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Normalement, le bail commercial est conclu pour une durée minimale de 9 ans (article L145-4 du Code de commerce).
Mais la résiliation du bail peut intervenir pendant son exécution.
Résiliation par le propriétaire bailleur :
- La résiliation peut résulter d’une décision judiciaire rendue par le tribunal judiciaire saisi à l’initiative du bailleur ;
- La résiliation peut aussi résulter de l’application d’une clause résolutoire prévoyant la résiliation de plein droit du bail dans certains cas énumérés (exemple : l’inexécution des obligations).
Cependant, dans ce cas, le bailleur qui entend s’en prévaloir doit adresser au preneur un commandement lui rappelant ses obligations et la résiliation est acquise que si ce commandement reste sans effet pendant un mois.
Le preneur peut aussi demander au juge des délais ou qu’il suspende la résiliation.
Résiliation par le locataire :
Article L145-4 du Code de commerce :
”La durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans.
Toutefois, le preneur a la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale, au moins six mois à l’avance, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par acte extrajudiciaire.”
C’est pour ça qu’on parle souvent de bail 3-6-9 : le preneur peut résilier tous les 3 ans.
Contenu
Section 1 : Le droit au renouvellement du bail commercial
§ 1. Les conditions du droit au renouvellement
A – Condition relative au titulaire du droit
Article L145-8 :
Le droit au renouvellement ne peut être demandé que par le propriétaire du fonds qui est exploité dans les lieux.
Ce droit appartient au preneur initial, mais aussi au sous-locataire :
Article L145-32 : le sous-locataire peut, à l’expiration du bail principal, en demander directement le renouvellement au bailleur principal, dès lors que la sous- location a été expressément ou tacitement agréée ou autorisée par le bailleur.
Civ. 3, 28 octobre 2009, n°08-18.736 :
Faute d’avoir été appelé à concourir à l’acte de renouvellement et à défaut d’agrément tacite clair et non équivoque de la part du propriétaire, le sous-locataire n’a pas de droit direct au renouvellement.
→ Le bailleur doit être appelé à concourir à l’acte de renouvellement.
B – Condition relative au fonds
Article L145-8 : le fonds doit avoir fait l’objet d’une exploitation effective au cours des trois années qui ont précédé la date d’expiration du bail ou de sa reconduction.
Cette condition est est écartée lorsque le défaut d’exploitation repose sur des “motifs légitimes” tels que la maladie.
Il faut que le fonds exploité dans les 3 dernières années soit le même fonds, et non un fonds nouveau (la question peut se poser en cas de déspécialisation plénière).
§ 2. La procédure de renouvellement du bail commercial
Contrairement au droit commun du contrat de louage, le bail commercial ne cesse pas de plein droit à la survenance du terme contractuel : seul le congé peut y mettre fin (article L145-9 du Code de commerce).
Le congé est l’acte juridique par lequel le bailleur informe le preneur de ses intentions pour la période postérieure à l’échéance de la 9ème année : droit de reprise, offre de renouvellement moyennant une modification du prix…
Le preneur peut émettre une demande de renouvellement dans les 6 mois précédent l’échéance du bail (article L145-10).
Section 2 : Le refus du renouvellement
On distingue 2 hypothèses :
1- le refus de renouvellement qui oblige le bailleur à payer une indemnité d’éviction ;
2- le refus de renouvellement quand le bailleur entend exercer son droit de reprise.
§ 1. L’indemnité d’éviction
Article L145-14 du Code de commerce :
”Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d’éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement.
Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.”
Article L145-28 :
”Aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d’éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l’avoir reçue. Jusqu’au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré.”
Exception :
”Par dérogation […] le locataire doit quitter les lieux dès le versement d’une indemnité provisionnelle fixée par le président du tribunal judiciaire statuant au vu d’une expertise préalablement ordonnée”.
La jurisprudence consacre une sorte de “droit de repentir”, qui donne au bailleur le droit de revenir sur sa décision en consentant finalement au renouvellement.
Civ. 3, 28 mai 2020, n°19-15.001 :
Lorsque les parties ont déclaré se soumettre volontairement au statut des baux commerciaux, sauf à dénaturer les termes de leur convention, le bailleur ne peut pas se réclamer de l’absence d’immatriculation au RCS du preneur pour se soustraire à son obligation de payer une indemnité d’éviction.
§ 2. Le droit de reprise
L’article L145-17 du Code de commerce reconnaît des droits de reprise au bailleur.
Plusieurs causes de reprise sont ainsi admises légalement (→ le renouvellement peut être refusé sans paiement de l’indemnité) :
- Reprise pour “motif grave et légitime à l’encontre du locataire sortant”.
Exemple : si le preneur a cessé l’exploitation sans raison sérieuse et légitime, s’il ne respecte pas de façon continue une ou plusieurs obligations du bail…
Ici, on doit distinguer :- Soit la faute est réparable (exemple : l’inexécution d’une obligation qui peut être exécutée) : le bailleur doit mettre en demeure de régulariser.
C’est seulement si l’inexécution se poursuit plus d’1 mois après la mise en demeure, que le bailleur peut invoquer la faute du locataire et reprendre le local sans verser d’indemnité d’éviction.
- Soit la faute n’est pas réparable : la mise en demeure préalable au congé n’est pas nécessaire.
Le bailleur fait jouer son droit de reprise (pas de renouvellement, pas d’indemnité d’éviction pour le preneur).
Civ. 3, 28 octobre 2009, n°07-18.520 :
L’absence ou l’insuffisance de motivation d’un congé avec refus de renouvellement pour motifs graves et légitimes sans offre d’indemnité d’éviction laisse subsister le congé et le droit pour le preneur de prétendre au paiement d’une indemnité d’éviction. - Soit la faute est réparable (exemple : l’inexécution d’une obligation qui peut être exécutée) : le bailleur doit mettre en demeure de régulariser.
- Reprise pour démolition de l’immeuble insalubre et dangereux.
- Reprise pour reconstruction de l’immeuble.
Ici, l’ancien preneur jouit d’un droit de propriété.
- Reprise partielle pour habitation ou réaffectation à un usage d’habitation (L145-22).
Il faut aussi noter l’article L145-6, qui prévoit que :
”Le bailleur d’un local à usage commercial, industriel ou artisanal peut, au cours du bail originaire ou d’un bail renouvelé, reprendre les lieux en tout ou partie pour exécuter des travaux […] s’il offre de reporter le bail sur un local équivalent dans le même immeuble ou dans un autre immeuble. Cette offre précise les caractéristiques du local offert, lequel doit permettre la continuation de l’exercice de l’activité antérieure du locataire. L’offre doit être notifiée un an à l’avance.
Le locataire doit, dans un délai de deux mois, soit faire connaître son acceptation, soit saisir des motifs de son refus la juridiction compétente, faute de quoi il est réputé avoir accepté l’offre.”