Chapitre 4 : La réalisation du droit international public

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Comme en droit interne, il existe dans l’ordre juridique international des mécanismes qui permettent de contrôler l’application des normes et de sanctionner leur non respect.

En raison de sa structure décentralisée et horizontale, les sanctions et contrôles sont dévolus aux États, qui apparaissent donc juges et parties.

Aujourd’hui, en réalité, malgré l’essor des organisations internationales et des juges internationaux, les États restent les instances privilégiées de contrôle et de sanction du droit international.

Section 1 : Les États, principaux garants du respect du droit international

Le droit international a force obligatoire, en vertu du principe pacta sunt servanda prévu à l’article 26 de la Convention de Vienne sur les traités.
En cas de non respect de leurs engagements internationaux, les États engagent leur responsabilité internationale.

Le Projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite de la Commission du droit international (2001) définit un fait internationalement illicite comme un comportement qui consiste en une action ou une omission attribuable à l’État et qui constitue une violation d’une obligation internationale de l’État.

L’article 29 du Projet d’articles établit le maintien de l’obligation d’exécuter l’obligation internationale violée.
L’État doit également réparer le préjudice causé par le fait internationalement illicite ; cette réparation doit être intégrale (exigence posée en 1927 par la CPJI dans l’affaire de l’usine de Chorzow).

Les États sont à la fois juges et parties : ils sont juges de leur propre comportement comme du comportement des autres États.
L’État apprécie pour lui-même s’il agit dans le respect de ses engagements internationaux et si les États tiers en font de même.

Lorsqu’un État juge qu’un État tiers ne respecte pas ses engagements internationaux, de quels moyens dispose-t-il pour amener l’autre État à son conformer à ses obligations internationales ?

  1. L’exception d’inexécution, qui ne fonctionne que pour les obligations conventionnelles, est une exception à la règle pacta sunt servanda.
    Idée : la violation par un État de ses obligations conventionnelles peut justifier la non-exécution du traité.
  1. La non reconnaissance : les États disposent d’un pouvoir discrétionnaire pour reconnaître, mais il existe une obligation de non reconnaissance d’une situation illicite.
  1. Les sanctions unilatérales ou décentralisées : les États peuvent décider de recourir à des sanctions contre un État qui ne se conformerait pas à ses engagements internationaux.
    Problème : la détermination de la licéité internationale est subjective ; la décision de recourir ou non à une sanction dépend de l’État et de son appréciation de la situation.

Le recours à de telles mesures présentent des risques de déstabilisation ou d’escalade du conflit.
Leur utilisation est donc encadrée par le droit international.

I – Le recours aux sanctions unilatérales en cas de violation du droit international : le pouvoir discrétionnaire des États

Le recours aux sanctions est reconnu par le droit international comme un moyen d’amener l’État responsable à s’acquitter de ses obligations internationales.

La sentence arbitrale dans l’affaire de l’accord relatif aux services aériens (1928) affirme clairement le droit d’un État de faire respecter son droit par des “contre-mesures” (= sanctions).

Ces sanctions ont un caractère subjectif (c’est l’État qui apprécie pour lui seul si l’autre État est en violation de ses engagements) et aléatoire (c’est l’État seul qui décide ou non d’adopter des sanctions, sans obligation).

Le recours aux sanctions économiques est principalement l’apanage des grandes puissances, parce que l’effet des sanctions est tributaire du poids économique de l’État.

II – Le choix des sanctions unilatérales en cas de violation du droit international : le pouvoir conditionné des États

Si l’État peut recourir aux sanctions unilatérales, le choix de la sanction est encadré par le droit international public.

A – Panorama des sanctions unilatérales

À partir de l’exemple des sanctions adoptées par l’UE contre la Russie.

On constate un recours croissant aux sanctions depuis la fin de la guerre froide, notamment dans le contexte de blocage du Conseil de sécurité de l’ONU.
Les États-Unis, précurseurs en la matière, recouraient aux sanctions dès les années 1950.

Il faut distinguer les sanctions économiques unilatérales des sanctions collectives.
Exemple : les mesures coercitives adoptées par le Conseil de sécurité sont des sanctions collectives/centralisées.
Les États peuvent adopter des sanctions :
> soit à l’initiative des Nations Unies ;
> soit de leur propre initiative.

L’Union européenne distingue 3 types de “mesures restrictives” (= sanctions) :

  1. Les sanctions onusiennes, qui sont adoptées par le Conseil de sécurité ;
  1. Les sanctions mixtes, qui permettent un renforcement des sanctions onusiennes (l’UE ajoute) ;
  1. Les sanctions autonomes, qu’elle adopte de sa propre initiative.

L’UE considère que les “mesures restrictives” sont un outil de sa politique étrangère.
Les objectifs recherchés sont multiples ; voir Sanctions: comment et quand l’UE adopte des mesures restrictives – Consilium (europa.eu).

Les sanctions unilatérales ont soit un objet thématique (visent des États en particulier, ou toutes les personnes qui participent à la commission de violations), soit un objet géographique.
Elles peuvent cibler aussi bien les États et leurs dirigeants que des entités non étatiques (personnes morales ou physiques). On parle de “sanctions ciblées” lorsqu’elles visent des personnes privées.

Les sanctions extraterritoriales sont des sanctions pour lesquelles il n’y a aucun lien de rattachement personnel ou territorial. Elles permettent de sanctionner toute personne ou entité engagée dans certaines relations économiques avec ces États dits ennemis, peu importe qu’il y ait ou non compétence personnelle ou territoriale.

Il s’agit avant tout d’une pratique étatsunienne, mais certains États tels que la Chine y ont aussi recours.
Ce champ d’application extrêmement large inquiète l’Union européenne et certains États membres des Nations Unies.

B – Le droit de recourir à des mesures de rétorsion et à des contre-mesures

1) La notion de mesure de rétorsion

Les mesures de rétorsion sont des mesures qui sont inamicales, mais qui sont intrinsèquement licites. Elles ne sont pas contraires aux obligations internationales des États.

Exemple : le fait, pour un État de rappeler son ambassadeur accrédité auprès d’un État tiers, pour protester contre les agissements de ce dernier (parfaitement licite au regard du droit international).

2) La notion de contre-mesures

Les sanctions économiques (embargo, boycotts, discriminations tarifaires…) posent d’avantages de problèmes : elles peuvent contrevenir aux règles de droit international économique, telles que les traités bilatéraux d’amitié et de commerce, les traités de libre-échange, etc., qui favorisent la circulation des biens, des services et des personnes.
Ces sanctions économiques peuvent-elles constituer des contre-mesures ?

Les contre-mesures sont des réactions intrinsèquement illicites, mais dont l’illicéité serait exclue en raison même qu’elles répondent à un fait internationalement illicite.
→ elles deviennent licite parce qu’elles répondent à certaines conditions

L’article 51 du Projet d’articles énonce les conditions cumulatives suivantes :

  1. Une mesure adoptée par un État lésé en réponse à un fait internationalement illicite préalable
    Il faut qu’il y ait un fait internationalement illicite commis par un État, pour qu’ensuite un État lésé décide de réagir en adoptant une mesure illicite pour que ce fait cesse.
  1. Une mesure proportionnée au préjudice subi
    Dans l’affaire concernant l’accord relatif aux services aérien du 27 mars 1946, l’arbitre international affirme que “les contre-mesures ont pour objet de reconstituer l’égalité entre les parties…”.
  1. Une mesure limitée dans le temps
    Les contre-mesures doivent cesser dès l’instant où l’État auteur du fait internationalement illicite s’est acquitté de ses obligations internationales.
  1. Une mesure limitée dans son objet
    L’article 50 du Projet d’articles de la CDI dresse une liste d’obligations auxquelles les contre-mesures ne peuvent pas déroger :

    1. L’obligation de ne pas recourir à la menace et à l’usage de la force
      → une contre-mesure est non armée
    1. Les obligations de protection des droits fondamentaux de l’homme
    1. Les obligations de caractère humanitaire
    1. Les autres obligations qui découlent des normes impératives du droit international général

Enjeu : l’État ne voit pas sa responsabilité engagée au motif qu’il aurait entrepris une action internationalement illicite.
Les contre-mesures forment un contentieux important devant la CIJ, chargée de juger de la licéité des sanctions unilatérales entre États.

Exemple : l’Iran saisit la CIJ de 16 juillet 2018 pour contester la licéité des sanctions américaines réintroduites en mai 2018 par le président Donald Trump après son retrait de l’accord sur le nucléaire iranien (2015).
Pour l’Iran, il s’agit d’une violation du traité d’amitié et de commerce signé dans les années 1990 entre les 2 États.

C – L’interdiction de recourir à des mesures de représailles

Les mesures de représailles sont les mesures qui n’ont pas revêtu la qualification de contre-mesures, et qui restent donc illicites au regard du droit international.

Exemples : sanctions unilatérales armées, sanctions qui contreviennent aux obligations qui concernent les droits fondamentaux de l’homme, aux normes impératives du droit international général, etc.

Section 2 : Les organisations internationales et le juge international, autres garants du respect du droit international

Ces organisations ne sont pas totalement détachées des États, dans la mesure où leurs compétences leur ont été attribuées par les États.

I – La centralisation des mécanismes de contrôle et de sanction de la violation du droit international au sein des organisations internationales

A – L’attribution de pouvoirs de contrôle aux organisations internationales

Les organisations internationales sont en charge de contrôler l’application par les États membres de leurs engagements juridiques, qu’ils soient inclus dans leurs actes constitutifs ou dans leurs droits dérivés.
Ce contrôle est confié à des organes intergouvernementaux ou à des organes intégrés de l’organisation internationale.

Elles disposent de 3 moyens de contrôle :

  1. Prévoir la communication de renseignements et la soumission de rapports par les États membres
    Objectif : vérifier que les politiques des États membres sont en conformité avec leurs engagements internationaux.
    Cette exigence de communication est très fréquente dans le domaine économique ; exemple : OMC, OCDE.
  1. Pouvoirs d’enquête et d’inspection sur place
    Offre la possibilité à un État membre de déclencher une inspection internationale contre un autre État membre s’il est suspecté de ne pas respecter ses engagements internationaux.
    Exemple : l’OIAC (Organisation pour l’interdiction des armes chimiques) est aussi chargée de veiller à l’application par les États membres de la Convention ; elle dispose pour cela de pouvoirs d’enquête et d’inspection sur place.
  1. Contrôle juridictionnel ou quasi juridictionnel
    Certaines organisations internationales disposent d’organes intégrés en charge d’exercer un contrôle juridictionnel à l’égard de leurs États membres.

    1. Exemple : Union européenne, une organisation régionale, a prévu dans son acte constitutif l’institution d’une Cour de justice de l’UE, qui est compétente pour veiller au respect de la législation européenne par les États membres et par les institutions de l’UE.
    1. Exemple : l’ONU, une organisation universelle, a prévu dans sa Charte l’institution de la Cour de justice internationale (chapitre 14).

    Ces organes juridictionnels ou quasi juridictionnels peuvent également être institués par des traités conclus par des États membres sous l’égide d’une organisation internationale.
    C’est notamment le cas dans le cadre de la protection régionale et internationale des droits de l’homme. Exemple régional : la Cour européenne des droits de l’homme, qui peut être saisie de requêtes individuelles comme interétatiques, a été instituée par la Convention européenne des droits de l’homme entre les États membres du Conseil de l’Europe.
    → la CEDH trouve son fondement dans un texte conventionnel

    Autre exemple : le Comité des droits de l’homme, organe quasi juridictionnel qui ne rend que des recommandations, a été institué par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
    ⚠️ Ce n’est pas un organe juridictionnel, mais quasi juridictionnel : il est composé d’experts et peut recevoir des plaintes qui émanent d’États parties ou de personnes privées qui seraient victimes d’une violation de droits reconnus dans le Pacte.

B – L’attribution de pouvoirs de sanction aux organisations internationales

Une organisation internationale peut être habilitée à adopter des sanctions à l’égard de ses États membres qui n’exécuteraient pas leurs engagements internationaux découlant de leur adhésion à l’organisation.

Les États peuvent doter l’organisation internationale d’un pouvoir de sanction dans son acte constitutif.
Ces sanctions sont adoptées par un organe de l’organisation, et non par les États membres individuels, c’est pourquoi on parle de sanctions collectives.

Exemple : l’Union européenne peut être dotée d’un pouvoir de sanction.
Exemple : l’article 23 de l’acte constitutif de l’Union africaine prévoit la faculté pour la conférence d’adopter des sanctions institutionnelles contre tout État membre qui ne respecterait pas ses engagements budgétaires, ainsi que la faculté d’adopter des sanctions politiques et économiques contre tout État membre qui ne respecterait pas les décisions politiques de l’union.

Exemple : au plan universel, le Conseil de sécurité des Nations Unies est investi d’un pouvoir de sanction, dans le cadre du chapitre 7 de la Charte des Nations Unies, qui institue un système de sécurité collective sous l’égide du Conseil de sécurité.

Ces sanctions collectives prennent des formes plus ou moins coercitives.

  1. Les sanctions institutionnelles désignent la possibilité, pour une organisation internationale, de priver un État membre de ses droits ou de sa qualité d’État membre (= suspension ou exclusion).
    Elles interviennent généralement en cas de violation des engagements financiers ou des valeurs de l’organisation.

    1. Exemple : 26 ans après son adhésion, la Russie a quitté le Conseil de l’Europe, après avoir été suspendue sur la base de l’article 8 du Statut du Conseil de l’Europe.
    1. Exemple : l’Union africaine a suspendu le Mali, la Guinée, le Soudan et le Burkina Faso, parce que ce sont des régimes qui ont fait l’objet de coups d’état militaires (motif : changements inconstitutionnels de régime).
  1. Les sanctions économiques ou politiques peuvent être prises par les organisations internationales qui interviennent dans le domaine du maintien de la paix.
    1. Ces organisations peuvent aussi adopter des sanctions vis-à-vis d’États tiers ; par exemple, la Russie est visée par des sanctions de l’Union européenne.
    1. Ces sanctions adoptées par les organisations internationales peuvent viser des États, mais aussi prendre la forme de sanctions ciblées ; par exemple, le Conseil de sécurité de l’ONU adopte des régimes de sanctions, dont la plupart concernent des États, mais certaines personnes privées sont aussi visées (ex : Daesh).
  1. Les sanctions militaires.

II – Focus : la contestation de la violation du droit international devant le juge international

Le juge international est toute institution investie par les États du pouvoir de juger, c’est-à-dire de trancher un litige en toute impartialité par une décision obligatoire sur le fondement du droit international.
Intérêt : avoir une dénomination objective de la légalité internationale.

Le juge international peut être institué par l’acte constitutif d’une organisation internationale (exemple : Cour internationale de justice) ou par un traité (exemple : CEDH).

Il peut être :

  1. Un organe arbitral, avec un caractère ad hoc : le juge va être saisi pour un litige spécifique, mais il n’a pas d’existence permanente ;
  1. Un organe judiciaire, avec un caractère permanent.

Le juge international apparaît aujourd’hui comme une figure importante, bien que non obligatoire.
Il faut qu’il soit saisi par les États (→ ces derniers doivent accepté sa compétence).
Les États peuvent décider de saisir le juge international en cas de différend, mais il faut que tous les États parties aient consenti à sa compétence.

Historiquement, on a d’abord vu le règlement arbitral des litiges interétatiques.
Le règlement judiciaire s’est ensuite développé, même s’il présente moins de libertés pour les États, avec la mise en place croissante d’organisations internationales et la multiplication des juridictions internationales à caractère permanent.
→ juridictionnalisation du droit international

La Cour internationale de justice est la seule juridiction internationale universelle à compétence générale.
Elle a succédé à la CPJI, qui était l’organe judiciaire principal de la Société des Nations.
⚠️ Ne pas confondre la CIJ et la CPI : la CIJ ne juge que les États et la CPI que les individus.

A – Les fonctions et pouvoirs du juge international

Le juge international peut exercer une fonction contentieuse et/ou consultative.
La CIJ est investie de ces 2 fonctions, avec comme objectif la pacification des relations internationales.

1) Dans le cadre de l’exercice de sa compétence contentieuse

La CIJ tranche les différends juridiques entre les États conformément aux règles de droit international. Elle définit de manière objective la licéité des situations internationales.
Elle ne juge que des États, et seuls des États peuvent la saisir → les individus et les organisations internationales n’ont pas qualité pour agir devant elle.

L’article 36 de son statut dispose qu’elle est compétente pour trancher tous les différends d’ordre juridique ayant pour objet :

  1. L’interprétation d’un traité ;
  1. Tout point de droit international ;
  1. La réalité de tout fait qui, s’il était établi, constituerait la violation d’un engagement international ;
  1. La nature ou l’étendue de la réparation due pour violation d’un engagement international.

→ la compétence de la CIJ est générale

La CIJ a été saisie pour trancher des différends très variés.
Elle ne peut pas se prononcer en l’absence de différend.
La CPJI, dans l’affaire des Concessions Mavrommatis de 1924, définit le différend comme un “désaccord sur un point de droit ou de faits, une opposition de thèses juridiques ou d’intérêts entre 2 personnes”.
Le différend doit être né, réel et actuel.

Le juge international peut également juger de différends entre personnes privées et États, notamment en droit international des droits de l’homme.
Depuis le protocole n°11, la CEDH peut être saisie de différends mixtes, si :
> épuisement des voies de recours interne
> respect des délais
> existence d’un préjudice important pour le requérant
> le requérant est directement victime de la violation d’un droit contenu dans la Convention

2) Dans le cadre de sa compétence consultative

La CIJ peut aussi rendre des avis consultatifs (≠ arrêts).
L’AGNU et le Conseil de sécurité peuvent poser toute question juridique à la Cour.

Ces avis n’ont aucune force obligatoire, mais ils ont une autorité indéniable, parce qu’ils contribuent à éclairer et développer le contenu du droit international.
Exemple : dans l’affaire Réparation des dommages subis au service des Nations Unies de 1949, la CIJ établit que l’ONU possède la personnalité juridique internationale.

B – Le recours au juge international

Le recours à un juge international est facultatif : il est subordonné au consentement des parties à la juridiction, en raison de l’égalité souveraine des États.

1) Le principe de la juridiction facultative

Lorsqu’un litige survient, les États peuvent décider de saisir le juge par un compromis pour régler leur litige. Ce compromis précise l’objet du litige que le juge international sera dans l’obligation de trancher. Il constitue un traité au regard du droit international.
→ formalise le consentement des États dans un instrument conventionnel

Devant la CIJ, le compromis constitue l’un des fondements de compétence de la Cour.
La CIJ admet aussi un autre fondement de compétence, où le consentement de l’État demandeur est reconnu de manière explicite après le dépôt de la requête : forum prorogatum.

2) L’exception de la juridiction obligatoire

Il arrive que des États consentent, avant la survenue de tout litige, à la compétence du juge international pour régler des catégories de litiges qu’ils ont préalablement défini.
Ce n’est pas une exception au consensualisme, puisque l’État demandeur a bien consenti à la compétence du juge (avant la survenue du litige).

Exemple : dans le champ du droit international économique.

Le consentement préalable à la juridiction est contenu :
> soit dans une clause compromissoire contenue dans un traité
> soit dans un traité dont l’objet serait lui-même la résolution des différends entre États
Exemple : Convention contre la torture, qui prévoit la résolution des litiges par la CIJ.

L’Ukraine a introduit une requête unilatérale devant la Cour, sur le fondement des clauses compromissoires contenus dans les traités auxquels les 2 États sont parties. Elle invoquait notamment la Convention pour la prévention et la répression du génocide de 1948.
L’Ukraine conteste les allégations de l’État russe (utilisées pour justifier l’invasion) selon lesquelles l’Ukraine serait coupable de génocide.
Cela limite l’objet matériel du différend dont est saisie la CIJ, qui porte donc uniquement sur la Convention sur le génocide.

Les États peuvent consentir à la compétence de la CIJ dans un acte unilatéral – c’est l’article 36 de son Statut qui prévoit un tel fondement de compétence.
Un État qui n’aurait pas lui-même accepté la compétence de la Cour ne peut pas attaquer un autre État.
Ces déclarations ont diminué au fil du temps, ce qui illustre la préférence des États pour une justice optionnelle. Aujourd’hui, seul le Royaume-Uni a fait une telle déclaration, mais avec des réserves. Les États-Unis et la France en avaient fait une, mais l’ont retirée en concluant que c’était trop dangereux (1974 pour la France).

Les 4 fondements de la compétence de la Cour sont donc :

Fondements où le consentement survient a priori :

  1. Clause compromissoire au traité
  1. Déclaration d’acceptation

Fondements où le consentement survient a posteriori du litige :

  1. Compromis
  1. Forum prorogatum

Les États continuent de préférer la justice optionnelle : le recours à un juge international (= la détermination objective de la légalité internationale) reste optionnel.

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