Chapitre 9 : Les causes de divorce

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Attention : on ne parle pas ici des motifs du divorce, mais de la cause juridique légale établie à l’article 229 du Code civil.

I – Le divorce par consentement mutuel

Principe : consentement mutuel contractuel.
Exception : consentement mutuel judiciarisé.

A – La volonté mutuelle des époux

Les 2 époux s’entendent sur la rupture du mariage et ses effets (article 229-1 du Code civil).

Cette volonté est soumise à des conditions de fond et de forme.

1) Les conditions de fond

Le consentement doit être sérieux, libre et persistant (article 232 du Code civil).
Il est matérialisé par une convention.

Pour le divorce par consentement mutuel contractuel, l’article 229-3 du Code civil précise que ce consentement ne se présume pas : il doit être explicité clairement dans la convention.

La capacité des 2 époux est requise : les époux ne peuvent pas consentir mutuellement à leur divorce lorsque l’un d’eux est placé sous un régime de protection (article 229-2 du Code civil).

L’objet de la convention est les conséquences du divorce.
La convention est définitive.

2) Les conditions de forme

Le divorce par consentement mutuel obéit à des règles de forme spécifique.

Si les époux sont d’accord pour divorcer, et sur les conséquences du divorce, et qu’il n’y a pas d’enfant mineur qui demande à être entendu, le divorce est totalement judiciarisé.
Il est organisé par l’article 229-2 du Code civil.

Le divorce n’est pas prononcé : tout se passe entre les époux, via leurs avocats respectifs.

Les époux se mettent d’accord sur un projet de convention rédigé par les avocats, qui règle toutes les conséquences du divorce.
C’est un acte sous seeing privé contresigné par l’avocat.

L’article 229-3 alinéa 2 liste ce que la convention doit comporter.

Les avocats adressent ensuite à leurs clients ce projet de convention par lettre recommandée avec AR.
Les époux doivent respecter un délai de réflexion de 15 jours avant de la signer.

Une fois signée par les époux et contresignée par les avocats, la convention est déposée chez un notaire.
Le dépôt auprès du notaire lui donne force exécutoire : c’est à cette date que le mariage est dissous.

La charte signée par les notaires affirme que ceux-ci doivent vérifier que la convention n’heurte pas l’ordre public.
Il semble que le notaire doive vérifier la réalité du consentement mutuel.


Le divorce par consentement mutuel déjudiciarisé n’est pas possible :
> si les enfants du couple ont demandé à être entendus en justice
> si l’un des 2 époux est incapable

Le juge contrôle que la convention élaborée par les époux préserve l’intérêt de la famille et des époux.

Il peut refuser d’homologuer la convention (→ le divorce n’est pas prononcé). Il peut toutefois homologuer les mesures provisoires. La nouvelle convention doit être présentée par les époux dans un délai maximal de 6 mois.

B – Le contrôle de la convention

Dans le divorce par consentement mutuel contractuel, personne ne contrôle le fond de la convention, qui est laissée libre aux époux.

L’avocat assiste.
Le notaire contrôle la forme de la convention et il vérifie que le délai de réflexion de 15 jours est respecté.


Dans le divorce par consentement mutuel judiciaire, l’accord de principe (= fait que les époux veuillent divorcer par DCM) échappe au juge.
→ le juge ne scrute pas les motifs ; il vérifie juste que les 2 époux veulent divorcer

Le contrôle judiciaire s’exerce sur les conditions qui régissent le divorce.
Le juge peut refuser d’homologuer la convention.

  • Peut-on attaquer la convention homologuée sans toucher au divorce ?

    Attaquer une convention = exercer une action en nullité.

    Revient à poser la question : la convention est-elle un contrat ?

    Arrêt de principe, Civ 2, 6 mai 1987 :
    2 époux ont divorcé par consentement mutuel. Le juge a homologué la convention.
    L’un des époux considère que la convention est inéquitable et souhaite l’attaquer sans revenir sur le divorce.
    La Cour énonce que le prononcé du divorce et l’homologation de la convention définitive ont un caractère indissociable.
    → la qualification de jugement (≠ contrat) prédomine

Tronc commun procédural des 3 divorces contentieux

Le législateur veut éviter que les époux n’entrent trop rapidement dans l’engrenage des torts et des griefs, afin de préserver la porte de sortie vers un divorce par consentement mutuel.

Les causes et les conséquences du divorce ont été dissociées, puisque les conséquences du divorce sont aujourd’hui les mêmes quelle que soit la cause du divorce.
C’est l’époux qui introduit l’instance en divorce qui doit indiquer le motif.

Le législateur oblige les avocats à mentionner à leurs clients (dans la demande introductive) qu’ils peuvent recourir à la médiation s’ils ne sont pas d’accord.
→ mode alternatif de règlement des litiges promu par le législateur

Le juge tient compte de ce sur quoi les époux se sont déjà mis d’accord ; par exemple : le lien de résidence de l’enfant, qui habite dans le logement familial…

Le juge peut rejeter la demande si elle est incomplète.
Il peut néanmoins statuer sur des questions importantes (article 253 du Code civil).

S’il ne rejette pas la demande, l’audience d’orientation et de mesures provisoires du divorce se tient (article 254 du Code civil).

II – Le divorce “accepté”

Articles 233 et 234 du Code civil

Le Code civil parle de “divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage”.
En 1975, on parlait de “divorce sur double aveux”.

Les 2 époux forment la demande.
Les époux peuvent choisir le divorce sur demande acceptée à tout moment, ensemble ou à l’initiative de l’un, peu importe les faits ayant conduit à la rupture du mariage.
Une fois que la demande est acceptée, elle n’est plus susceptible de rétractation.

Une fois le divorce accepté par les 2, le juge prononce le divorce.

III – Le divorce pour altération définitive du lien conjugal

Articles 237 et 238 du Code civil

Etre 1975 et la loi du 26 mai 2004, on parle de “divorce pour rupture de la vie commune”.

Il peut être demandé par l’un des époux lorsqu’ils vivent séparés depuis plus d’1 an.
Idée : obtenir le divorce au bout d’1 an de séparation est un droit, auquel ni le conjoint ni le juge ne peuvent s’opposer.

Si une demande reconventionne pour faute est formée, les juges examinent d’abord la demande pour faute.
Si elle est rejetée, le divorce est prononcé pour altération définitive du lien conjugal.

IV – Le divorce pour faute

Le divorce pour faute, prévu par les articles 242 et suivants du Code civil, a une longue histoire.

A – Les faits qui constituent la cause de divorce

Sous l’empire de la loi de 1884, le divorce pour faute ne pouvait être prononcé par le juge que pour l’une de ces 5 fautes :
1- l’adultère ;
2- la condamnation à une peine afflictive et infamante ;
3- excès ;
4- sévices ;
5- injures graves.

Les “injures graves” étaient devenues une sorte de fourre-tout.
La loi de 1975 ne mentionne plus les 5 causes concrètes, mais évoquent simplement une faute.

Le divorce peut être demandé par l’un des époux lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune.
– Article 242 du Code civil

On distingue 3 conditions :

  1. L’imputabilité d’un fait personnel au conjoint ;
  1. Une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage ;
  1. Cette violation rend intolérable le maintien de la vie commune.

Idée : dans le mariage, il y a des obligations juridiques (vie commune, aide et assistance, …), et aussi des devoirs plus moraux que juridiques.

Avant 1975, l’adultère était une cause péremptoire (= automatique) de divorce : si l’adultère était prouvé, le juge devait prononcer le divorce, car l’adultère était considéré comme un délit pénal.
Depuis 1975, l’adultère ne constitue plus un délit pénal, mais une simple faute civile. Le juge peut condamner l’adultère pour faute, mais il faut aussi considérer que ça n’est pas une faute.

B – Les faits qui tendent à neutraliser la cause de divorce

1) La réconciliation

L’article 244 du Code civil dispose que “la réconciliation des époux intervenue depuis les faits allégués empêche de les invoquer comme cause de divorce”.
→ si les époux se sont réconciliés, le juge ne prononce pas le divorce pour faute, car la réconciliation a neutralisé la cause de divorce

La réconciliation est une fin de non-recevoir. Elle n’a d’effet que sur les fautes antérieures.

2) Le partage des torts

Article 245 du Code civil :

  1. Si A a demandé contre B le divorce pour faute, mais que A a lui-même commis des fautes : le juge examine quand même la demande, mais il peut estimer que les fautes qu’il a commises enlève aux faits qu’il reproche à son conjoint le caractère de gravité qui en aurait fait des fautes.
    Exemple : A reproche à B de le tromper, mais si B trompe A, c’est parce que A est odieux.
  1. S’il y a une faute des 2 côtés, mais qu’il y a 2 demandes (une demande principale pour faute et une demande reconventionnelle pour faute) : le divorce est prononcé aux torts partagés.
  1. Même en l’absence de demande reconventionnelle, le juge peut se saisir d’office des fautes du demandeur révélées pendant la procédure pour prononcer le divorce aux torts partagés.

C – La question de la preuve

La faute est un fait juridique ; la preuve en est donc libre (article 259 du Code civil).
Exception : les descendants des époux ne peuvent pas être entendus comme témoins pour témoigner des fautes de l’autre conjoint.

Article 259-1 : “un époux ne peut verser aux débats un élément de preuve qu’il aurait obtenu par violence ou fraude”.

Civ 1, 17 juin 2009, n°07-21.796 : la cour d’appel déboute une femme demandant le divorce aux torts de son mari en se fondant sur des SMS reçus sur son téléphone professionnel prouvant l’adultère, en énonçant que les SMS sont confidentiels ; l’arrêt est cassé car les SMS n’ont pas été obtenus par violence ou par fraude.

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