Méthodologie : la dissertation juridique (licence de droit)

Fiche rédigée par Boubbo.

La dissertation juridique est l’exposé logique d’un sujet juridique sous forme écrite.

Quels sont les qualités attendues d’un tel exercice ?
Des connaissances clairement exprimées, un effort de démonstration et de construction. Il n’y a pas de dissertation sans plan.

Cette tâche peut s’accomplir en trois étapes successives.

I – PREPARATION

L’objectif consiste à déterminer le sens et les limites du sujet, pour éviter le fameux « hors sujet ». Il convient donc de dresser un inventaire complet des éléments qui peuvent entrer dans le sujet.

  1. Commencer par lire attentivement le sujet et y réfléchir. S’il est court, un conseil : recopier le sujet. En souligner les mots-clés. Au besoin, en rechercher la définition dans un dictionnaire.
  2. Établir une liste des points à traiter.
  3. Confronter ces points au sujet. Cela permet de distinguer ceux qui sont secondaires de ceux qui sont au contraire primordiaux.
  4. Détailler le contenu des rubriques correspondant aux points à traiter.

La recherche s’effectuera dans le cours, le code, les ouvrages, les recueils, les périodiques… et, le jour de l’examen, dans ses souvenirs !!!

II – CONSTRUCTION

Une dissertation est d’abord un plan, dont le contenu doit être précisé et qu’il convient de savoir introduire. Il est ainsi indispensable de bâtir un plan détaillé et de dessiner les phases de l’introduction.

1. Le plan

Le plan est la condition sine qua non de la clarté de l’exposé. Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement (et les mots pour le dire arrivent aisément !). Le lecteur est censé tout ignorer du sujet.

Le plan doit toujours résulter du sujet. En effet, même lorsque le sujet n’est pas formulé sous une forme interrogative, il est nécessaire de le concevoir comme une question à résoudre. En conséquence, il faut que la dissertation concerne la réponse à cette question, une réponse que le plan doit contribuer à faire immédiatement apparaître aux yeux du lecteur. Une dissertation est une démonstration. Les développements doivent être rédigés de manière logique, rigoureuse et rationnelle : chaque question traitée doit résulter de la précédente, par l’effet d’une progression insensible du raisonnement, étape par étape.

La dissertation juridique se divise en principe en deux parties proportionnées : un exposé bien construit contient des parties d’importance comparable.

Pourquoi choisir un plan en deux parties ? C’est une solution qu’impose la logique juridique. Le système juridique français, très cartésien, est construit tout entier autour de distinctions binaires (le Droit objectif, le droits subjectifs ; les biens meubles ou immeubles, corporels ou incorporels, les personnes physiques ou morales ….). Or, il est évident que l’on ne peut se mouvoir correctement au sein d’un système donné qu’en en respectant la logique interne.

De plus, c’est une condition de clarté et de discipline de la pensée. Dix parties révèlent une paresse intellectuelle : c’est une solution de facilité. Se contraindre à exposer toujours un sujet en deux parties, c’est s’obliger à un effort de synthèse conforme à la logique juridique.

Pour schématiser il existe deux types de plans :

+ le plan « bateau » : conditions, effets ; principe, exceptions ; nature, régime ; exposé du principe, application du principe ; prévention, répression, etc ….

+ Le plan « d’idées ».

Dans les deux cas, le plan exige des parties et des sous-parties qui se répondent : des parties (et des sous-parties) qui se complètent (exposé de la théorie, critique de la théorie) ou qui s’opposent (domaine étendu, effets limités).

Traditionnellement, les passages les plus importants (s’agissant de leur intérêt) doivent figurer dans le B) de la 1ère partie et le A de la seconde. Le B) de la seconde partie est d’importance secondaire. On n’aborde pas de développements substantiels.

Il convient par conséquent de classer les sous-parties de la manière suivante (en partant de celle qui est essentielle) : B du I, A du II, A du I, B du II.

Les intitulés de parties doivent être brefs et clairs, reprenant si possible, l’intitulé du sujet en tout ou en partie.

Exemple : « La théorie de … »

I : « Exposé de la théorie de …. »

II : « Application de la théorie de …. »

Il faut à tout prix éviter le hors sujet, vice rédhibitoire de la dissertation.

Exemple : on évitera pour un sujet « la notion de … », de répondre par :

I : La notion

II : les effets.

Il est clair que toute la seconde partie sera hors sujet, donc fausse.

2. L’introduction

L’introduction est essentielle. Elle est inhérente à « l’esprit » même de la dissertation. Si tout sujet est une question appelant une réponse, c’est dès l’introduction que cette réponse doit être apportée, car c’est là le point le plus important que le lecteur veut connaître d’emblée. La réponse ne doit pas être retardée jusqu’à la fin de la dissertation juridique. (Attention, il n’y a jamais de conclusion dans une dissertation juridique !)

L’introduction d’une dissertation juridique ne doit pas être trop courte (1/4 du devoir au moins !) et doit être très structurée. Elle devra répondre aux 3 questions suivantes :

+ De quoi va t-on parler ? (le sujet- la question)

+ Pourquoi va t-on en parler ? (l’intérêt du sujet)

+ Comment va t-on en parler ? (la solution, l’annonce et la justification du plan).

Par une progression logique de l’introduction, le lecteur doit savoir, à la fin de cette dernière, ce qui sera démontré dans les développements annoncés.

Ainsi, l’introduction doit comprendre plusieurs phases (mais qui ne seront pas intitulées dans la rédaction !) :

o Ce que l’on va dire

Présentation du sujet :

Il s’agit de situer le sujet dans son contexte. Il ne faut pas commencer dès la première phrase par l’énoncé du sujet. Il convient d’amener progressivement au sujet, lequel devra être expressément formulé au sein d’une phrase, sans pour autant « remonter au déluge ». Le procédé le plus usuel est celui de « l’entonnoir » : partir d’un secteur vaste, puis resserrer et arriver au sujet.

Exemple : le nom. Evoquer les différents moyens d’individualiser les sujets de droit pour parvenir au moyen d’identification qu’est le nom.

Délimitation du sujet :

Elle doit être plus ou moins rapide selon le type de sujet. Tout est ici question de bon sens. Plus le sujet est large, plus cette délimitation devra être argumentée.

Il conviendra en tout état de cause de :

o préciser les termes du sujet, en les définissant au besoin rapidement (« le contrat, c’est-à-dire la convention qui a pour effet de créer des obligations…. »). Il faudra également, dans le même ordre d’idées, citer les textes qui régissent le sujet, ou les adages…

o établir des rapprochements avec des notions voisines pour mieux les différencier, éventuellement puisées dans d’autres disciplines juridiques.

o éliminer les questions qui ne seront pas traitées, en justifiant ces exclusions.

o Pourquoi on va le dire :

Il s’agit essentiellement :

o de relever les implications extra-juridiques éventuelles du sujet (sociologiques, philosophiques, etc….) en évitant toutefois de s’étendre longuement ;

o de faire référence à l’Histoire (du droit en particulier) et aux données du Droit comparé (lorsqu’on les connaît avec certitude) ;

o de souligner la portée juridique du sujet, en notant par exemple qu’il peut y avoir des points d’émergence dans différentes disciplines juridiques ;

o de dégager les difficultés du sujet, les problèmes qu’il suscite.

o Comment on va le dire :

Nous annoncerons ici le plan de manière claire et précise ce qui sera nécessairement le cas si tout ce qui l’a précédé a été correctement suivi. (Autrement dit, tous les éléments de l’introduction doivent se suivre naturellement et de façon parfaitement logique !)

On évitera en conséquence un plan qui arrive de manière totalement inopiné.

III – REDACTION

Elle est effectuée à partir du plan détaillé.

La rédaction de l’introduction se fait en allant à la ligne pour chaque subdivision évoquée car les intitulés précédemment évoqués ne doivent pas apparaître expressément dans le devoir.

Puis la rédaction du corps du sujet se déroule comme suit : on dégage ici les titres : I- intitulé ; A, B : intitulé des sous-parties ; II- intitulé ; A, B : intitulé des sous-parties…

On aménage des transitions entre les passages différents (entre I et II, A et B) et des « chapeaux » (annonces de A et B, 1 et 2). A tout instant, le lecteur doit savoir où il se trouve dans la progression du raisonnement et dans quelle direction on entend le conduire.

On n’utilise pas le « je » mais plutôt le « nous ».

Pas d’abréviations.

On rédige des phrases courtes et correctes. On utilise des mots simples et précis (les termes juridiques adéquats).

On écrit très lisiblement.

Dernier conseil : relire attentivement !

Quelle est la méthode à suivre pour découvrir le plan du sujet proposé ?

Avant toute chose il faut lire le sujet avec attention, plusieurs fois afin d’être certain de le comprendre.

On part du sujet afin de le traiter dans son intégralité : en faire ni trop peu ni pas assez…

Méthode des 3 feuilles :

1. Sur une première feuille on jette toutes les idées dans l’ordre où elle se présentent, toutes les idées que suscite le sujet.

Il ne faut pas hésiter à passer le temps qu’il convient à cette partie du travail car il faut être sûr de ne rien oublier. Après relecture, on élimine les idées qui, à la réflexion, n’auront pas à être évoquées, car elles sont étrangères au sujet (si elles ont néanmoins un rapport ac le sujet on les évoquera dans l’introduction au titre des rapprochements ou des éliminations nécessaires.

2. Sur une deuxième feuille, on entame la phase de construction de la matière, en regroupant par grandes masses les idées retenues sur la première feuille. Ce regroupement doit se faire de façon logique, en examinant ce qui rapproche telle idée de telle autre. On arrive ainsi à élaborer des ensembles d’idées cohérents.

3. Sur la troisième feuille, on achève la phase de construction, en regroupant à leur tour ces ensembles en 2 ensembles + grands, à partir de deux idées qui les réunissent. Puis on construit, de la même manière, les sous-parties, et leur contenu respectifs.

L’élaboration de l’introduction se fait à part et en dernier lieu, lorsque le plan aura été définitivement arrêté

Méthodologie : la fiche d’arrêt (L1 de droit)

Fiche rédigée par Hugo.

La fiche d’arrêt ou fiche de jurisprudence doit faire ressortir les 6 points suivants :

  1. La date et la juridiction ;
  2. Les faits ;
  3. La procédure ;
  4. Les prétentions et arguments des parties ;
  5. Le problème juridique ;
  6. La solution apportée au problème.

1. La date et la juridiction

Quelle est la date de la décision, est-ce un arrêt (cour d’appel, cour de cassation), un jugement (tribunaux)? Quelle est la juridiction qui a prononcé la décision?

Phrase type :
Il s’agit d’un jugement du tribunal correctionnel de Paris rendu le 6 mars 1997.

2. Examen des faits

Ce sont les événements d’où est né le conflit, le litige entre les différentes parties. Il faut les résumer dans l’ordre chronologique et mentionner que ce qui n’est contesté par personne, c’est-à-dire les faits constants . Il faut donc être neutre sur cette partie.

3. La procédure

Indiquez dans la mesure où la décision le mentionne, et selon l’état d’avancement de la procédure :

– quel était l’objet de cette première demande, ou requête, ou poursuite ;

– la décision prise par la juridiction de première instance ;

– qui a fait appel et sur quels arguments ;

Ne mentionnez pas encore les prétentions et arguments des parties si c’est une action engagée pour la première fois. En gros, précisez ici, ce que la personne a fait pour arriver devant la juridiction.

4. Les thèses en présence, prétentions et arguments des parties

Indiquez les thèses ou prétentions soutenues par les parties devant la juridiction qui a rendu la décision à analyser.

  • En première instance, ce sont la demande et défense initiales (opposez demandeur et défendeur) ;
  • En appel, ce sont les prétentions de l’appelant et de l’intimé ;
  • Devant la Cour de Cassation, les deux positions adverses sont :
    • la décision prise par l’arrêt attaqué ;
    • l’argumentation du pourvoi qui attaque cet arrêt.

5. Le problème de droit

La question de droit doit être posée en termes juridiques et abstraits, c’est-à-dire sans références à l’affaire, comme un problème général. Le problème doit impérativement être posé sous forme d’interrogation (avec le « ? »).

Il concerne souvent l’interprétation d’un article du code. Il est fortement conseillé de mentionner, de citer l’article concerné dans la formulation du problème.

6. Solution apportée au problème posé

Précisez ici les motifs de la décision de la juridiction c’est-à-dire ce qui l’a amené à rendre cette décision. Ensuite, indiquez la décision de la juridiction (solution de droit) : rejette, casse, condamne etc. Mettez en évidence les deux parties en les écrivant sur votre fiche. Une partie « motifs de la décision » et une autre « décision rendue ».

L’examen oral en licence de droit : conseils d’un examinateur

Fiche rédigée par Stéphan Ludot.

Voici les conseils d’un examinateur !

1. L’attente dans le couloir

Un oral commence toujours par cette phase plus ou moins longue que l’on a tendance à négliger. Il vous appartient d’établir au préalable votre ordre de passage. Si l’enseignant se tient au strict ordre alphabétique, vous ne pouvez qu’attendre votre tour. S’il prend les premiers qui passent, vous devez prendre votre décision selon votre degré de confiance. Vous maîtrisez l’ensemble des connaissances requises, alors passez le plus tôt possible, éventuellement en première place. Non seulement vous serez débarrassé de cet examen, mais en plus, vous bénéficierez d’une certaine indulgence de la part de votre correcteur. Si vous n’êtes pas assez en confiance, attendez de voir ce que donnent les premiers passages : vous serez ainsi renseigné sur les exigences de votre enseignant et aurez plus de temps pour réviser.

Dès votre arrivée, saisissez-vous d’une chaise afin de ne pas attendre debout. Il vaut mieux que vous soyez un peu à l’écart, pour ne pas subir l’assaut des bavardages en tout genre et des fumées de cigarettes nerveusement grillées (si le tabac est autorisé), mais pas trop éloigné, pour se tenir au courant de ce qui se passe.

2. La tenue vestimentaire

La venue d’étudiants en costume sombre et cravate empruntée au frère aîné m’a toujours amusé dans ce genre de circonstances. Votre tenue doit être propre et décente afin que le correcteur ne puisse pas nourrir d’inutile préjugé à votre encontre. Choisissez une tenue qui vous mette en valeur sans que vous paraissiez guindé. Un vêtement que vous aurez déjà portée et dans laquelle vous vous sentez physiquement à l’aise représente un atout supplémentaire dans votre mise en confiance. Les étudiantes ne doivent pas faire preuve d’une séduction tapageuse qui risquerait de voir s’attirer les foudres du correcteur : n’oubliez pas que les universitaires sont assez traditionnalistes dans leur comportement !

3. Le temps de préparation

La durée de la préparation est variable, il se peut même que vous n’en ayez pas du tout. Préparez à l’avance quelques feuilles vierges, même s’il y en a de prévu à votre disposition, et de quoi écrire. En dépit du manque de concentration qu’occasionne le passage de l’étudiant qui vous précède, vous devez vous concentrez uniquement sur votre sujet. Vous n’avez que quelques minutes pour le cerner et le définir. Faites un plan en 2 parties et 2 sous-parties. Il est très important de noter les éléments de connaissance indispensables : jurisprudence, articles du Code, législation, chronologie… Vos notes doivent être brèves, parce que vous avez peu de temps et surtout parce que vous devrez vous entretenir avec le correcteur et non lire vos papiers.

4. Le comportement durant l’entretien

Vous devez faire preuve de politesse à l’égard de l’enseignant : dire bonjour et au revoir représentent le minimum requis. Faire passer des oraux n’a rien d’exaltant pour un correcteur. Il s’agit en effet de passer plusieurs jours de 9h à 18h à écouter des étudiants (mal) réciter le cours qu’il aura dispensé durant une année. Il vous appartient donc de faire preuve de retenue durant l’oral. Ne jouez pas avec votre stylo et ne gesticulez pas dans tous les sens. Vous croyez ainsi évacuer l’angoisse qui vous étreint mais, en réalité, vous ne faîtes que vous énerver et vous déconcentrer. Vos mains doivent être en évidence sur la table et ne pas s’agiter en une sarabande frénétique. Vous devez regarder votre interlocuteur dans les yeux sans pour autant le braver.

Votre interlocuteur peut choisir plusieurs sortes de comportement. Il peut ne rien dire, ce qui est angoissant lorsque vous vous taisez au bout de quelques minutes ou, au contraire, passer l’oral à votre place. Un oral est un entretien au cours duquel vous devez exposer rationnellement vos idées en les argumentant. Il est très important de ne pas subir le « jeu » du correcteur mais d’émettre vos avis argumentés. Si l’on vous pose une question que vous jugez déconcertante, n’hésitez pas à demander des précisions tout en démontrant que son énoncé est trop vague (pour vous) en raison des données qu’elle nécessite. Vous ne devez jamais émettre d’avis non argumenté. Si vous n’êtes pas sûr d’une information, ne la mentionnez pas, car elle pourrait servir d’ouverture à l’enseignant pour une série d’interrogations auxquelles vous ne sauriez pas répondre.