Cameroun : L’accès à la profession de commerçant

Fiche réalisée par Slim J. Nzonteu.

Depuis le 1er janvier 2000, tout commerçant (personne physique et morale) est contraint de se soumettre à l’Acte Uniforme portant Droit Commercial Général (A.U.D.C.G). Toutefois, cet Acte Uniforme ne réglemente pas expressément l’accès à la profession de commerçant, il se contente seulement d’en poser les limites. Dès lors au Cameroun, la Loi n°90/031 du 10 août 1990 réglementant l’accès à ladite profession, laquelle loi reprenant en réalité les dispositions du l’ancien Code de Commerce de 1808, a été maintenue.

I- LE PRINCIPE DU LIBRE ACCES A LA PROFESSION COMMERCIALE

Ce principe signifie que l’accès à la profession de commerçant est libre. Il a été posé depuis le décret d’Allarde de 1791 en son article 9 : « (…) il sera permis à toute personne de faire telle négoce pour exercer telle profession ou métier qu’elle trouvera bon, sous réserve de payer une patente et de se soumettre au règle de police ». A l’analyse de la loi camerounaise de 1990, il ressort que cette liberté concerne d’une part les personnes et les activités qu’elles entreprennent de faire, et d’autre part les modes, les modalités et le cadre géographique d’exercice.

A- La liberté d’accès est relative aux personnes et aux activités
1) Les personnes
Toute personne physique (de sexe masculin ou féminin) ou morale, de nationalité camerounaise ou étrangère est libre d’exercer la profession de commerçant.
2) Les activités
Le commerçant est libre de constituer une entreprise (article 5, Loi de 1990) ; il est aussi libre d’exercer toute activité de production, d’échange de biens et de services.

B- La liberté d’accès est aussi relative aux modes, modalités et cadres géographiques d’exercice de la profession
1) Les modes d’exercice
Le commerçant est libre de fixer leur politique de production, de distribution et de commercialisation de leurs produits. Il est également libre de commercialiser ses produits en gros ou en détails ou des produits similaires, à condition de tenir une comptabilité distincte (article 6, Loi de 1990). Il est enfin libre d’importer ou d’exporter dans le cadre de leur objet social et dans le respect des lois et règlements en vigueur (article 7, Loi de 1990).
2) Les modalités d’exercice
La loi de 1990 dispose que c’est le du pouvoir réglementaire qui fixe les modalités d’exercice de la profession de commerçant. Par exemple, un décret du 22 novembre 1993 définit les conditions d’exercice de la profession d’exportation, de vente en gros, de vente en détail, de commerce sédentaire, de commerce ambulant, de vente à la sauvette, d’exploitation des gargotes, d’exploitation artisanale, etc. Dans le même sens, voir l’article 6 du décret ci-dessus
3) Le cadre géographique
Le commerçant est libre de choisir le site d’implantation de son établissement. Toutefois, une Loi du 8 juillet 1976 impose aux entreprises installées au Cameroun d’y fixer leur siège social.

II- MAIS LE PRINCIPE DU LIBRE ACCES CONNAIT DES LIMITES

Ces limites visent non pas à interdire l’accès à la profession commerciale des individus, mais elles visent surtout à protéger d’abord les commerçants eux-mêmes et ensuite l’intérêt général.

A- La protection des commerçants eux-mêmes ou règles de capacité
Ces règles de capacité visent à protéger les mineurs, la femme mariée à un commerçant et les majeurs incapables.
1) Le cas du mineur non émancipé
Il « ne peut avoir la qualité de commerçant ni effectuer des actes de commerce » : article 7 al.1er de l’A.U.D.C.G. Il ne jouit pas de la capacité civile pour exercer le commerce. Mais tel n’est pas le cas du mineur émancipé, les conditions d’émancipation étant prévues à l’article 476 et suivants du Code Civil camerounais, édition 2000
2) Le cas de la femme mariée à un commerçant
Dans l’ancien Droit camerounais, à l’origine, la femme mariée était totalement incapable. Mais des Lois du 18 février 1938 et du 22 septembre 1942, en leur article 4 sont intervenues plus tard et disposaient que la femme peut être commerçante à condition d’ obtenir l’autorisation préalable de son mari et d’exercer un commerce séparé de celui de son époux.
Aujourd’hui, l’article 7 al.2 de l’A.U.D.C.G a abrogé toutes ces législations nationales et pose seulement l’exigence d’un commerce séparé de celui du mari.
3) Le cas du majeur incapable
On se réfère aux dispositions du Code Civil parce que l’ancien Code de Commerce camerounais et l’Acte Uniforme ne contiennent aucune disposition sur ces personnes. Ainsi, s’il s’agit d’un majeur représenté placé sous-tutelle, il est soumis au régime du mineur non émancipé ; tandis que si c’est un majeur assisté placé sous-curatelle, il peut exercer le commerce à condition d’être continuellement assisté de leur curateur.

B- Protection de l’intérêt général
Les règles y relatives sont les règles d’incompatibilité, les interdictions et déchéances et les autorisations préalables.
1) Les incompatibilités : article 8 et 9 A.U.D.C.G
Il ressort de ces articles La profession de commerçant est incompatible la profession de fonctionnaires, de personnels des collectivités publiques et des entreprises à participation publique, d’officiers ministériels et auxiliaires de justice, d’experts comptables agréés, de commissaires aux comptes de conseils juridiques, et plus généralement de toutes professions dont l’exercice fait l’objet d’une réglementation interdisant le cumul de cette activité avec l’exercice d’une profession commerciale.
2) Les interdictions et déchéances : article 10 et 11 A.U.D.C.G
Les personnes condamnées pour crime ou délit ou à des peines privatives de liberté d’au moins 3 mois et les personnes condamnées, etc sont interdites d’exercer toute activité commerciale. La déchéance quant à elle intervient automatiquement dès le jugement de condamnation, sa durée ne peut être inférieure à 5 ans.
3) Les autorisations
Elles sont requises pour les nationaux au début de l’exploitation d’une activité commerciale et elles portent des appellations différentes mais synonymes : licence d’exploitation, agrément, autorisation, diplôme, etc.
Mais en ce qui concerne les étrangers qui souhaite exercer la profession de commerçant, l’A.U.D.C.G ne traite pas spécialement de leurs cas. Si on se réfère à la législation nationale, on doit décider que l’étranger doit avoir un agrément de l’autorité administrative (le ministre en charge du commerce) et il doit obtenir une carte spéciale de commerçant, distincte de la carte de séjour : voir l’article 9 de la Loi de 1990.

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