Chapitre 2 : La nullité du mariage

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La nullité du mariage est de nature judiciaire.
Elle détruit le lien matrimonial, tout en respectant l’indissolubilité du mariage à laquelle le divorce s’attaque.

Annuler un mariage revient à dire qu’il ne s’est pas formé.

Intérêt de la nullité : quand on est moralement contre le divorce.
On parle de “divorce des catholiques”.

Il s’agit d’une sanction civile (pas pénale ni administrative).
Elle résulte soit de l’absence, soit de l’imperfection de l’une des conditions requises pour la formation du lien.

I – Causes et fins de non-recevoir

A – Les causes

Les causes de l’annulation se conçoivent par hypothèse des faits de la formation du mariage.
≠ les causes du divorce ne se conçoivent qu’une fois le mariage formé

Autre distinction fondamentale :
Nullité relative : les faits à l’origine de la nullité protègent l’intérêt d’un des époux.

Nullité absolue : les faits à l’origine de la nullité portent atteinte à l’intérêt de la société ou à l’ordre public.

Liste des causes de nullité absolue :

  • Défaut d’âge nuptial
  • Défaut de consentement matrimonial
    et ce qui y est assimilé ; ex : mariage blanc (faux consentement)
  • Absence d’un époux lors de la célébration
  • Polygamie
  • Inceste
  • Défaut de célébration publique
  • Jusqu’à la loi du 17 mai 2013 : concordance des sexes

Liste des causes de nullité relative :

  • Vice de consentement (erreur et violence)
  • Mariage contracté par un mineur sans autorisation familiale

Il y a beaucoup plus de causes de nullité absolue.

Remarque : on pourrait hésiter sur le classement de la démence d’un des époux au moment de la célébration du mariage.
Cause de nullité absolue ? (assimilation au fait qu’il n’y ait pas consentement).
Mais l’ordre public n’a pas été atteint.

Le ministère public peut demander la nullité du mariage pour violence.

On pourrait avoir l’impression que les vices du consentement (erreur et violence, prévus par l’article 180 du Code civil) sont une cause de nullité absolue, mais il s’agit d’une cause de nullité relative, parce que tout intéressé ne peut pas demander la nullité du mariage pour ce motif.

B – Les fins de non-recevoir

On parle de fin de non-recevoir quand un plaideur invoque un argument qui a pour résultat que le juge n’examinera pas la demande au fond.
Le juge s’intéresse d’abord à si la demande est recevable, puis à si elle est bien fondée.

En matière d’actes juridiques (manifestation de volonté qui produit des effets de droit), les nullités relatives peuvent être couvertes par une confirmation, contrairement aux nullités absolues qui ne le peuvent pas.
→ en matière de nullité relative, le juge peut dire “non, cette demande n’est pas recevable” parce que la nullité a été réparée car la volonté des époux s’est exprimée autrement
→ les nullités relatives sont donc susceptibles d’être réparées

C – La prescription

La prescription est la consolidation d’une situation juridique par l’écoulement du temps.

Jusqu’au 17 juin 2008 (loi unifiant les délais de prescription), les nullités absolues se prescrivaient par 30 ans et les nullités relatives par 5 ans.

L’article 184 du Code civil est le siège des nullités absolues.
Il dispose qu’il existe un délai de 30 ans en matière de nullité absolue des mariages.

Idée : le mariage est une institution ; lorsqu’une des conditions de formation de celle-ci n’a pas été respectée et qu’elle touche à un élément fondamental du mariage, il faut pouvoir attaquer ce mariage pendant longtemps.

II – Procédure

Le droit commun des procès civils s’applique pour les actions en nullité d’un mariage.
Le tribunal judiciaire est compétent ; il statue collégialement.

Ne peut agir en nullité relative que l’époux qui est protégé par la cause de nullité en question (puisqu’elle est relative à sa personne).
→ l’époux dont le consentement a été vicié, trompé sur les qualités essentielles, violenté, mineur, etc.

Nullité absolue : la demande peut être formée par tout intéressé (article 184 du Code civil).
Même l’époux bigame peut attaquer le mariage !
Exemple : les parents, les créanciers, etc.

III – Effets de la nullité

A – La situation des enfants

La réforme de 1972 modifie l’article 202 du Code civil, en énonçant que peu importe que les époux aient été de bonne ou de mauvaise foi, le mariage produit ses effets à l’égard des enfants.
Cela signifie concrètement que le mariage n’est pas dissous à la racine → les enfants sont juridiquement parlant des enfants divorcés, on ne considère pas à leur égard que le mariage n’a pas eu lieu.

B – La situation des époux

Ici, le critère est celui de la bonne ou de la mauvaise foi.
Il existe 2 possibilités :
1- l’un peut avoir été de mauvaise foi
2- les deux peuvent avoir été de mauvaise foi

Si les 2 ont été de mauvaise foi, alors le mariage est annulé au sens plein.
annulation rétroactive du mariage
Non seulement il cesse de produire effet après l’annulation, mais les effets qu’il a pu produire avant le jugement d’annulation sont effacés.
Le mariage est considéré comme n’ayant produit aucun effet.

Si l’un ou les deux ont été de bonne foi, on applique la théorie du mariage putatif (= supposé).
Le mariage est annulé pour l’avenir, pas pour le passé.
Les effets qu’il a pu produire jusqu’au jugement d’annulation demeurent.

La bonne foi est présumée en droit (article 2274 du Code civil : “La bonne foi est toujours présumée, et c’est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver”).

Si un seul époux est de bonne foi, le droit ne maintient pas les effets antérieurs au bénéfice de l’époux de mauvaise foi.

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