Introduction générale au cours de Finances publiques

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Les finances publiques nous permettent de comprendre comment un État peut vivre.
Elles sont la traduction d’une volonté politique en une action concrète.

En France, toute politique publique a une traduction financière, en grande partie retracée dans 2 textes :
la loi de finances initiale (LFI) ;
la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS).
→ Traductions juridiques d’une politique menée par l’exécutif et acceptée par le législatif.

Les finances publiques sont essentielles pour comprendre le fonctionnement de l’État.

Le déficit est, sur une année, la différence négative entre les recettes et les dépenses.
La
dette est le cumul, au fur et à mesure des années, d’un déficit qui se reproduit.
La dette et le déficit français contraignent l’action publique parce que :

  1. L’État ne peut pas vivre indéfiniment au-dessus de ses moyens : il doit remboursera la dette qu’il a contractée.
    S’il n’est plus considéré comme étant en capacité de la rembourser, on ne lui prêtera plus.
    Ce n’est pas la quantité de dette qui est retenue : par exemple, le Japon a une dette très élevée mais est considéré comme apte à la rembourser, tandis que la Grèce n’avait pas une dette très importante mais était considéré comme insolvable.
  1. Plus on est endetté, plus on est soumis aux taux d’intérêt.
    L’État français dépenserait environ 60 milliards d’euros par an pour le remboursement des intérêts de la dette.
    Plus un État est endetté, moins il a de capacité de marge de manœuvre pour mener à bien les politiques publiques.

On peut aussi s’interroger sur la différence entre la bonne et la mauvaise dette.
Idée qui commence à imprégner au niveau européen : il ne faut pas s’endetter structurellement (= il ne faut pas qu’un État vive au-dessus de ses moyens pour vivre normalement).
Pour cela, l’État ne doit pas être en déficit.

Cela n’empêche pas, au niveau européen, de s’endetter pour investir, sachant qu’au moyen terme il y aura un retour d’investissement pour l’État qui permettra de rembourser cet endettement.
Par exemple, 4 milliards ont été investis pour rénover les bâtiments publics ; sur le moyen terme, cela rapportera bien plus en raison de la réduction des dépenses de chauffage / électricité / …

L’Union européenne est un acteur fondamental dans les finances publiques, en grande partie en raison de la monnaie unique, qui fait qu’il est essentiel d’avoir une convergence entre les États du point de vue de leurs finances.
L’UE pose un cadre juridique aux États, qui est plus ou moins strict selon si l’État est dans la zone euro ou non.

Exemple de critères de convergence, qui doivent permettre aux États de converger vers des finances publiques saines (= soutenables financièrement) :
– règle des 3% de déficit annuel ;
– règle de la dette <60%/PIB.

On constate actuellement un bouleversement au niveau européen, avec un passage d’une UE principalement sanctionnatrice à une UE principalement accompagnatrice.
L’emprunt commun européen post-Covid de 750 milliards d’euros a permis un partage des risques.
L’Union européenne est considérée comme plus sûre financièrement et emprunte donc à des taux que les États ne pourraient jamais espérer avoir.
Un impôt européen permettant de rembourser ces 750 milliards d’euros pourrait également voir le jour.
Les critères de convergence ont également été levés pendant le Covid : l’UE a accepté que les États s’endettent pour répondre à la crise.

Cette matière correspond à du droit constitutionnel appliqué : l’adoption du budget (la loi de finances initiale – LFI) est probablement le texte qui est le plus soumis aux caractéristiques de la 5ème République.
En raison de la rationalisation du parlement, celui-ci est enserré dans des procédures qui entravent sa capacité d’action, pour construire, discuter, voter et contrôler l’exécution du budget.

Par exemple, l’article 40 de la Constitution empêche les parlementaires de prévoir de nouvelles dépenses ou de diminuer les recettes par un amendement ou une proposition de loi.
Ceux-ci peuvent uniquement prévoir de nouvelles recettes en prévoyant une compensation (ex : augmenter la taxe sur le tabac).
Le gouvernement peut ensuite décider de “lever le gage”, c’est-à-dire retirer l’augmentation de la taxe sur le tabac.

La Loi organique relative aux finances publiques (LOLF) a été adoptée le 28 juin 2001.
Elle tente de revaloriser le Parlement, en accentuant ses capacités de contrôle.

La Loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques a été adoptée en 2021.
Elle complète la LOLF avec comme objectif de consolider le rôle central du Parlement dans l’examen et le contrôle des finances publiques.

L’argent public doit être bien utilisé.
Pour s’assurer de son utilisation performante, il faut passer par l’évaluation des politiques publiques : c’était l’objectif de la LOLF, qui voulait développer le contrôle parlementaire de l’action du gouvernement en matière financière.
Malheureusement, le moment du contrôle n’a pas intéressé les parlementaires, qui ne s’en sont pas saisis.

Les finances publiques s’apprécient sur le long terme.
Par exemple, pour la réforme des retraites, il faut réussir à calculer pour les 60 ans à venir les conséquences financières d’une réforme.
L’État indique chaque année dans ses comptes quelles seront les dépenses et recettes de l’année suivante.

Aujourd’hui, on ne s’intéresse plus seulement au coût d’une mesure, mais aussi à son influence positive ou négative sur la lutte contre le dérèglement climatique et la préservation de la biodiversité.
La performance n’est donc plus seulement financière, mais aussi écologique (green budget).

Les finances publiques concernent les finances de l’État (”le budget”), mais aussi les finances des organismes sociaux (la sécurité sociale → LFSS), et les finances locales.

I – Le pouvoir budgétaire : la dimension politique des finances publiques

Plus l’État est interventionniste, plus les finances publiques sont importantes.
Si certains considèrent que la France est un État néolibéral, les finances publiques nous montrent qu’elle est manifestement interventionniste : un État libéral voudrait que les finances publiques soient à l’équilibre et que l’État influence le moins possible la vie quotidienne des entreprises ou des particuliers.

Le pouvoir budgétaire est l’expression la plus éclatante du pouvoir politique.
Il prend ses origines dans le principe fondamental du consentement à l’impôt.

A – Le consentement à l’impôt au fondement du système représentatif

Il faut voir le principe du consentement à l’impôt comme la clé qui doit permettre de lire les finances publiques : il est à l’origine même des régimes parlementaires et donc du système représentatif.

La notion de consentement à l’impôt apparaît en Grande-Bretagne au 13ème siècle, avec la Magna Carta (1215) : pour la première fois, un texte impose que le roi ne pourra lever l’impôt qu’après le consentement des représentants des contribuables.

Ce principe est développé dans le Bill of Rights (1689) qui précise les conditions du consentement à l’impôt : pour qu’il y ait consentement à l’impôt, il faut que ce consentement soit périodique (→ annuel) et que l’utilisation de l’impôt soit réalisé au regard du consentement qui a été donné.

Ce principe a été repris par les révolutionnaires de 1789, qui ont inscrit ce principe aux articles 13 et 14 de la DDHC :

(13) Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.

(14) Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée.

La quotité est le taux des impositions.
L’assiette est la matière sur laquelle va porter l’impôt.

Ce principe est fondamental en matière de finances publiques : il est constitutionnel, et c’est l’une des raisons d’être de la Révolution française.

Depuis la décision Conseil constitutionnel, 1971, Liberté d’association, ce principe du consentement à l’impôt a valeur constitutionnelle.
Il interdit les impôts perpétuels et oblige à ce que l’utilisation de l’impôt soit faite suivant le consentement qui a été donné.

Ce principe a été fortement bousculé par la rationalisation du Parlement, qui limite fortement le consentement à l’impôt.
L’article 11 de la Constitution implique qu’il ne peut pas en principe y avoir de référendum sur la matière fiscale.
Le consentement à l’impôt n’est pas un droit ou une liberté invocable en QPC, alors même qu’il est au fondement du régime parlementaire et qu’il est historiquement le premier des droits reconnus aux individus.

B – Un levier de modernisation de l’action publique

Les finances publiques ont la particularité d’être à la fois l’élément permettant à l’État de fonctionner grâce à ses recettes et ses dépenses, mais aussi un moyen à disposition de l’État pour modifier son fonctionnement.

Pour Jean-Jacques Rousseau, les finances publiques sont “le sang de l’État” : ce sont elles qui permettent de faire fonctionner l’ensemble des organes de l’État.

Elles participent aussi de la définition et de la transformation de l’État, puisqu’elles nous permettent de comprendre comment il fonctionne et quels sont ses choix.
→ Les finances publiques permettent de déterminer une politique publique.

Historiquement, les finances publiques voulaient que l’État soit neutre et donc qu’il interfère le moins possible sur la vie économique.
Aujourd’hui, à l’inverse, on considère les finances publiques comme un moyen d’arriver à ses fins : elles traduisent une volonté publique.

La LOLF introduit en droit français l’idée de new public management, qui est l’idée suivant laquelle l’État et les personnes publiques doivent avoir une approche performante de leurs finances.
Depuis la LOLF, les lois de finances initiales qui sont votées avant leur année d’application précisent quels objectifs chaque dépense doit remplir, ce qui permettra de voir si ces objectifs ont été remplis lorsqu’on examine la loi de règlement.

Ce lien temporel est au cœur de la transformation de l’État.
Concept : chaînage vertueux : les parlementaires qui votent des autorisations de dépense ont en principe la charge de contrôle que ces dépenses ont rempli leurs objectifs.

Objectif de la LOLF : amener l’État à dépenser moins, pour éviter que l’argent des contribuables ne soit mal utilisé.
Cet objectif très important a en partie échoué, parce qu’il n’a pas véritablement réussi à conduire l’État à avoir une meilleure gestion.

Le budget est un acte descriptif, qui va présenter toutes les obligations de recettes et toutes les autorisations de dépenses.
La
loi de finances est un texte adopté annuellement, qui autorise juridiquement l’État à percevoir des recettes et à procéder à des dépenses.
→ ”Le budget décrit, la loi de finances prescrit.”

La loi de finances est un acte de prévision : elle prévoit, mais elle ne peut pas déterminer à l’avance quelles seront spécifiquement toutes les recettes et toutes les dépenses.
Le montant des recettes prévisionnelles dépend entre autres des indicateurs économiques ; par exemple, si le chômage augmente, les recettes diminuent et les dépenses augmentent.

La loi de finances peut être adaptée et modifiée avec des lois de finances rectificatives, qui viennent en cours d’année modifier les autorisations de dépenses et les autorisations de percevoir des recettes.

II – Les enjeux des finances publiques

A – L’extension du champ des finances publiques

Les finances publiques renvoient d’abord aux recettes et aux dépenses publiques, mais pas seulement.
La question monétaire et la question de l’emprunt et de son remboursement sont désormais intégrées aux finances publiques, car elles constituent des leviers d’action de l’État, qui ont une influence sur les finances.

Les finances publiques ont intégré de manière autonome les finances locales et les finances sociales, en raison du phénomène de décentralisation.
Le développement du principe constitutionnel d’autonomie financière des collectivités territoriales (article 72-2 de la Constitution) a entraîné la création d’un droit des finances locales.

Les collectivités territoriales sont aujourd’hui pris en tenaille par un double jeu de l’État, qui a tendance à limiter les ressources qu’il leur alloue.
Exemple : suppression de la taxe d’habitation pour un montant fixe.
Elles sont soumises à un principe d’équilibre budgétaire bien plus strict que celui auquel est soumis l’État : elles ne peuvent pas emprunter pour financer leurs gestions courantes.

Les finances publiques prennent aussi en compte les finances sociales, dont les organismes de sécurité sociale (vieillesse, maladie, chômage, famille).
Ces organismes de sécurité sociale sont maintenant présentés dans un texte spécifique : la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), votée pour 1 an.
La LFSS a vu le jour dans les années 1990 pour isoler toute la politique sociale des autres politiques de l’État.
Idée : la politique sociale doit être financée par des ressources propres.

Ces LFSS suivent leurs propres règles, établies par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS), adoptée en 2005.

B – L’État libéral : la période classique

Cette période s’étend environ de 1814 à 1914.
La fin de l’empire et le développement du parlementarisme (avec la Charte) ont pour conséquence le développement d’un droit des finances publiques parlementaires.

3 principes : le budget doit être neutre, limité et équilibré.

L’État ne doit pas influencer l’économie ; il doit rester cantonné à ses seules compétences régaliennes (armée, police, justice).
Il faut que la pression fiscale soit la plus faible possible, pour ne pas priver les personnes privées de leur argent et de leur capacité d’action.

Le budget de l’État est donc limité. Les finances publiques ne prennent en compte que des montants relativement faibles.

Le budget doit être neutre.
L’État ne prélève que les recettes nécessaires pour couvrir les dépenses. L’emprunt est réservé à des dépenses exceptionnelles.

Le budget de l’État est équilibré dans les 2 sens : il ne faut pas de déficit, et il ne faut surtout pas d’excédent, puisque s’il y a un excédent cela veut dire qu’on a retiré aux personnes privées de l’argent non nécessaire.

C – L’État interventionniste : la période moderne

⚠️
Les États ne sont jamais purement libéraux ou purement interventionnistes.
Aujourd’hui, l’État français est plutôt interventionniste, mais l’Union européenne a tendance à limiter la capacité interventionniste de ses États membres.

La période moderne s’illustre par une remise en cause de la suprématie parlementaire en matière de finances publiques.
Exemple : entre mars et avril 2020, les parlementaires ont voté presque sans discuter une loi de finances rectificative.

Le budget n’est plus neutre : il est aujourd’hui compris comme un moyen pour l’État de mettre en place une stratégie visant à encadrer les acteurs privés.
Exemple : si on taxe très fortement le sucre, cela incite les industriels à limiter la quantité de sucre qu’ils utilisent dans leurs produits.

Le budget n’est plus limité : la dette de la France est passée de 30% du PIB en 1950 à 120% actuellement, parce que l’État intervient pour rééquilibrer les situations sociales.

Le budget n’est plus équilibré : l’endettement se creuse par la renonciation au principe d’équilibre, même si le droit de l’UE tente d’influencer les États pour qu’ils aient une meilleure gestion de leurs finances publiques.

III – Les contraintes contemporaines des finances publiques

A – Les contraintes dans la politique budgétaire

1) Les fonctions de la politique budgétaire

La LOLF a redécoupé le budget, qui n’est plus divisé en ministères, mais en grandes politiques publiques spécifiques auxquelles sont attribuées des financement.

Outre la LOLF, les fonctions de la politique budgétaire sont également influencées par l’interventionnisme économique, qui conduit à augmenter massivement le budget de l’État, qui est passé de 235 milliards d’euros en 2000 à 330 en 2019 (soit 1/3 d’augmentation en 19 ans).
Ces 330 milliards d’euros correspondent au seul budget de l’État et n’incluent pas le financement de la sécurité sociale !

Cette augmentation est due principalement à l’augmentation de 2 éléments :

  1. Le progrès de la démocratie : vivre en démocratie coûte cher – près de 10% du budget de l’État permet de faire vivre la démocratie ;
  1. Le développement du rôle de l’État (passage des finances publiques classiques aux finances publiques modernes).

Aujourd’hui, les 2 postes qui justifient une augmentation du budget de l’État sont la surenchère électorale et l’imprévoyance financière.
La LOLF a pour objectif de limiter cette dernière.

2) La réduction des marges de manœuvre pour l’État

La marge de manœuvre de l’État s’est réduite sous l’influence de 2 facteurs :

  1. Les dépenses à caractère permanent, qui sont les dépenses que l’on doit obligatoirement faire chaque année.

    Sur ~350 milliards d’euros de budget de l’État, on retrouve chaque année des postes de dépenses obligatoires tels que les intérêts de la dette (qui varient entre 30 et 50 milliards d’euros en fonction des taux d’intérêt), les retraites des agents publics…

  1. La contrainte des organisations internationales et de l’Union européenne.

    Certaines organisations internationales, telles que le FMI, la BIRD ou l’OCDE, imposent aux États de fournir des éléments statistiques sur leurs finances, et peuvent contraindre les États à organiser des programmes visant à réduire leurs finances publiques.

    Par exemple, durant la crise de 2008, la Grèce a été contrainte par le FMI à réduire ses finances publiques, par l’intermédiaire du versement d’une somme d’argent.

    Les contraintes européennes, quant à elles, n’ont cessé de se développer en matière financière.
    L’existence d’une monnaie commune rend indispensable de faire en sorte que les différents États aient des finances publiques soutenables.
    L’Union européenne est avant tout une union économique, donc il y a une interdépendance économique et financière entre les différents États européens.

3) Le défi (irréaliste ?) de la maîtrise du déficit budgétaire

Cette maîtrise du déficit public s’impose progressivement depuis les années 1970 (= depuis que les dépenses publiques sont supérieures aux recettes publiques).
La question qui se pose aujourd’hui n’est pas seulement celle de la réduction de la dette, mais plus largement celle de la soutenabilité de la dette.

Certains États font l’objet d’un endettement excessif mais n’ont pas de difficultés pour vivre avec cet endettement.
L’endettement du Japon s’élève à 260% de son PIB, mais il est considéré comme un État particulièrement soutenable financièrement, parce que la dette est en grande partie détenue par les japonais.

Ce n’est donc pas tant l’endettement qui pose problème, que la soutenabilité de cet endettement (= la capacité pour un État de rembourser sa dette en empruntant à nouveau).
La soutenabilité dépend de la vision que les créanciers ont de l’État.

L’Union européenne tente d’encadrer la dette publique et le déficit, avec comme objectif d’arriver à 60% d’endettement public.
Pour ce faire, il faudrait que les États soient en excédent budgétaire pendant plusieurs années, c’est-à-dire qu’ils mobilisent des recettes publiques qui ne sont pas indispensables en soit.

L’excédent budgétaire est un vrai problème d’un point de vue pratique et théorique.
En effet, si un État gagne trop d’argent, il a pris trop d’argent aux particuliers et aux entreprises et a donc limité leur capacité à investir.
Un État en excédent budgétaire est donc généralement appréhendé comme un mauvais gestionnaire public.

L’Union européenne est plus contraignante qu’avant, parce qu’elle met en avant un nouveau critère : il ne faut pas avoir un déficit structurel supérieur à 0,5% du PIB.
Le déficit structurel ne prend en compte que le train de vie de l’État, et non les dépenses liées à la conjoncture économique (crise énergétique, inflation…).

Si un État ne respecte pas les critères, l’Union européenne peut engager une procédure de déficit public excessif, qui permet de limiter les sommes d’argent versées à cet État ou de lui infliger des amendes punitives.
Cette procédure avait été envisagée contre l’Italie en 2019, et avait été levée lorsque l’Italie avait accepté de modifier son projet de budget.
Elle pose certaines difficultés, ce qui fait que l’Union européenne s’oriente plutôt aujourd’hui vers l’accompagnement financier des États, principalement en rachetant de la dette des États par le mécanisme de solidarité européen.

La Hongrie et la Pologne ont vu un grand nombre de leurs subventions européennes mises en pause tant qu’elles ne respecteront pas l’État de droit.
Les finances publiques ne servent donc plus seulement à sanctionner les États qui ne respectent pas les règles de déficit public.

Cet objectif semble peut-être irréaliste, parce que les crises à répétition (subprimes en 2008, dette souveraine en 2010, Covid en 2020…) nécessitent des dépenses publiques.
Ces crises ont conduit à l’Union européenne à lever provisoirement les critères de limitation de la dette et du déficit.

B – Les contraintes dans la politique monétaire

La politique monétaire est traditionnellement appréhendée comme l’expression même de la souveraineté d’un État : il dispose de sa monnaie en produisant des pièces et des billets.
La monnaie constitue un levier qui permet aux États d’influencer l’économie, mais aussi d’influencer sur les marchés financiers et sur la dette.

Traditionnellement, la monnaie et la politique monétaire sont gérés par une banque centrale nationale.
Depuis la mise en place de la CEE (1957), la politique monétaire échappe de plus en plus aux États.

En 1957, l’union est exclusivement économique, et non monétaire.
En 1972, le Serpent monétaire européen (SME) est créé pour limiter la marge de manœuvre monétaire des États : par rapport à un taux qui est fixé, la monnaie de chaque État ne peut pas fluctuer de plus de 2,25%.
Objectif : éviter que les monnaies ne soient complètement dévaluées les unes par rapport aux autres, pour éviter une concurrence monétaire entre les États et pour harmoniser l’économie entre ces États.

En 1978, on accentue la convergence monétaire avec l’adoption du Système monétaire européen (aussi SME, remplace le Serpent).
En 1986, l’Acte unique européen pose le principe suivant lequel la convergence des politiques économiques et monétaires est nécessaire pour le développement ultérieur de la communauté.

C’est avec le Traité de Maastricht de 1992 que l’idée d’une monnaie unique prend forme.
Cependant, une monnaie unique nécessite une convergence entre les États : avant d’avoir la même monnaie, encore faut-il s’assurer que tous les États qui vont l’adopter sont fiables financièrement.
Il faut également harmoniser dans une certaine mesure les prix et le niveau de la vie entre les différents États.

En 1998, l’Union pose la liste des 11 États qui peuvent, au regard de cette convergence, adopter cette monnaie commune.
La Banque centrale européenne, place à la tête des banques centrales nationales, est chargée de déterminer la politique monétaire de l’Union. Elle dispose seule de la compétence de créer des billets.
Elle est indépendante des autres institutions de l’UE.
→ Les États perdent leurs marges de manœuvre en matière monétaire. Ils ne peuvent plus influencer leurs finances publiques par la gestion de leur monnaie.

Si les États ont ainsi choisi de perdre en souveraineté financière, c’est parce que cela leur a apporté plus de stabilité, un marché économique plus large et des relations apaisées avec leurs voisins.

IV – Les finances publiques et les crises

La crise de 2007-2008, qui commence aux États-Unis avec les subprimes, repose principalement sur une bulle spéculative qui concernait des crédits à risque.
Elle s’accentue en 2008 avec la faillite de banques américaines comme Lehman Brothers, qui va provoquer un effondrement boursier qui contraint les États à dépenser de l’argent pour sauver les banques.

Cette crise a une double influence : les États augmentent les dépenses pour sauver leurs économies, et elle engendre une récession qui diminue les recettes des États.

Elle s’est poursuivie en 2009-2010 avec la crise grecque, lorsque la Grèce s’est retrouvée dans l’incapacité de rembourser ses créanciers.

Ces crises engendrent au niveau européen un mouvement de renforcement pesant sur les États et leurs finances publiques.
En 2011, l’Union européenne modifie ce qui avait été établi en 1997 dans le Pacte de stabilité et de croissance (PSC), pour accroître le contrôle des finances des États membres. Pour cela, elle adopte le Six-pack, qui augmente le contrôle et les sanctions qu’elle peut prononcer contre les États membres.

En 2012, le Pacte budgétaire européen (TSCG) pose la règle d’or budgétaire, qui s’apparente au principe d’équilibre dans les finances des États.

Ce TSCG est traduit en droit français par la loi organique relative à la programme et à la gouvernance des finances publiques, qui crée le Haut Conseil des finances publiques.
Ce dernier est rattaché à la Cour de comptes et joue un rôle fondamental dans l’évaluation de la conjoncture économique.
Il rend des avis sur le cadre économique sur lequel se fonde l’État pour créer son budget.
Il transmet à l’Union européenne un avis sur la sincérité du projet de loi de finances et un avis qui détermine si le projet de loi de finances a des chances de s’appliquer tel qu’il est prévu.

Ce premier mouvement issu des crises des années 2010 vise ainsi à contraindre et à limiter les États.
On distingue un second mouvement d’aide aux États européens, qui prend 2 formes :

  1. Le mécanisme européen de stabilité (MES) est chargé de racheter la dette des États membres.
    Il vise à éviter une mainmise de puissances étrangères sur les infrastructures européennes ; en effet, pour respecter les contraintes européennes, certains pays comme la Grèce (port du Pirée) ou l’Italie ont dû vendre leurs biens à des puissances étrangères.
  1. Un mouvement d’endettement européen : lors de la crise du Covid, l’UE s’est endettée au nom et pour le compte des États à hauteur de 750 milliards d’euros, divisés en 2 parts égales :
    1. Une première part sous forme de prêts : l’UE prête de l’argent aux États membres.
      Cela leur permet de disposer de taux d’intérêts très avantageux qu’ils n’auraient pas eu seuls.
    1. Une seconde part sous forme de dons.
      Cet argent donné sans contrepartie permet une meilleure solidarité entre les États.
      Ces sommes versées doivent être utilisées afin de lutter contre le dérèglement climatique et pour la préservation de la biodiversité.
      Le remboursement se fera par des impôts ayant une dimension européenne.

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