Chapitre 2 : Les autres personnes juridiques

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Rappel : la notion de personne juridique est une construction sociale et le reflet d’un choix politique.
ex : esclaves, femmes, etc.

Section 1 : La personne morale

§ 1. L’identification de la personne morale

Au sens du droit, la personne morale est une personne juridique : c’est un sujet de droit.
Personne morale : groupement de personnes doté d’une personnalité juridique.

C’est particulièrement important au niveau du patrimoine.
→ 1 personne juridique = 1 patrimoine
→ Il n’est donc pas possible de diviser son patrimoine ou d’en affecter des parties à certaines activités.

La distinction entre personne physique et morale est tardive (20e siècle) parce que le Code civil était longtemps imprégné d’une aversion pour toute chose se mettant entre les individus et l’État.
20e siècle : discussion doctrinale importante.


Personnes morales : fiction ou réalité ?

  • Fiction : une personne morale n’est pas réelle
    • « Je n’ai jamais déjeuné avec une personne morale »
    • Le droit doit créer une personne morale ; ce n’est donc qu’une création de la loi.
  • Réalité : une personne morale existe
    • Une personne morale est un groupement qui a un intérêt distinct de ceux qui la composent. Il existe une volonté autonome de ce groupe.
    • Le droit ne la crée donc pas la personne morale, il ne fait que la constater.

Qui peut déterminer ces personnes morales ?

Un arrêt de la Cour de cassation de 1954 reconnaît qu’un comité d’établissement au sein d’une société peut être une personne morale.
→ Le juge peut ériger qu’un groupement a une personnalité propre et est un sujet de droit.
→ La personnalité civile appartient à tout groupement pourvu d’une possibilité d’expression collective pour la défense d’intérêts licites.

§ 2. Les conséquences de la personnalité juridique

C’est la déclaration qui permet de donner naissance à une personne morale.
Conséquence : elle devient sujet de droit (= peut être créancier de droit et débiteurs d’obligations ; a un patrimoine ; peut agir en justice…).

Section 2 : Vers de nouvelles personnes juridiques ?

« C’est sur la différence entre la personne et la chose que se joue le 21e siècle. »

§ 1. Les candidats à la personnification

Les animaux

Traditionnellement, dans le Code civil, l’animal est un bien appropriable.
Depuis 2015, le Code civil dispose :

Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens.

On constate aujourd’hui la nécessité d’une protection accrue des animaux suite à une évolution sociétale. Ces dernières années : une série d’interdictions pour les animaux détenus à des fins de divertissements (ex : cirques).

Mais plus on protège les animaux, plus leur qualification en tant que bien devient complexe, parce que ce qui traduit la propriété est la maîtrise la plus absolue du propriétaire sur la chose et notamment la possibilité d’en disposer (revente / destruction).

La nature

Idée : il ne faut pas appréhender la nature uniquement dans une logique d’appropriation marchande. Il faudrait alors faire sortir la nature de la qualification de chose pour lui conférer des droits propres en la considérant comme une personne.

Exemple : en Inde, le Gange est considéré comme une personne

Les robots

On assiste aujourd’hui à un développement de l’IA dans une logique de rapprochement avec l’homme.
Faire des robots une personne juridique permettrait une meilleure indemnisation si le robot crée des dommages.

§ 2. Les réticences actuelles

Les réticences d’ordre technique

L’animal et la nature ont des intérêts autonomes, mais on ne peut pas établir leur volonté autonome ; or c’est essentiel pour être une personne juridique. Ça sera donc la volonté de son représentant.

Il devrait également y avoir des gradations décidées par l’homme concernant le statut juridique de tel ou tel animal (ex : chien domestique ≠ souris de laboratoire).

Personnifier un robot ne rendra pas les choses plus simples en ce qui concerne la responsabilité civile. Les robots sont forcément rattachés à une personne (→ la vraie responsable), ce n’est donc pas réellement un problème.
En personnifiant un robot, on oublie qu’elle est une création de l’homme sans vie.

Vers un choix symbolique ?

L’intérêt est d’affirmer leur dignité et de rejeter leur appropriation marchande. Pour cela, on n’est pas obligés de leur offrir le statut juridique d’une personne, qui confère aussi des devoirs.

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