Chapitre 6 : Les obligations des parties au contrat de travail

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Section 1 : Les obligations de l'employeur

§ 1. L’obligation de fournir du travail au salarié

La première obligation est évidente mais doit être rappelée : l'employeur a l'obligation de fournir du travail au salarié.
C'est une obligation contractuelle : si l'employeur ne fournit pas de travail au salarié, il doit quand même le rémunérer.

💡
Le fait de ne pas fournir de travail ou de ne pas fournir les moyens de réaliser l'activité constituent des fautes, qui pourraient justifier la rupture du contrat aux torts de l'employeur.

§ 2. L’obligation de loyauté / de bonne foi

L'obligation de loyauté ou de bonne foi (la chambre sociale utilise ces 2 termes sans distinction) est prévue par l'article 1104 du Code civil.
Dans la mesure où on est dans une relation contractuelle déséquilibrée, la loyauté est renforcée à la charge de l'employeur (qui est la partie forte).
La Cour de cassation peut se montrer exigeante :

  • Lorsque l'employeur mute un salarié entre 2 emplacements, il doit prendre en compte les impératifs tenant à la vie personnelle et familiale du salarié, sur le fondement de la bonne foi.
    Autrement dit, la bonne foi peut amener à prendre en compte des éléments extracontractuels.
  • Cass. soc., 8 février 2023 :
    Un employeur expose fautivement un salarié à l'amiante, sans lui donner les protections appropriées. Le salarié n'a pas développé de maladie liée à l'amiante, mais se voit reconnaître un préjudice d'anxiété.
    Le fait que l'employeur ait laissé le salarié au contact de l'amiante en connaissance de cause justifie-t-il un préjudice supplémentaire ?
    Oui, sur le fondement de l'obligation de bonne foi.
    La Cour de cassation estime qu'il y a un préjudice supplémentaire tiré du fait que l'employeur n'ignorait pas le risque qu'il faisait encourir au salarié.
    Pour Laurent Aynès, "la bonne foi, c'est la bonne à tout faire".

§ 3. L’obligation de sécurité

L'obligation de sécurité permet de justifier la réparation de certains préjudices. Elle a été inventée au sein de l'ancêtre du droit du travail à la fin du 19ème siècle.
Elle fonde les obligations de l'employeur en matière de respect du temps de travail, en matière de prévention des risques professionnels, en matière de prévention du harcèlement…
De manière générale, l'employeur doit garantir la santé physique et psychique de ses salariés.

Progressivement, l'obligation de sécurité s'est émancipée du contrat de travail : on considère aujourd'hui que c'est une obligation légale, et non plus contractuelle.
Elle s'appuie sur l'article L4121-1 du Code du travail.

Tant qu'elle était contractuelle, on retrouvait la jurisprudence sur les obligations de moyen et de résultat ; à partir du moment où elle est légale, cette distinction n'a plus de sens.

L'employeur qui rapporte la preuve qu'il a pris toutes les mesures qu'impose l'exigence de sécurité des salariés n'engage pas sa responsabilité.

Section 2 : Les obligations du salarié

Le salarié doit exécuter la prestation de travail, conformément aux standards d'un salarié normalement diligent.
Le critère pour savoir si cette exécution est satisfaisante est le critère in abstracto du "bon père de famille" (remplacé par celui d'une "personne raisonnable").

Il n'y a pas d'obligation de sécurité à la charge du salarié.
En revanche, de manière symétrique, le salarié est tenu d'une obligation de loyauté.
Celle-ci se traduit essentiellement par l'interdiction d'exercer une activité concurrente à celle de l'employeur.
💡 Cela signifie qu'une clause de non-concurrence n'a pas d'intérêt pendant l'exécution du contrat !

Parfois, le contrat de travail est suspendu : les obligations ne sont pas exécutées, mais le contrat persiste.
Par exemple, le contrat de travail est suspendu pendant une grève ou pendant un arrêt maladie.
Or la Cour de cassation décide depuis très longtemps que la suspension du contrat de travail laisse subsister l'obligation de loyauté.

Cass. com., 12 octobre 2011 :
La Cour de cassation atténue cette jurisprudence.
Elle juge que "l'exercice d'une activité pendant un arrêt de travail provoqué par la maladie ne constitue pas en lui-même un manquement à l'obligation de loyauté qui subsiste pendant la durée de cet arrêt".
Pour qu'il y ait déloyauté (et donc faute du salarié qui justifierait un licenciement), l'activité doit avoir causé un préjudice à l'employeur.

Il faut noter que l'exercice d'une activité pendant un arrêt de travail constitue une faute à l'égard des organismes de sécurité sociale – mais ça n'est pas une faute à l'égard de l'entreprise.
La Cour de cassation a depuis ajouté que le maintien intégral du salaire par l'employeur pendant l'arrêt de travail (parfois prévu par des accords collectifs) ne constitue pas un préjudice.
→ Jurisprudence très protectrice des salariés.

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