.

1) Sanction d’un crime en récidive légale

Lorsque le premier terme de la récidive était une condamnation définitive pour un premier crime ou un délit grave (10 ans de prison) et qu’un nouveau crime est commis :

  • Soit le nouveau crime commis est puni de la réclusion à perpétuité → il n’y a pas d’aggravation ;
  • Soit le nouveau crime expose son auteur à 20 ou 30 ans de réclusion et qu’il est commis après un jugement définitif de condamnation grave (10 ans de prison) → la sanction encourue est la réclusion criminelle à perpétuité ;
  • Soit le nouveau crime est puni de 15 ans de réclusion criminelle → la sanction encourue est 30 ans de réclusion.

Cette forme de récidive est considérée comme générale, dans la mesure où elle s’applique quelque soit le crime constitutif du second terme.
→ Il n’est pas nécessaire que les deux crimes soient identiques.

Peu importe le délai ayant séparé le premier et le second jugement, il n’est pas nécessaire d’établir que les deux infractions ont été commises dans un laps de temps court → état de récidive perpétuel (il n’y a pas de prescription).

2) Sanction d’un délit en état de récidive légale

Si le nouveau délit fait suite à une condamnation pour un crime ou un délit grave (10 ans de prison) :

  • si le nouveau délit est lui-même puni de 10 ans, le maximum des peines est doublé, dès lors que le nouveau délit est constaté dans les 10 ans ;
  • si le nouveau délit est puni d’une peine inférieure à 10 ans, mais supérieure à 1 an, le maximum des peines de prison et d’amende est aussi doublé, dès lors que le nouveau délit est constaté dans les 5 ans.

La récidive est toujours générale, même si le délit n’est pas en rapport avec l’infraction de la 1ère condamnation.
En revanche, la récidive est temporaire.

Lorsque l’infraction constituante du second terme de la récidive est un délit identique pour lequel l’agent a déjà été condamné, le maximum de l’amende et des peines encourues est doublé si le délit intervient dans un délai de 5 ans après la condamnation.
→ Uniquement à l’égard de faits identiques.

Idée : c’est la persistance du délinquant dans un même penchant coupable justifie le doublement des peines.

Le législateur contemporain a tendance à étendre le champ de récidive correctionnelle, qui est de plus en plus applicable aux délits assimilés (= pas identiques).
Par exemple, l’article 132-16 dispose que “le vol, l’extorsion, l’escroquerie et l’abus de confiance sont considérées au regard de la récidive, comme une même infraction”.

3) Sanction d’une contravention en état de récidive légale

Les possibilités d’aggravation sont beaucoup plus limitées : elle n’est possible qu’à l’égard des contraventions de la 5ème classe.

D’une manière générale, le maximum de l’amende encourue est doublé lorsque le texte d’incrimination le permet, si l’auteur a été condamné définitivement pour la même contravention dans l’année qui précède.
→ Récidive temporaire.
→ Doublement spéciale : uniquement pour des contraventions identiques + uniquement quand le texte d’incrimination le prévoit.

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